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Quand Sarkozy légitime (enfin) le discours de gauche

Publié le 29 août 2008 par Juan
Quand Sarkozy légitime (enfin) le discours de gauche
En déplacement à Laval, en Mayenne, ce jeudi 28 août Nicolas Sarkozy a a annoncé la généralisation du Revenu de Solidarité Active (et c'est tant mieux), en direct devant les caméras de télévision de LCI, i-télé et BFM-TV.
Ce nouveau dispositif doit remplacer le RMI et l'Allocation de parent isolé (API) en permettant un cumul partiel des revenus du travail et de solidarité. Il devrait concerner 3,7 millions de ménages. Ce taux de cumul entre les revenus de solidarité et du travail a été fixé à 62% (un nouveau salarié pourra conserver 38% de son RSA en sus de son salaire). Côté financement, la rumeur des jours précédents fut confirmée: "Les revenus du capital étaient jusque-là taxés à 11%, ils le seront désormais à hauteur de 12,1%. Cette contribution spécifique de solidarité entrera en vigueur le 1er janvier 2009."
Il a semblé abasourdir la Sarkofrance, c'est-à-dire ses proches, ses soutiens, ses supporters avec ses déclarations, entre angélismes et lapalissades. Ce discours est historique tant il contredit la quasi-totalité des mesures sociales et fiscales mises en oeuvre depuis mai 2007.
1. Les plus pauvres ont besoin d'être aidés
Il a ainsi admis que le RSA ne peut être financé par la suppression d'autre dispositifs sociaux, telle la Prime Pour l'Emploi. Ou encore:
«Moi mon rôle, c'est d'apporter des réponses aux problèmes de la société française, je veux ramener au travail les exclus. C'est un sujet majeur pour moi, c'est un élément de la justice sociale, et la majorité doit se saisir de ce problème de l'insertion et de la justice, sinon elle se caricature».
2. Les plus riches doivent être solidaires.
"Dans un contexte où, depuis plusieurs années, les salaires progressent beaucoup moins vite que les revenus du capital, dans un contexte où l'on explique aux salariés de tant d'entreprises qu'il n'y a pas de quoi augmenter les salaires en bas et qu'au même moment, on augmente la distribution des actions et les dividendes en haut, il n'est quand même pas anormal que les revenus du capital soient mis à contribution pour revaloriser le travail des plus démunis et des plus exclus"
Ou mieux :
"S'il y a de l'argent pour le haut, il doit aussi y avoir de l'argent pour le bas, pour soutenir le revenu de ceux qui font l'effort de se lever chaque matin. J'assume"
3. La France souffre de déficits.
"Ce ne sont pas les déficits qui financeront la réforme"

4. "Les salaires progressent beaucoup moins vite que les revenus du capital."

5. Il ne faut duper les électeurs avec de fausses promesses.
"Le RSA n'est pas un marché de dupes" (...) "Le RSA, c'est zéro entourloupe pour les bénéficiaires, puisqu'on ne leur retirera rien et qu'on ne prendra pas sur la prime de Noël. Et c'est zéro entourloupe pour les Conseils généraux, puisque c'est l'Etat qui prend en charge le surcoût".
C'est un angélisme de façade. Sur le fonds et le forme, on peut faire effectivement quelques constats complémentaires :
Primo, Sarkozy laisse à une majorité réticente le soin de décider de l'intégration ou pas de cette nouvelle taxe sur le capital dans le bouclier fiscal. Pour une fois, il se déclare ouvert à ce que le Parlement décide de l'exclure. En d'autres termes, il laisse sa majorité décider si cette taxe ne frappera que les classes moyennes, qui ne bénéficient pas du bouclier fiscal à 50% faute de revenus suffisants. Vous avez dit hypocrite ?
Deuxio, nous sommes clairement en monarchie élective. Le Président a arbitré et décidé cette réforme jusque dans ses moindres détails. Son discours de Laval se conjuguait au futur simple, pas au conditionnel qu'un éventuel débat parlementaire aurait supposé. Les parlementaires auront leur os à ronger pour justifier leurs émoluments (cf le point ci-dessus).
Tertio, Sarkozy ridiculise sa majorité. D'ailleurs, il en a parfaitement conscience:«la majoriténe doit pas se caricaturer» a-t-il déclaré. Serait-il inquiet ? Son annonce a été reçue par une volée de bois vert ... à droite : le sénateur UMP et blogueur Alain Lambert parle de "couardise idéologique." Lionnel Luca, député UMP des Alpes-Maritimes, craint une future expatriation supplémentaire des capitaux. Hervé Mariton, député UMP, a déclaré que le mode de financement du RSA n'est "pas acceptable". Un autre a parlé de mesure "socialo-communiste."
Quarto, Sarkozy jubile de son coup politique... Il espère couper l'herbe sous le pied d'une gauche qui se refonde. Cette dernière aurait tort de s'inquiéter. Cette annonce pourrait être une excellente nouvelle. Elle déçoit un peu plus une frange fragile et volatile de l'électorat sarkozyste (je ne parle pas du MEDEF); et prouve l'inconstance politique de l'action présidentielle (69 semaines de casse sociale pour en arriver là); mais avant toute chose, le discours présidentiel légitime une bonne part du programme social de l'opposition.
Merci Mister President, ...

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