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Codex Caioni : noces tziganes

Publié le 09 septembre 2008 par Philippe Delaide

Jean-Christophe Frisch et son ensemble XVIII-21 continuent leur singulier itinéraire baroque nomade avec cette fois le Codex Caioni. Johannes Caioni est un organiste du XVIIème siècle, originaire de Transylvanie, et officiant dans un monastère franciscain. Son parcours fait parte des destinées particulières de cette époque à la frange de la musique ancienne et du baroque. Compositeur, facteur d'orgue, ce premier musicien roumain dont les talents sont reconnus en Europe, a construit au fil des ans un Codex, recueil d'œuvres originales mais aussi transcriptions, copies de compositions, dont une partie provenait des musiciens vénitiens, particulièrement influents en Europe centrale.

Codex Caioni
Comme le souligne Jean-Christophe Frisch dans le livret accompagnant le CD, le manuscrit (d'ailleurs retrouvé par hasard par un maçon en 1988 alors qu'il avait été dissimulé par les moines lors de l'invasion soviétique), est noté en tablatures d'orgues. Les notes sont indiquées sur la portées avec des lettres correspondant aux différentes touches du clavier de l'orgue. Caioni, comme beaucoup d'organistes de son époque, procédait ainsi car, connaissant les œuvres par cœur, il se contentait de cette notation sommaire pour disposer de marques lui permettant de reprendre ses repères harmoniques et rythmiques. La conséquence est une indispensable tentative d'extrapolation, ce d'autant plus que nombre de voix ne sont pas copiées en ligne et qu'en outre, le manuscrit comprend de nombreuses fautes, du fait d'une rédaction rapide.

Jean-Christophe Frisch a également pris le parti, réussi, d 'associer des musiciens du répertoire populaire tzigane à son ensemble.

Ce codex est alors présenté ici comme l'accompagnement musical d'un mariage traditionnel en Transylvanie avec quatre tableaux : le matin au château, à l'église, petit spectacle devant les mariés, banquet.

Alternent des pièces de compositeurs italiens (Carissimi, Praetorius, Ucellini), qui rappellent aussi bien Monteverdi, Gabrielli que certaines consonances "Schütziennes". Le codex permet de découvrir un très beau Salve Regina, semble-t-il de Caioni lui-même. On notera également la Bergamasque étonnante d'Uccellini, dernière piste du CD.

Ces compositions, pour la plupart sacrées, sont ponctuées d'airs traditionnels tziganes et des compositions inclassables.On est tout de suite  capté par le lancinant Lepus intra sata quiescit, symbolique, selon Jean-Christophe Frisch, de la vie trépidante de Caioni, menacé tout à tour par la royauté, l'armée et le clergé, s'identifiant au lièvre (Lepus) traqué lui aussi en permanence par les chasseurs. D'où le choix de la superbe aquarelle de Dürer représentant un lièvre comme couverture du CD.

J'ai noté le magnifique et poétique O quales flores et également, le très oriental Lupul Vaidane eneke.

L'ensemble orchestral composé pour l'occasion est d'une justesse émouvante, tout comme l'excellente soprano Cyrille Gerstenhaber, au timbre limpide et sensuel.

Ce CD tient vraiment une place à part dans la lecture du répertoire baroque et son approche est particulièrement rafraichissante. A recommander quand on désire sortir des sentiers battus.

L'ensemble XVIII-21 interprète ce Codex en concert sous le titre de "Noce Tziganes" le 2 décembre à la salle Gaveau.

Lien direct vers le site Arion Music pour plus de détails.

Lien direct vers classicnews.com ou qobuz.com également pour plus d'informations.

Codex Caioni - Ensemble XVIII-21 - Direction Jean-Christophe Frisch - label Arion Music.


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