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Massacre au pont de No Gun Ri de Park Kun-woong et Chung Eun-yong

Publié le 14 octobre 2008 par Malaurie @jfbib
Massacre au pont de No Gun Ri de Park Kun-woong et Chung Eun-yong Corée, années 1950, la guerre fait rage.
Épicentre de la lutte acharnée que se livrent l'Est et l'Ouest, le monde rouge et le monde capitaliste, les bons et les méchants, la Corée est un théâtre où se joue une épopée dramatique grandeur nature. Les militaires et hommes politiques expérimentent leurs divergences sur le dos des civils. Rien de plus normal me direz-vous. Effectivement, ce n'est pas là que l'on a inventé les massacres, les dommages collatéraux, la bêtise humaine dans toute sa splendeur. Et comme dans toute guerre il faut bien aussi qu'il y ait pour l'Histoire un gagnant et un perdant, un bon et un mauvais, affreux, méchant, vilain... Qui sont-ils ces deux là ? Évident, n'est ce pas ? L'Est, rouge, communiste est le vilain pas beau, d'autant plus que la Corée, encore partitionnée aujourd'hui selon cette vision historique, possède une partie Nord qui reste encore actuellement un lieu infréquentable (lisez Pyongyang de Guy Delisle pour vous rendre compte de combien la vie là-bas est étrangement différente). Ce pays fait parti de l'axe du mal défini par les bon américains, libéraux et capitalistes qui dominent le monde libre avec des principes justes et équitables. Vous savez bien, nous voyons la concrétisation quotidienne de ces principes parmi ces fameuses subprimes, crédits hypothécaires, et autres recapitalisation publique des banques -les pôvres- en faillite, pendant que les pauvres -les vrais, eux - hères deviennent encore plus marginalisés, rejetés, exclus, solitaires.
Bon, arrêtons de persiffler et plongeons nous dans roman graphique fleuve : 610 pages.
C'est l'histoire d'une famille modèle : un père Eun-yong, une mère Park Sun-yung et leurs deux enfants, garçon Gu-pil et fille Gu-hee. Dès le début de l'offensive des soldats communistes, les voilà jeté sur les routes. Ils descendent vers le Sud, se réfugiant chez des membres de leurs familles, dans les bois et les montagnes, toujours poussés plus loin par les combats ; ne comprenant rien aux mouvements de troupes dont ils sont spectateurs ; jusqu'au jour où Eun-yong est obligé de partir seul de peur d'être pris par les Rouges.
La séparation est douloureuse mais indispensable. Eun-yong part avec les autres hommes, ils laissent derrière eux un groupe essentiellement composé de femmes, d'enfants et de vieillards.
Eun-yong, après avoir atteint le Sud n'aura de cesse de retrouver les membres de sa famille. Il va travailler dans un port pour décharger les bateaux ravitailleur américains. Des indices le mèneront petit à petit à retrouver sa femme dans un hôpital. Park Sun-yung va lui raconter le calvaire qu'elle a vécu après leur séparation.
Cette longue narration de Park Sun-yung est absolument incontournable. Parfaitement insupportable, le récit des quelques survivants du massacre au pont de No Gun Ri est un témoignage capital pour dénoncer la barbarie de la guerre et des hommes qui la font. Parmi ces hommes il y a certes les soldats (du simple troupier qui appuie sur la gâchette à l'officier qui donne les ordres) mais aussi les hommes politiques et autres dirigeants qui ont décidé cette guerre et qui se cachent, dans leur costumes immaculés, des exactions commises en leur nom sur le terrain. Park Sun-yung et Eun-yong sont des victimes de cette stupidité innommable. Et nous n'aurons de cesse de raconter leur histoire !!!

Un livre qui fait l'effet d'une bombe à émotions. Très dur mais complètement nécessaire pour raconter l'indicible, l'horreur militaire et guerrière, la stupidité et la connerie humaine. Après cela impossible de ne pas penser à l'Irak, l'Afghanistan, la Tchétchénie..., et penser aussi à Gen d'Hiroshima de Keiji Nakazawa. Le roman initial est de Chung Eun-yong, né en 1923 et n'est toujours pas traduit. Le dessinateur Park Kun-woong (né en 1972) l'a admirablement adapté, il est aussi l'auteur de la série Fleur sur la guerre de Corée.

Des compléments historiques utiles chez Fabien Tillon, sur le blog de Coconino

Parcours de lecture dans les manwha :

La bicyclette rouge - Kim Dong-hwa (15 mai 2008)

Massacre au pont de No Gun Rin - Park Kun-woong et Chung Eun-yong (16 octobre 2008) Chagrin dans le ciel - Lee Youn-bok et Lee Hee-jae (1er août 2009)

La mal aimée - Kim Dong-hwa (15 août 2009)

L'idiot - Full Kang (1er septembre2009)

Le visiteur du Sud - Oh Yeong Jin (15 septembre 2009)


Massacre au pont de No Gu Rin
de Park Kun-woong et Chung Eun-yong, Vertige graphic, 2007 - 29,00 €.

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