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Crise financière: l'étrange société écran

Publié le 21 octobre 2008 par Juan

Les téléspectateurs attentifs de Dimanche+, le 19 octobre sur Canal+, auront noté l'explication donnée par Marie-George Buffet (PC) à son vote négatif contre le plan de sauvetage bancaire présenté en urgence à l'Assemblée Nationale mardi 14 octobre : le gouvernement a confié à deux sociétés la gestion du plan. La première est un organisme public, intégralement contrôlé par l'Etat, qui gère les garanties éventuellement apportées par l'Etat aux institutions financières.
Une société commerciale pour gérer la sortie de crise
La seconde, chargée de gérer le refinancement des établissements de crédits, sera un société mixte, avec une participation conjointe des établissements bancaires et de la puissance publique. Nous vous avions annoncé la création de ce "véhicule" de l'action publique. La surprise est sa gouvernance. On aurait pu croire que le gouvernement, échaudé par l'inconséquence bancaire et la tourmente boursière, aurait tenu à contrôler sans équivoque la société créé pour instruire le redressement du secteur bancaire. Que nenni !
Le capital de cette société est détenu à 66% par .... les banques elles-mêmes. Voici sa présentation dans le rapport du Sénat.

La société bénéficie d'une garantie de l'Etat, mais à titre onéreux. Un commissaire du gouvernement assiste aux séances de l'organe d'administration de la société avec un droit de veto sur les décisions de nature à affecter les intérêts de l'Etat au titre de sa garantie. Ses dirigeants seraient agréés par l'Etat, mais non nommés par lui. Elle constitue une institution financière. Il existe évidemment des institutions financières publiques, Banque de France ou Caisse des dépôts et consignations : elles ne sont pas classées au sein des administrations publiques, mais dans le champ des institutions financières.

Pour le traitement en comptabilité nationale de la société de refinancement des établissements de crédits, tout dépendra dès lors de son autonomie de décision par rapport à l'Etat, et des conditions d'exercice de son activité « d'intermédiaire financier ». En l'espèce, le critère important sera de savoir si la société s'expose réellement par elle-même au risque, comme un intermédiaire financier de marché, ou si elle agit au nom de l'Etat. Elle pourrait se définir comme une « structure de place ». Mais son intervention sera en pratique étroitement liée, puisqu'elle conditionne la garantie à des conventions que l'Etat passera avec les banques.

Quelques précautions pour un schéma "à la Crédit Lyonnais"
Cette "société de droit françaisbénéficiant de la garantie de l'Etat" aura pour "objet exclusif est de consentir, au moyen d'émissions obligataires, des prêts aux établissements de crédit garantis par des actifs." Elle sera de droit privé, avec une simple minorité de blocage accordé à l'Etat actionnaire. Le sénateur Marini, rapporteur du projet de loi, souligne les enjeux :

Votre rapporteur général entend se montrer particulièrement vigilant sur la prévention et la neutralisation des conflits d'intérêts, les actionnaires privés de la société étant à la fois décisionnaires et concurrents. La probable minorité de blocage de l'Etat, le droit de veto du commissaire du gouvernement, les modalités équitables de refinancement et les conditionnalités imposées par la contractualisation directe avec l'Etat (cf. infra) constituent cependant d'importantes garanties, qui pourront être confortées par le choix d'une personnalité indépendante et incontestée à la présidence de la société, comme par le reporting régulier et précis qui sera adressé au ministère de l'économie.
En termes de gouvernance, la société verra ses statuts et ses dirigeants agréés par arrêté du ministre chargé de l'économie. Un commissaire du gouvernement "assiste aux séances de son « organe d'administration » et dispose d'un droit de veto sur toute décision « de nature à affecter les intérêts de l'Etat » au titre de sa garantie".
Pour gérer les 320 milliards d'euros, la société émettra, "en fonction des besoins exprimés par les banques de la place", des emprunts obligataires avec la garantie de l'Etat. La loi prévoit cependant que la société de réalisera aucune marge sur ces prêts accordés aux banques. C'est l'Etat prêteur à l'institution qui bénéficiera directement de la rémunération des intérêts.
Comme le note Sylvain Lapoix pour Marianne2, rien n'est cependant dit sur la rémunération des futurs dirigeants de cette organisme mixte. Et si les banques emprunteurs ne peuvent plus rembourser, la dette passe à l'Etat.
Facile.&alt;=rss

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