L’Europe face au « boom asiatique » : l’envol du dragon rouge vietnamien

DECRYPTAGE RELATIO :« L’envol d’un dragon » titre Le Temps qui publie un excellent reportage et un bon éditorial signés Ignace Jeannerat. Le Vietnam, si historiquement lié à la France, ne doit effectivement pas être oublié par l’Union européenne quand elle évalue l’impact et les perspectives du « boom » asiatique. Il y a la Chine, bien sûr mais elle n’est pas la seule à faire des « miracles » économiques avec… des normes sociales d’un autre temps et des normes démocratiques complètement étrangères aux nôtres.  

Des faits et chiffres qui parlent :

>>> Le  Vietnam connaît un taux de croissance annuel de 7,3% en moyenne depuis dix ans, 8,2% en 2006. La deuxième performance de la région Asie-Pacifique, derrière la Chine mais devant l'Inde! Avec, comme en Chine des disparités régionales : les envolées sont plus spectaculaires au sud dans la région de Hô Chi Minh City (l’ancienne Saigon) où, selon les statistiques officielles, la croissance se chiffre à 12% en moyenne en 2006 (19% dans les services et 15% pour l'industrie au premier semestre 2007).

>>>> Les  PME seraient plus de 200 000 .Et le processus de restructuration des entreprises étatiques ne faiblit pas. De 2001 à 2005, 3346 sociétés étatiques sur 5655 ont été restructurées, 2188 ont été privatisées.

>>>> Le train de réformes du gouvernement  («Doi Moi») touche dans ses profondeurs , ce  pays de 84 millions d'habitants, dont 72% sont âgés de moins de 35 ans . Un seul mot d’ordre en trois mots : « travailler, consommer et s'enrichir ».

>>> Une classe bourgeoise émerge et la classe moyenne ( de 251 à 500 dollars de revenus par mois ) représente aujourd'hui 55% de la population, soit  78% de plus qu’en  1999 ! En une décennie, la part de la population qualifiée de pauvre est tombée de 58% en 1993 à 10% aujourd'hui. Objectif gouvernemental : « Faire sortir le Vietnam du groupe des pays à bas revenus en 2010 et en faire un pays industrialisé en 2020.»

>>> Le bâtiment va (presque) trop bien et rend méconnaissable le pays tel qu’ont pu le connaître ceux qui ont pu s’y promener à la fin de siècle dernier : Voir Danang et vivre ! Le port de guerre US rivalise avec les stations de la Costa Bava, explique Le Temps en mettant en relier la fascination qu’exerce le gigantisme « à l’américaine » chez ceux qui les GI’s surnommaient les « fourmis »…

>>> Les investissements étrangers pleuvent : 10,2 milliards de dollars en 2006, selon le FMI. A Danang, les capitaux sont surtout américains (44%), japonais (11%), coréens (8%), taïwanais (7%), etc. Et les investissements européens? Sur cette région, moins de 4%. Evidemment, ce n’est pas le paradis. L’admission au FMI en 2006 ne s’’est pas traduite par une application de toutes les règles. La croissance fait flamber la corruption, y compris « dans l’appareil d’Etat » et ce pays au ciel si merveilleux connaît une pollution à vous couper le souffle …

Le Temps note avec pertinence : « Cette transformation se produit dans l'un des derniers pays du monde dirigés par un Parti communiste sur le mode du monopole ». Très rouge, le dragon ! Le pays prospère, mais une prison dorée reste une prison ! La liberté reste une denrée rare, qui peut coûter très cher. « Ces derniers mois encore, une pluie de condamnations en justice est tombée sur des dizaines de dissidents, internautes, intellectuels. Avec pour objectif de tracer des limites à la timide libéralisation politique en cours »

Selon Le Temps,  « les ambassadeurs suisse, canadien, norvégien et néo-zélandais sont régulièrement reçus par le pouvoir de Hanoi, «entre quatre yeux», pour examiner des cas d'arrestations arbitraires, de harcèlements judiciaires, de jugements infondés, etc. » Pour débattre des droits de l’homme.  

Le journal suisse se veut optimiste et cite le vice-ministre des Affaires étrangères, rencontré à Hanoi par Ignace Jeannerat : «Une nation peut exister à jamais. Un système politique, lui, ne peut pas être éternel.» Sagesse asiatique.

Louis PETITJEAN

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