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La création du monde polynésien

Publié le 09 novembre 2008 par Argoul

Il était une fois un couple vivant au paradis. Le paradis était bien sûr, à cette époque, une grande île de Polynésie. Si des arbres ne coulaient pas le lait et le miel, c’était tout comme : des fruits mûrissaient toute l’année sur la terre et des poissons passaient sur les côtes. Il suffisait de se pencher. Hiro aimait Hina et Hina aimait Hiro, c’était le plus beau couple de la terre. Heureux, ils vivaient comme des dieux ; l’île du Sans-Souci ne s’appelait pas encore Tahiti.

Mais ils n’étaient pas des dieux, seulement des titans, les ancêtres géants des hommes. Ils engloutissaient la boisson à seau et la nourriture par bâfrées ; Rabelais les aurait bien aimés. Reste qu’il fallait pêcher et chasser pour se nourrir, et puiser l’eau qui ne coulait pas partout. Au mâle la chasse, à la femme l’eau, chacun son rôle.
 
En cherchant la source dans la forêt, Hina rencontre une Anguille Géante. Il était courant, à l’époque, de faire de telles rencontres inopinées. Ce n’était jamais par hasard car ces bêtes étaient évidemment des démons. On ne s’en tirait pas sans ruse.
«  Où vas-tu donc, belle Hina ?
Je remonte à la source, nous cherchons l’eau, désespérément.
Si tu m’embrasse sur la bouche, tu auras de l’eau, c’est la chair de mon corps. »

Hina n’en croit rien et quitte derechef cette laide enjôleuse. « Que va-t-elle me demander en échange, s’inquiète-t-elle ? Je serais bien bête… » Elle poursuit sa quête de la source mais illusion ou inattention, elle ne la trouve plus. « Que faire ? L’anguille ? Cela m’ennuie, mais peut-être pourrais-je la faire parler ? Elle m’en dira un peu plus. » Repassant son chemin, elle retrouve la géante Anguille qui n’avait fait que l’attendre. Elle savait bien qu’elle reviendrait. A-t-elle utilisé sa magie pour égarer Hina sur le chemin de la source ? L’histoire ne le dit pas, mais ce n’est pas improbable. Il fallait que le Destin s’accomplisse.

Passons sur les longues hésitations d’Hina, qui n’était pas femme pour rien lorsqu’il s’agissait de choisir. Mais la bête avait la langue bien pendue et savait les mots qui séduisent. Après tout, dans toutes les cultures, les grenouilles ne s’étaient-elles pas parfois transformées en princes charmants ? Hina pose alors un baiser sur le mufle froid du serpent d’eau. Soudain, elle défaille. Est-ce de répulsion au contact du museau gluant ? Mais non, c’est un sortilège, Hina s’est donnée au démon. Le poisson serpent l’emporte dans son antre, au-delà du bras de mer, sur l’île voisine de Moorea. kahiko-male.1226229338.jpg

Hiro le mari, revenu de la chasse, n’a pas trouvé à la maison sa plantureuse épouse. « Où est-elle donc passée ? A-t-elle perdu du temps à se contempler dans le miroir des eaux ? Une mouche du sommeil l’a-t-elle piquée ? » Tout à ses questions, Hino s’adresse ici ou là. Il questionne les animaux et les plantes. Tout se sait dans la nature sauvage car tout ce qui change est aussitôt remarqué. La nouvelle de l’enlèvement d’Hina rend fou Hino. Il enrage, d’une rage à sa mesure de géant. Eructant des mots grossiers pour augmenter sa fureur, debout, il prend des rocs et, de ses muscles puissants, les projette vers Moorea. Qui n’est pas au mieux de sa raison ne peut viser correctement. Il rate le premier coup, et le rocher creuse brusquement le lagon à ses pieds, en face de Toahotu. La seconde fois, il son rocher va trop loin, il ne sait pas doser sa force. L’île de Huahine, sous les remous du choc, s’écarte de Moorea. Le troisième coup est au but, il fait un trou dans la montagne. On peut voir encore sur Moorea le vaste trou de son sommet.

cocotier-male.1226229354.jpgMais tout cela ne lui rend pas Hina. D’une nage puissante, son casse-tête sur le dos, Hino traverse le lagon pour joindre Moorea où se cache la vilaine bête. L’Anguille géante ne voit pas pourquoi elle lui rendrait sa femme. Au contraire, elle se trouve bien en compagnie, ayant acquis chaleur et conversation. Un corps de serpent a besoin d’une chaleur extérieure pour se sentir bien. Hina, apaisée dès qu’elle a su que l’Anguille n’allait pas l’avaler, s’est faite à la douceur et au moelleux du corps de serpent, aussi lisse que celui d’un éphèbe.

Mais Hino n’est pas patient. A quoi lui servirait son casse-tête si ce n’était justement pour casser des têtes ? D’un coup bien ajusté, il réduit le crâne du monstre à de la bouillie. L’Anguille, magicienne, se métamorphose aussitôt en cocotier, son corps lisse se couvre d’écailles rugueuses, sa cervelle éclatée devient palmes. C’est depuis ce jour, dit-on, que les descendants des géants, les hommes, ont le loisir de répéter la geste d’Hino. Armé de machettes, ils montent à la tête du cocotier pour en boire l’eau et en manger la chair.

Hiro et Hina, enfin réunis, vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants, éparpillés un peu partout dans les îles Polynésiennes.


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LES COMMENTAIRES (1)

Par james
posté le 28 février à 18:31
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