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Le hurleur n'avait qu'une couille...

Publié le 24 novembre 2008 par Antonia Savey

Il y a quelques jours en roulant sur l'autoroute vers St-Etienne, me remémorant machinalement le dossier du client que j'allais rencontrer, j'écoutais distraitement France Info. L'histoire d'un type qui pendant certains affrontements, blessé à l'abdomen, opéré sur place, avait dû malheureusement renoncer à l'un de ses précieux testicules. Le témoignage d'un prêtre mis en lumière quelques 60 ans plus tard faisait la lumière sur un fait jusque là ignoré. De moi en tout cas. Intriguée j'ai tendu l'oreille.

Les affrontements en question se situaient aux alentours de la seconde guerre mondiale. Le blessé en question, surnommé le Hurleur par l'équipe médicale sur place pour son comportement de beuglard insupportable et pleutre, n'était autre qu'Adolf Hitler encore méconnu pour son abjecte trace dans l'Histoire de l'Humanité. J'ai monté le son et tendu les deux précieuses oreilles intactes...
S'il est des personnages fortement ancrés et connotés négativement dans mon imaginaire d'adolescente, dont la perception rédhibitoire s'est prolongée, affirmée et affermie une fois dans l'âge adulte, que j'abhore et pour lequel je ne résisterais pas à la tentation d'afficher que je serais bien allée cracher sur sa tombe au nom de l'humanité et de ses millions de victimes, c'est bien cet odieux sale petit bonhomme brun moustachu avec sa mèche grasse et ses gestes saccadés.

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L'un de mes auteurs préférés m'a même plutôt mise à mal il y a quelques années en nous proposant un roman philosophique, à la limite de la fiction auquel je n'ai pas pu résister, même si plus d'une fois j'ai été tentée de ne pas poursuivre ma lecture (l''auteur lui-même qualifie son oeuvre de livre qui lui a le plus coûté et moi je finissais par en cauchemarder !) et que j'ai évidemment dévoré comme tous ceux qu'il nous offre : Adolf H., la part de l'autre.

Mise à mal, parce que jusque là, il m'avait suffit de honnir ce dictateur meurtrier, un barbare qui met le monde à feu et à sang, une honte pour l’idée que l’humanité a d’elle-même, et que, à la lecture de ce roman, j'ai souffert de me sentir partagée entre la compréhension et l'empathie pour cet autre qu'il aurait pu devenir si... s'il avait peut être abordé dans un autre état d'esprit sa propre croisée des chemins. Le roman présente deux destins, celui du vrai Hitler et celui de l’autre, le virtuel, le peintre Adolf H. qu’il aurait pu devenir, si le jury de l'Ecole des Beaux Arts de Vienne ne l'avait pas refusé. On se prend d'une certaine sympathie inconcevable pour un homme différent, vulnérable, torturé de doutes et très banal en somme. Et on arrive au bout du parcours, au rendez vous de l'Histoire, soulagé que la fiction somme toute très réaliste s'achève enfin. Conscient avec une légère amertume aux lèvres que le pire ennemi de l'Homme, c'est l'homme. Parce que Hitler n’est pas à l’extérieur de nous, il est à l’intérieur. Il est l’un de nos possibles.

Donc... en écoutant ce petit bout de chien écrasé sur cette très sérieuse radio, qui m'apprenait que ce monstre amputé d'une couille, sévissait hurlant sur le monde avec cette autre pauvre malheureuse couille orpheline de sa siamoise, avec toute la symbolique machiste que cela peut revêtir, j'ai eu une réaction très puérile et très féministe, à la limite dépassée du sexisme.
Piètre revanche que voudront bien me pardonner le sexe masculin en général que j'aime in-fi-ni-ment et tous les hommes qui me liront et tous ceux qui me cotoient dans la vraie vie.

"Bien fait, sale enfoiré ! ", que je me suis dit à titre posthume. 

PS : En italique figurent les citations extraites du site d'EE Schmitt


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