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Lettre d’adieu d’un financier

Publié le 01 décembre 2008 par Aurélien

Quand un financier pète les plomb, ca donne ça :

Andrew Lahde, de Santa Monica, Californie, est le gestionnaire de « hedge funds » qui a fait un profit de 870 % l’année dernière en pariant sur un effondrement des « subprimes ». Il vient de fermer son fonds de placement et a rédigé une lettre aux investisseurs.

Aujourd’hui je n’écris pas pour jubiler. Eu égard aux souffrances endurées en ce moment par presque tous, ce serait totalement déplacé de ma part. Je n’écris pas non plus pour faire encore quelques prédictions, puisque la plupart de mes prévisions se sont réalisées ou sont en cours de l’être. En fait, je vous écris pour vous dire adieu.

Récemment, en première page de la section C du Wall Street Journal, un gestionnaire de hedge fund qui était lui aussi en train de fermer boutique (un fonds de 300 millions de dollars) fut cité, « ce que j’ai appris avec les hedge funds, c’est que je les déteste ». Je souscris totalement à cette déclaration. Je l’ai fait pour l’argent. Les fruits pendants, c’est-à-dire ces idiots dont les parents ont payé la prépa, Yale et le MBA d’Harvard, étaient à ramasser. Ces gens qui étaient la plupart du temps indignes de l’éducation qu’ils ont (supposément) reçue se sont élevés jusqu’aux sommets de firmes comme AIG, Bear Stearns et Lehman Brothers et à tous les niveaux du gouvernement. Toutes ces choses qui soutiennent cette aristocratie n’ont abouti qu’à rendre plus facile pour moi de trouver des gens assez bêtes pour être de l’autre côté de mes transactions. Que Dieu bénisse l’Amérique

Il a beaucoup trop de gens à remercier sincèrement pour ma réussite. De plus, je ne tiens pas à ressembler à un acteur de Hollywood en train de recevoir une récompense. L’argent gagné constitue une récompense suffisante. De plus, tous ceux à qui je dois des remerciements se reconnaîtront.

J’ai décidé de ne plus gérer de l’argent pour d’autres, qu’ils soient individus ou institutions. La gestion de ma propre fortune me suffit. Certains, qui pensent pouvoir estimer avec une certaine précision le montant de ma fortune personnelle, seraient peut-être surpris de me voir partir avec un trésor de guerre aussi modeste. Ca n’a pas d’importance ; ce que j’ai me suffit. De plus, je cède ma place à ceux qui tentent d’amasser des sommes à neuf, dix ou même onze chiffres. Pendant ce temps, ils mèneront des vies minables. Avec leurs réunions qui s’enchainent les unes derrière des autres, leur agenda rempli pour les trois mois à venir, ils attendront avec impatience leurs deux semaines de vacances en janvier pendant lesquelles ils resteront collés à leur Blackberry ou d’autres appareils du même genre. Pourquoi faire ? De toute façon, dans cinquante ans, personne ne se souviendra d’eux. Steve Balmer, Steven Cohen, et Larry Ellison seront tous oubliés. Je ne comprends pas ce désir de postérité. Pratiquement tout le monde sera oublié. Abandonnez cette idée de laisser une marque. Débarrassez-vous de votre Blackberry et profitez de la vie.

Alors voilà. Avec tout le respect que je vous dois, je tire ma révérence. Ne vous attendez pas à recevoir des réponses à vos courriers ou messages, que ce soit dans les jours qui viennent ou à l’avenir. Andy Springer et sa société prendront en charge la liquidation du fonds. Et ne vous en faites pas pour les employés, ils ont toujours été salariés par la société de M. Springer et un seul (qui a été grassement indemnisé) perdra son emploi.

Je ne suis pas intéressé par des propositions d’affaires quelles qu’elles soient. En ce moment, je n’ai pas d’opinion tranchée sur les marchés, sinon que la situation continuera à se détériorer pendant quelques temps, probablement des années. Je suis heureux ainsi, assis au bord du chemin à attendre. Après tout, c’est en étant assis à attendre que j’ai fait fortune avec le débâcle des subprimes. A présent, j’aurai le temps de me refaire une santé abimée par le stress accumulé au cours de ces deux dernières années, et même au cours de toute ma vie - où j’ai été obligé de me battre pour une place à l’université, pour un emploi et des actifs à gérer, contre tous ceux qui avaient démarré dans la vie (avec des parents fortunés) avec une longueur d’avance sur moi. Que la méritocratie fasse partie d’une nouvelle forme de gouvernement dont nous avons besoin.

En ce qui concerne le gouvernement, j’aurais une modeste proposition à faire. D’abord, je voudrais souligner les failles les plus évidentes. Des propositions de lois ont sans cesse été présentées au Congrès ces huit dernières années. Des lois qui auraient permis de contrôler les pratiques de ces institutions dont la plupart aujourd’hui ont disparu. Ces institutions ont régulièrement rempli les coffres-forts de tous les partis politiques en échange d’un rejet de ces projets de lois qui étaient destinées à protéger le citoyen ordinaire. C’est un scandale et pourtant personne n’a l’air de le remarquer ou de s’en émouvoir. Depuis la mort de Thomas Jefferson et d’Adam Smith, je dirais qu’il y a une pénurie de véritables philosophes dans ce pays, du moins de ceux qui se consacrent à meilleure gouvernance. Le capitalisme a fonctionné pendant deux cents ans, mais les temps changent, et les systèmes se corrompent. George Soros, à la tête d’une fortune vertigineuse, a déclaré qu’il aurait aimé laisser comme souvenir celui d’un philosophe. Je lui suggère de commencer par le finançant un forum qui réunirait de grands esprits pour réfléchir à un nouveau système de gouvernement qui représenterait réellement les intérêts des citoyens ordinaires, tout en offrant des salaires suffisamment élevés pour attirer les cerveaux les plus brillants aux postes gouvernementaux et qui n’auraient ainsi pas de motifs à céder à la corruption pour améliorer leur niveau de vie. Un tel forum pourrait ressembler à celui qui servi pour créer le système d’exploitation (pour ordinateurs) Linux, qui défie le quasi monopole de Microsoft. Je crois qu’il existe une solution, mais en attendant, le système est à l’évidence brisé.

Pour finir, et pour profiter encore un peu de l’intérêt que je suscite, j’aimerais attirer votre attention sur une source alternative d’alimentation et d’énergie. Vous ne la verrez pas dans les publicités télévisées de British Petroleum qui vantent les mérites de leur « solutions durables », ni dans les publicités d’ADM. Mais le chanvre a été employé depuis au moins 5.000 ans dans l’habillement et l’alimentation, et dans pratiquement tout ce que l’industrie pétrolière produit. Le chanvre n’est pas la marijuana et vice versa. Le chanvre est la plante male et pousse comme de la mauvaise herbe, d’où le terme employé en argot. Le drapeau américain à l’origine était tissé en fibre de chanvre et notre constitution était imprimée sur du papier à base de chanvre. Le gouvernement US s’en servait encore pendant la deuxième guerre mondiale, puis l’a interdit après la victoire. A une époque où tout le monde parle sans cesse d’autosuffisance énergétique, pourquoi la culture de cette plante est-elle interdite dans ce pays ? Ah, à cause de la femelle. La plante femelle maléfique - la marijuana. Ca fait planer, ca fait rire, et pas de gueule de bois le lendemain. Contrairement à l’alcool, elle ne provoque pas de bagarres dans les bars et aucune épouse ne se fait tabasser. Alors pourquoi cette plante inoffensive est-elle interdite ? Parce que c’est un produit d’entrée bas de gamme dans le monde des drogues ? Non, dans ce cas ce serait plutôt l’alcool, dont on fait massivement la publicité partout. Je suis arrivé à la conclusion que si cette plante est illégale dans ce pays, c’est parce que Corporate America, qui contrôle le Congrès, préfère nous vendre du Paxil, du Zoloft, du Xanax et d’autres drogues addictives, plutôt que de nous laisser faire pousser une plante à la maison et leur faire perdre ainsi quelques profits. Cette politique est absurde. Elle a certainement contribué à accentuer notre dépendance énérgétique. Les autres pays rigolent littéralement devant notre stupidité, surtout le Canada, et plusieurs pays européens (est et ouest). Mais vous ne le saurez pas en consultant les média US parce que ces derniers ont tendance à ne pas trop s’étendre dans ces cas là. Alors, je vous en prie, arrêtons toutes ces paroles en l’air et commençons à réfléchir sur comment devenir réellement autosuffisants.

Sur ce, je vous dis Adieu et bonne chance.

Cordialement,

Andrew Lahde

Texte original ici

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