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Le nouveau marché de la rétention est paru au JOUE

Publié le 18 décembre 2008 par Combatsdh

Groso modo, le nouveau marché reprend ce que le ministère avait déjà concédé dans divers courriers adressés aux associations avant l'annulation : possibilité des groupements par lots, possibilité de sous-traitrance, réévaluation des critères de pondération sur la compétence juridique (conformément à l'ordonnance du TA du 30 octobre), échanges d'information entre les personnes morales prestataires sur les situations individuelles, confirmation "explicite" (?) de la possibilité de libre expression publique et collective (mais avec quelles garanties à terme?).

Néanmoins compte tenu de la forme juridique de marché public, aucune défense nationale n'est possible (allotissement, mise en concurrence des prestataires, soumission au pouvoir de contrôle et de direction de l'Etat-client).

Nous publions ici les différents documents relatifs au nouveau marché

    Voici l'avis de marché 2008/S 246-327935 paru au Journal officiel de l'Union européenne-marché public du 18 décembre 2008 (F-Paris: Services d'appui aux pouvoirs publics ou ici )
    Le même avis d'appel public à la concurrence est ensuite paru ce 19/12/2008 au Bulletin officiel des annonces de marchés publics (BOAMP) :Prestations d'information des étrangers maintenus dans les centres de rétention administrative à Paris (Voir l'annonce)
rc.1229699630.doc
    Dans le cahier des clauses techniques particulière (CTTP)
cctp.1229699644.doc Paris, vendredi 19 decembre 2008 COMMUNIQUE DE PRESSE
Le ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire a diffusé, aux services du Journal officiel de l'Union européenne et du Bulletin officiel d'annonces de marchés publics, un appel d'offres permettant de choisir les personnes qui assureront l'information, en vue de l'exercice de leurs droits, des étrangers maintenus dans les centres de rétention administrative. Ce nouvel appel d'offres présente trois caractéristiques :
  • il permet d'organiser, en toute transparence, le passage d'une situation de monopole à une situation de pluralisme ;
  • il tient le plus grand compte de l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal administratif de Paris le 30 octobre dernier, en augmentant le niveau d'exigence pesant sur les équipes intervenant dans les CRA, en termes de compétences juridiques et de maîtrise confirmée des règles spécifiques du droit des étrangers ;
  • il répond aux vœux exprimés par plusieurs associations de défense des droits des étrangers : à ce titre, il permet notamment aux personnes morales qui le souhaiteraient de s'organiser pour présenter une offre conjointe ou pour bénéficier, au sein d'un CRA, du concours d'une ou plusieurs autres personnes morales ; il précise que les différentes personnes morales présentes dans les CRA pourront échanger des informations afin d'assurer le suivi de dossiers individuels ; il confirme également, de manière explicite, que ces personnes morales pourront exprimer publiquement et collectivement des opinions, des critiques et des propositions dans leurs publications et communications.
Les personnes morales qui le souhaitent peuvent déposer une offre avant le 10 février à 12 heures.
    Dès publication de l'avis au BOAMP ce matin, nous avons demandé les documents de consultation. Ils nous ont été immédiatement communiqué par les services du ministère.
      Dans le règlement de consultation on notera qu'en effet le ministère a considérablement modifié les critères de pondération (c'est-à-dire d'appréciation de la valeur technique et économique de l'offre). Le critère de compétence juridique passe de moins de 10% (critère de sous-pondération) à 40% de l'ensemble de l'offre. A l'inverse, le prix qui représentait 40% des critères d'attribution du marché annulé est réduit à 15% des critères de pondération. Le ministère aurait-il retenu la leçon de ce qu'il a qualifié dans un communiqué du 31 octobre un motif d'annulation "de pure forme"?
rc.1229699630.doc
Le jugement des offres sera effectué dans les conditions prévues aux articles 52 et 53 du code des marchés publics. Conformément à l'article 53 (section I à III) du code des marchés publics, l'offre retenue sera l'offre économiquement la plus avantageuse, appréciée en fonction des critères énumérés ci-dessous avec leur pondération :- Compétences juridiques de l'équipe, appréciées au regard du mémoire technique défini à l'article 8.2 : 40 %* Maîtrise confirmée des règles spécifiques du droit des étrangers pour tout ou partie des intervenants. Cette maîtrise s'apprécie notamment au regard des diplômes des intervenants, ou de leur expérience juridique, ou de la formation que la personne morale qui fait une offre s'est engagée à leur fournir, ou de la capacité de la personne morale à s'appuyer sur des assistants juridiques. En toute hypothèse, pour chaque centre, la personne morale devra démontrer sa capacité à mobiliser au moins un intervenant justifiant du niveau minimum de connaissances juridiques correspondant à une licence en droit ou à un diplôme équivalent.- Compréhension des enjeux et engagements de service, appréciés au regard du mémoire technique défini à l'article 8.2 : 25 %* Exposé de la vision que le candidat a de la prestation à réaliser, des solutions qu'il peut mettre en œuvre et de la pertinence de son analyse ;
* Détail de ses moyens humains affectés au marché (existence de relais ou de délégation régionales, ratio personnels/nombre de places par CRA) ;
* Détail de ses moyens techniques affectés au marché, comme par exemple la mise à disposition de véhicules, de matériel bureautique. Couverture de la zone géographique constituant le lot, d'une manière homogène en moyens et en personnels ;
* Disponibilité et aptitude à répondre à l'urgence ;
* Garantie de continuité du service.
- Autres compétences de l'équipe, appréciées au regard du mémoire technique défini à l'article 8.2 : 20 %* Expérience dans le domaine humanitaire tant pour les responsables, que pour les salariés et les bénévoles.
* Garantie d'une pratique suffisante au moins des langues
prévues par l'arrêté du 2 mai 2006 pris en application de l'article L553-5 du CESEDA, JO du 06 mai 2006.
- Prix de la prestation, apprécié au regard de sa décomposition: 15 % La décomposition pourra comprendre notamment : rémunération des coordinateurs, des intervenants, remboursement des frais des personnels bénévoles, coût de la formation, rémunération des assistants juridiques, frais de siège, frais de matériel et de fonctionnement, frais de documentation, frais de transport, frais relatif aux permanences téléphoniques".
    Rappelons que le marché d'août 2008 annulé en octobre 2008 prévoyait comme CRITERES D'ATTRIBUTION DU MARCHE :
"L'offre économiquement la plus avantageuse sera appréciée en fonction des critères énoncés ci-dessous avec leur pondération :
Qualité de l'équipe : 15 %
*Formation de base avec un minimum de connaissances juridiques.
* Aptitude à répondre à l'urgence.
* Expérience dans le domaine juridique et humanitaire tant pour les responsables, que pour les salariés et les bénévoles.
* Accessoirement un éventail d'intervenants maîtrisant les langues les plus utilisées par l'ensemble des retenus, maîtrise de l'anglais obligatoire.
 Compréhension des enjeux : 20%
* Remise d'un mémoire technique où le candidat exposera la vision qu'il a de la prestation à réaliser, les solutions qu'il peut mettre en œuvre et la pertinence de son analyse
 Couverture du besoin : 10%
* Détail de ses moyens techniques et humains comme par exemple la mise à disposition de véhicules, de matériel bureautique...
* Ratio personnels/Nombre de places par C.R.A.
* Couverture de la zone géographique constituant le lot, d'une manière homogène en moyens et en personnels.
 Engagement de service : 15%
* Disponibilité et proximité.
* Existence de relais ou de délégations régionales.
* Un interlocuteur unique par lot.
* Gestion des remplacements.
 Prix de la prestation : 40 %"
Valeur technique : 60 % (la valeur technique sera appréciée à partir du mémoire technique fourni par le candidat) :
La note technique sera calculée sur l'analyse des sous-critères pondérés suivants :
      Dans le cahier des clauses techniques particulière (CTTP) il est précisé à propos de la confidentialité qui avait suscité la polémique.

(A noter que La réunion semestrielle entre personne morales prestataires se fait néanmoins sous l'égide du ministère)

"3 - PRESTATIONS DEMANDEES :
Le titulaire a pour mission, en vue de permettre l'exercice effectif de leurs droits par les étrangers, d'assurer dans chaque centre, des prestations d'information par l'organisation de permanences et la mise à disposition d'une documentation. La prestation d'information implique la tenue de permanences dont le candidat fixera dans son offre et pour chaque centre, l'amplitude horaire journalière et hebdomadaire proposée. Pour assurer une égalité de traitement dans les centres, un document de base de 2 pages maximum -recto, verso - au format 21 X 29,7, traduit dans les principales langues utilisées dans les centres sera remis aux titulaires par l'administration. Outre ce document, le titulaire du marché peut diffuser des documents complémentaires. Les actions conduites à ce titre devront inclure les prestations suivantes en vue de permettre l'exercice effectif des droits des étrangers : Tenue de permanences dans les centres de rétention, dont les horaires précis seront fixés avec le chef de centre et figureront au règlement intérieur du centre ;
 Diffusion et commentaire des documents d'information ;
 Tenue de permanences téléphoniques ;
 Capacité de répondre, le cas échéant, sur sollicitation exceptionnelle du chef de centre, à une demande urgente d'information présentée par un retenu en mobilisant un membre de la personne morale, particulièrement le week-end, les jours fériés et les périodes dites " de ponts " ;
 Logistique et coordination de l'activité des salariés et bénévoles de la personne morale.
 Désignation d'un interlocuteur unique par centre

L'acceptation des termes du marché implique pour le titulaire l'obligation de :
Rendre compte à l'Administration, représentée localement par le préfet, de la réalisation des prestations, indépendamment des rapports et comptes-rendus d'exécution prévus au CCAP, selon une périodicité trimestrielle. Il est précisé qu'il s'agit de documents contractuels établis dans le cadre de prestations de service rémunérées comme telles par l'Etat. Ainsi, ne peuvent-il être communiqués, en tout ou partie, dans le cadre des rapports et communications propres à la personne morale;
S'engager, d'une part, à réaliser les prestations décrites ci-dessus et à mettre en œuvre, à cette fin, tous les moyens nécessaires en qualité de prestataire de service, d'autre part, à faire preuve de discrétion et à ne pas divulguer en sa qualité de prestataire de l'Etat, des faits ou des informations sur les situations individuelles qu'il aura à connaître.
Il sera fait usage de l'article 6 du Cahier des Clauses Administratives Générales - Fournitures courantes et de services (CCAG-FCS) en cas de non respect de la clause de discrétion, ce qui implique la rupture du marché aux torts du titulaire.
Toutefois ces dispositions n'empêchent nullement le titulaire du marché avec l'accord express de l'intéressé :
- d'avoir des communications avec les proches d'un étranger retenu afin d'assurer dans les meilleurs conditions sa mission ;
- de rendre publiques des informations sur la situation individuelle d'un étranger retenu ;
- d'échanger des informations avec les autres personnes morales responsables de la même mission dans d'autres centres de rétention administrative notamment pour assurer un suivi de certains dossiers individuels et/ou une coordination ;
Par ailleurs, ces dispositions n'empêchent nullement le titulaire du marché d'exprimer des opinions, critiques et propositions d'ordre général dans ses publications et ses communications ou dans des publications ou des communications communes avec d'autres personnes morales responsables de la même mission dans d'autres centres de rétention.Pour sa part, l'Administration s'engage, sous réserve de l'inscription des crédits en loi de finances, à financer la réalisation de ces prestations.Chaque personne morale désignée pour accomplir, dans un centre de rétention administrative, les prestations prévues à l'article R553-14 du CESEDA pourra participer à une réunion organisée chaque semestre, à l'initiative de l'administration, ayant vocation à rassembler toutes ces personnes morales".
    voir aussi le CCAP et ses annexes ccap.1229701966.doc
      On notera d'abord que désormais pour chaque lot est fixé un montant prévisionnel annuel HT alors qu'auparavant il était fixé une fourchette. Ce changement semble gêner certains candidats potentiels - d'autant plus que le niveau d'exigence en matière de compétences juridiques, particulièrement en droit des étrangers (au plus grand bonheur de mes étudiants en droit de l'homme) risque de renchérir le coût de la prestation.
      La stipulation sur l'évolution de la réglementation semble avoir été ajoutée pour prévenir une éventuelle annulation partielle du décret d'août 2008 par le Conseil d'Etat d'ici quelques mois notamment l'exigence à l'article R. 553-14 du CESEDA qu'une seule personne morale puisse être présente par centre de rétention alors que le marché (et le code des marchés) prévoit la possibilité de groupements pour chaque lots et que dans des décisions concernant la zone d'attente le Conseil d'Etat a annulé plusieurs fois des refus d'habilitation opposé par le ministère à des associations sous prétexte qu'elles étaient déjà trop nombreuses à être habilitées.
Le marché est élaboré sur la base de la réglementation en vigueur au jour du lancement de la procédure de passation

Si à la suite d'une modification de la réglementation en vigueur, d'une décision administrative ou des autorités publiques, ou juridictionnelle, la modification des prestations du titulaire, affectant même de façon mineure l'exécution du marché, que ce soit sur un plan technique et/ou financier, s'avérait nécessaire, celui-ci s'engage à poursuivre l'exécution du marché.

Un avenant audit marché pourra être passé afin de prendre en compte l'évolution de la réglementation."

      Par ailleurs, contrairement au marché annulé, le groupement et la sous-traitance sont désormais expressément prévus et organisés

"7 -3 : Conditions d'exécution des prestations :(...)

Dans l'hypothèse où le titulaire aurait recours à une ou plusieurs personnes physiques mises à disposition par un tiers, il en informe l'administration en lui fournissant une liste nominative des personnes concernées. Le titulaire est responsable de celles-ci dans les conditions décrites à l'alinéa ci-dessus."

"En cas de sous-traitance, l'interlocuteur du pouvoir adjudicateur reste le titulaire désigné dans le présent marché. Si la demande de sous-traitance n'est pas intervenue au moment du dépôt de l'offre, le titulaire, préalablement à toute mise en place d'une sous-traitance, devra saisir le pouvoir adjudicateur par courrier des prestations sous traitées, du sous-traitant proposé et de la durée probable de la sous-traitance dans les conditions prévues par l'article 114 du Code des marchés publics. Ce n'est qu'après acceptation du sous-traitant et de l'agrément des conditions de paiement par le pouvoir adjudicateur que le titulaire pourra sous-traiter l'exécution de certaines parties de son marché"
      On retrouve une stipulation imposant une obligation de discrétion sur les documents portés à la connaissance des prestataires - sous réserve de ce qui est nécessaire pour assurer la défense d'un étranger
Conformément à l'article 6 du CCAG-FCS, " le titulaire qui, à l'occasion de l'exécution du marché, a reçu communication à titre secret ou confidentiel de renseignements, documents ou objets quelconques, est tenu de maintenir secrète ou confidentielle cette communication. Ces renseignements, documents ou objets ne peuvent, sans autorisation de la personne responsable du marché, être communiqués à d'autres personnes que celles qui ont qualité pour en connaître. Il en est pareillement de tout renseignement de même nature parvenu à la connaissance du titulaire à l'occasion de la livraison de la fourniture ou de l'exécution du service ".Toutefois ces dispositions n'empêchent nullement le titulaire du marché avec l'accord exprès de l'intéressé :- d'avoir des communications avec les proches d'un étranger retenu afin d'assurer dans les meilleurs conditions sa mission ;
- de rendre publiques des informations sur la situation individuelle d'un étranger retenu ;
- d'échanger des informations avec les autres personnes morales responsables de la même mission dans d'autres centres de rétention administrative notamment pour assurer un suivi de certains dossiers individuels et/ou une coordination ;
Par ailleurs, ces dispositions n'empêchent nullement le titulaire du marché d'exprimer des opinions, critiques et propositions d'ordre général dans ses publications et ses communications ou dans des publications ou des communications communes avec d'autres personnes morales responsables de la même mission dans d'autres centres de rétention".
      A noter qu'une résiliation du contrat est possible, en cours d'exécution, "à la suite de dégradations rendant impossible l'hébergement des étrangers dans chacun des centres de rétention administrative" - comme par exemple un incendie comme celui de Vincennes ou de Nantes - ou en cas de travail... clandestin (ça a déjà eu lieu dans des marchés de construction de CRA).
" 15 - RESILIATION L'administration peut résilier le marché selon les dispositions prévues au chapitre V du C.C.A.G./ F.C.S. ainsi que selon les indications du présent marché.
Enfin, l'administration peut résilier le marché avec indemnité, en cours d'exécution si,à la suite de dégradations rendant impossible l'hébergement des étrangers dans chacun des centres de rétention administrative composant le lot, le titulaire du marché se trouvait dans l'incapacité d'assurer la totalité de ses missions. Dans ce cas, le montant de l'indemnité versée par l'administration au titulaire sera égal à 4% du montant des prestations annuelles restant à exécuter. Cette décision est notifiée au titulaire par lettre recommandée avec accusé réception ou par porteur contre signature d'un récépissé de remise en mains propres.
La résiliation prend effet à la date fixée dans la décision ou, à défaut d'une autre date, à la date de notification de cette décision.

Il est précisé qu'après signature du marché, en cas d'inexactitude des documents et renseignements demandés à l'appui des candidatures et de ceux demandés à l'attributaire, ou de refus de produire les pièces prévues aux articles D 8222-5 ou D 8222-7 et 8222-8 du Code du travail, il sera fait application aux torts du titulaire, des conditions de résiliation prévues par le marché."

annexe-1-au-ccap.1229702364.xls
annexe-2-au-ccap.1229701985.xls

Au bilan, les services du ministère semblent avoir pris en compte, au delà du motif d'annulation (sous-pondération des compétences juridiques) la totalité des moyens juridiques soulevés par les requérants dans le cadre du référé précontractuel. Ce qui démontre d'une part la pertinence de ceux-ci et d'autre part la qualité de la requête de l'avocate qui a visé juste et enfin la mauvaise foi de la défense du ministère.


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