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Vive Sainte Cécile !

Publié le 06 février 2009 par Philippe Delaide

Concert mardi 20 janvier à la salle Pleyel. Un programme dédié à Sainte Cécile, patronne des musiciens, et interprété par les Musiciens du Louvre-Grenoble, sous la direction avisée de Marc Minkowski.

Ce dernier a concocté pour l'occasion un programme qui nous permet d'appréhender un siècle de musique avec comme fil rouge, un hommage à Sainte Cécile. L'ensemble enchaîne trois œuvres de respectivement Henry Purcell (Hail ! Bright Cecilia), Georg Friedrich Haendel (Ode for Saint Cecilia's Day) et Joseph Haydn (Missa Cellensis in honorem Beatissimae Virginis Mariae (Cäcilienmesse)).

Des contraintes personnelles m'ont empêché, après le deuxième entracte, de découvrir la messe de Joseph Haydn. Je suis donc parti de ce concert, marqué par le charme et le raffinement de la musique de Purcell tout comme l'éclat et la vitalité de celle de Haendel.

Minkowski 3
Le choix très judicieux de Marc Minkowski met particulièrement bien en évidence la fausse filiation entre les deux musiciens et ce autour d'un même genre musical, une ode à Sainte Cécile, exercice typiquement britannique. Je parle de fausse filiation parce que si, en apparence, les formes sont presque similaires (à l'exception notable de la plus grande ampleur et de la plus grande fusion à la masse orchestrale assignée à la basse continue à partir du début du XVIIIème siècle), la rhétorique n'est plus la même. L'ode de Purcell est certes déclamatoire, guidée par un style brillant, mais elle reste tout même encore figée dans une certaine "sacralité" alors que Haendel fait véritablement éclater cette contrainte en conférant à son ode un caractère théâtral et profane.

C'est justement l'ambiguïté de ces pièces qui fait leur intérêt. Ce sont à la base des hommages réalisés sous commande, passée par des confréries de musiciens. Elles ont l'apparence formelle d'une oeuvre sacrée mais sont bien des odes profanes.

L'ode de Purcell révèle un équilibre subtil entre la nécessaire ampleur, l'exaltation porté à Sainte Cecile et le raffinement, l'élégance typique de l'écriture musicale du compositeur anglais.  Les chœurs sont aériens, nous transportent d'emblée dans le monde poétique et coloré de  "The Fairy Queen". Les parties solos demandent aux différents chanteurs une virtuosité impressionnante, tant Purcell redouble d'ingéniosité pour enchaîner les modulations.  Cette ode est d'une haute tenue du début à la fin. Sa tonalité est sous le signe d'une forme de joie spontanée, d'insouciance, avec un caractère presque pastoral. La lumière et les couleurs sont bien présentes avec de beaux dégradés et des tons pastels.

Celle de Haendel tranche plus nettement par un caractère presque italien. La tension est plus forte, sans faille, l'ampleur sonore est plus flagrante (alors que les formations orchestrale et vocale sont très comparable à celle de l'ode composée par Purcell).  Haendel opte pour plus d'expressivité, un élan plus théâtralisé. Cette fois la lumière comme les couleurs, restituées notamment par les voix sont plus tranchantes, nettes, saturées. Haendel confirme ici sa maîtrise de la composition pour les chœurs. Frisson garanti.

Marc Minkowski confirme la musicalité et la beauté sonore qu'il a pu imprimer à son ensemble. Je trouve qu'il est l'un des rares chefs dirigeants des ensembles sur instruments anciens à trouver un équilibre aussi parfait entre la précision, la justesse d'interprétation, la plasticité, la tension de la ligne.  La plénitude sonore, surtout avec l'acoustique sidérante de Pleyel, est absolue. On est littéralement baigné dans des sons aux couleurs chatoyantes. Le Chœur des Musiciens du Louvre, dirigé par Nicholas Jenkins, est d'une tenue parfaite. 

Je regrette vraiment d'avoir manqué la contribution de Joseph Haydn dans cette trilogie.

Lien direct vers la note de programme tirée du site de la Salle Pleyel (format pdf).

Superbe concert.


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