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Voyage en Gaspésie : jour 2

Publié le 11 février 2009 par Lemoutondissident

(merci à ceux qui ont patienté)

Nous revenons au Parc du Bic le matin, dans un jour limpide et chaud. Le long des plages livides, saignant de l’eau d’excoriations minérales, courent et s’envolent de grands échassiers blancs. Nous les voyons s’enfuir à notre approche maladroite dans les sables. Semblables à deux adolescents, nous explorons ce coin sauvage que la marée basse nous offre : l’île des amours, que hantent nous l’espérons les animaux de légendes amérindiennes. Mais nous sommes encore bien près de la ville pour sentir quelque chose.   En revenant vers la voiture, nous écoutons. Le souffle de l’autre, le croustillement des feuilles sèches sous les pas : nous rengainons nos provisions d’espace pour le reste de la journée.

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   Car il s’agit aujourd’hui d’en profiter pour aller voir quelques personnes – des collègues à moi, Mike, Daniel, biologistes marins, cavaleurs insensés du Saint-Laurent, de Baffin et de la banquise arctique – une dernière fois avant de quitter le Québec. Nous discutons modèles, poissons, fin des espèces. Je présente Mike à Marie, le prototype du baroudeur, plus costaud qu’un requin-tigre et toujours en mer sauf à l’heure du resto, car il a l’appétit du vent. Au soir, nous écoutons un feu craquer dans le jardin d’une maison montée sur rail, tout près du fleuve et des montagnes, juste à côté de rien sinon le silence jappant des coyotes.  Mike et Daniel, notre hôte, nous content leurs exploits. La chute d’un avion de repérage dans le Saint Laurent glacé ; la cuisson attrayante d’un béluga à la sauce inuit, dans un village perdu au fin fond du Nunavut (la peau s’effrite sous la dent comme une crème brûlée, semble-t-il). Par la femme de Daniel nous en apprenons beaucoup sur le chatouillement des esturgeons, qui est un amusant moyen de les faire dégueuler pour savoir ce qu'ils bouffent. Les stages étudiants sont pleins de surprises, au Québec.

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Arrivée au premier motel, de la même race que celui-ci. La lampe blafarde est bien là, de même que les toits plats, l’aspect tôle ondulée et la télé géante. Sans oublier la Bible des Gédéons, dûment placée sur la table de nuit en formica. Il ne manque que le néon déglingué qui clignote comme les yeux de Stephen Hawkins en pleine théorie, dans un chuintement électronique, et, rôdant en dessous, l’ombre tordue, vilaine, repoussante, de l'assassin local.


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