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Génériq Festival - 12 au 22 février 2009

Publié le 22 février 2009 par Oreilles
Je vous propose ici un coup d'oeil, forcément incomplet, sur le jeune festival Génériq, dont les tumultes ont agité le Grand Est ces dix derniers jours. Fruit de la collaboration entre la Vapeur de Dijon, le Cylindre de Besançon (Larnod), la Poudrière de Belfort, le Noumatrouff de Mulhouse et les Eurockéennes, Génériq est bien plus qu'une version hivernale (comme le propose la Route du Rock de Saint-Malo) du grand festival belfortain. Débarassé des impératifs de rentabilité (le festival offre pléthore de concerts gratuits ou peu onéreux) et d'entertainment estival de son cousin, le festival Génériq apparaît comme une expérience artistique pure et pointue, définie par une programmation absolument pertinente, motivée par la volonté de découverte et la recherche de l'inédit, de l'inouï, voire de l'incongru. Pendant dix jours donc, les artistes qui se partagent la vertigineuse affiche voyagent le long de l'axe Dijon-Mulhouse, et sont ainsi visibles par le plus grand nombre, dans des salles de concert, bars, bibliothèques, bureaux, théâtres, ou appartements.
Pour ma part, j'ai dû renoncer à me déplacer de ville en ville, comme je l'avais fait l'an passé. Pas grave, il y a tant de manières de vivre le festival ; chacune est appréciable. Retour en terre-mère belfortaine donc, plus fort que tout étant l'appel de The Walkmen, tête d'affiche étrangement ignorée du public, qui a la malchance de jouer, ce vendredi 13 février, entre des formations au son crade : Scott H.Biram, guitariste country-blues dont la voix sent la clope, le whisky, la poussière, et... l'import direct de South By Southwest, et The Bronx, groupe post-hardcore qui achève d'électriser le public de cette première soirée. The Walkmen ont certes à leur tête un chanteur fier et pédant, à la voix parfois un peu trop geignarde, mais ne crachons pas : le concert reste tout à fait bon, les titres choisis pour le set fonctionnent très bien (l'excellent "On The Water" en premier).
Les autres noms attendus confirment tout le bien que l'on pense d'eux. Samedi 14 février, l'électro - folk - hip-hop - lo-fi de Gablé amuse la galerie (enfin, la Poudrière de Belfort), et révèle le groupe idéal des temps de crise : cheap et absurde. Ensuite, Dan Boeckner (de Wolf Parade) et son épouse (au goût vestimentaire toujours aussi douteux) jouent les titres du nouvel album de Handsome Furs, qui s'annonce un peu plus intense que le bon mais anecdotique Plague Park. Elle est au machines, et il est à la guitare, et, en dehors de toute mode, ils dénotent une certaine attitude rock'n'roll, tendue et sexy. Yuksek, à qui 2009 appartient déjà, apporte une mauvaise nouvelle, cachée sous un live efficace et des lights shows de grands moyens : il ne sortira pas l'électro française de l'axe grand spectacle et basses compressées Daft PunkVitalic. Quant à Elysian Fields, le couple exerce toujours autant de magnétisme sensuel sur leur public.
Sinon, Génériq met un point d'honneur à jouer local. On aura vu le strasbourgeois Lauter interpréter seul son folk électrique et sinueux, sans aucun membre du collectif Herzfeld dont il fait partie (et qu'il n'oublie pas de mentionner). Ce changement de formation est à l'image de ses chansons passionnantes, aux contours changeants et imprévisibles. Peu après, The Feeling Of Love, de Metz, ont encore prouvé à quel point leur punk bruitiste, hypnotique, ténébreux et radical est impressionnant. L'héroïsme douteux et maladroit (inspiré par Arcade Fire probablement) des rémois de The Bewitched Hands On The Top Of Our Heads déroute au premier abord, mais ces chansons aux mélodies twee and love, clamées avec tant d'amour et de passion, comme l'aurait fait la troupe d'I'm From Barcelona, se révèlent tout à fait enthousiasmantes.
Dans la salle, on croise des spectateurs venus de tout le nord-est, et même d'Allemagne, et de Suisse. Il y a les programmateurs de l'Autre Canal de Nancy, ou de la Cartonnerie de Reims. Le festival invite au déplacement, au mouvement, à une pratique dynamique de la culture. Ne possédant pas le glamour que le nom d'une grande métropole ajoute sur une carte, le Grand Est souffre d'une mauvaise réputation injustifiée. En proposant une affiche aussi pointue qu'elle est éclatée, Génériq achève de prouver que le mouvement est une (plus) belle façon de vivre la culture, parce qu'il crée une dynamique, entre ces électrons libres détachés de tout épicentres de gravité urbains. Génériq est un des meilleurs exemples de ce que "l'événementiel" en France devrait toujours être : la mise en lumière, artistiquement exigeante, d'une pratique culturelle déjà réelle.
Le site du festival.

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