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L’architecture des marques sur le web et la notion de marque germinatrice, par Daniel Bô

Publié le 03 mars 2009 par Levidepoches

Image_7_2 ImagesImages4_2 Images5 L’objectif de cet article est de montrer que les relations entre les marques fonctionnent de plus en plus en réseau plutôt qu’en arborescence. On verra à travers des exemples comme Microsoft, l’architecture en réseau des différentes entités. On en arrive au concept de marque germinatrice où la marque centrale essaime des éléments de ses codes génétiques en créant un air de famille. Il ne s’agit pas de répéter le même motif pour marquer ses différentes créations mais plutôt de décliner certains principes qui suggèrent la reconnaissance sans l’enfermer. Ainsi le Futuroscope, qui est fortement soutenu par Microsoft, a un air de famille sans avoir besoin qu'on rappelle directement le logo du partenaire.

Dans le monde réel, on a été habitué à des constructions de marques en arborescence avec la marque mère et la marque fille, et les notions hiérarchiques d’ombrelle, de caution, de prénom,…

Dans le monde virtuel et dans les domaines des médias et des logiciels, les marques sont construites à partir d’une architecture en réseau plutôt qu’en arborescence.

Ce nouveau type d’architecture peut être comparé avec la structure familiale actuelle. Auparavant, la généalogie verticale était dominée par l’idée de lignée, de descendance. Aujourd’hui, la notion de tribu horizontale s’impose avec les foyers recomposés. Il existe une multiplicité de pôles : une architecture en réseau a supplanté les arbres verticaux. 

On est passé d’un système de marques en 2 D avec partage de territoires à un système de marques en 3 D avec création de liens. Dans le monde virtuel, la question n’est plus de savoir quelle marque appartient à qui mais plutôt quels sont les liens entre chaque entité.

De la notion de " domination " à celle de " puissance ".

Le vocabulaire permettant de théoriser les marques est issu du vocabulaire politique.
On parle de " souveraineté ", de " territoire ", de " marques suzeraines ", de " marques vassales " etc. Dans le " système féodal ", les pouvoirs étaient superposés sur des territoires donnés : on discernait celui du seigneur local etc. jusqu’à celui du roi. Les hiérarchies étaient claires et s’emboitaient.

Avec internet, ces rapports de domination ont changé. On se situe davantage dans des modes de sociabilité (horizontale) que dans une logique de territoire. Internet a " déterritorialisé " les marques et aboli les rapports de domination hiérarchique.

Dans le monde virtuel, l’internaute perd ses repères : il ne sait plus où il se trouve. Le film Demon Lover illustre cette disparition des territoires délimités. Ce film met en scène des personnages travaillant dans une entreprise dont le fonctionnement se trouve perturbé par un site pornographique manga (qui met des groupes en concurrence, signe des contrats etc.). Les travailleurs sont manipulés par ce site de torture, mais personne ne sait qui en est à l’origine. À la fin du film, les pistes sont entièrement brouillées : on ne comprend plus " qui contrôle qui ", sur quel type de relation, si le site pourrait contrôler l’ensemble des entreprises en concurrence etc. Il n’existe donc plus ni collectivité ni territoire délimité.

L’instauration d’une relation logicielle.

Dans le système des marques au sens classique, les rapports entre les marques fonctionnent plutôt sur le modèle de la féodalité. La puissance est une puissance de domination.

Dans l’univers du logiciel, la puissance se situe plutôt " à l’intérieur de ", " dedans " (cf. Intel inside, ou powered by Windows) avec une puissance d’engendrement, qui donne la possibilité de faire apparaître des choses inattendues.

La marque logiciel correspond à une puissance de renforcement, une dotation en capacité.

La cross fertilization.

La création de liens synergétiques.

Dans un système de marques avec une architecture en réseau, chaque entité renforce l’autre. On n’est pas dans une logique de rationalisation d’un portefeuille de marques mais plutôt dans la maximisation des liens.

Une architecture en réseau suppose de croiser deux à deux chacun des sites afin de déterminer ce qui peut naître de leur interaction. Le croisement n’est donc pas un simple lien hiérarchique.

< La cross fertilization apparaît comme une manière d’exprimer les liens entre les marques de façon plus forte qui va bien au-delà de simples rapports de communication.   

Les marques doivent ménager des jeux d’aller-retour entre elles, sachant que les effets de renvoi sont démultipliants.

< Sur internet où les liens de partenariats sont fréquents, le réseau  doit développer de vrais liens synergétiques de parentèle.

Le dépassement de la simple notion de partenariat.

Sur internet, le partenariat consiste à mettre à disposition un espace que l’on alloue à un partenaire, de la même manière qu’un corner dans un magasin ou que l’on invite quelqu’un chez soi.

Au sein d'un réseau de marques, il faut dépasser la notion de simple partenariat commercial :

- Il s’agit de renvoyer, d’indiquer et d’ouvrir des chemins.

- L’association n’est pas un simple hébergement mais une occasion de fabriquer des produits pour une utilisation commune : elle est productive et non pas opportuniste.

Il faut associer un bénéfice, un produit intéressant à chaque lien. Le croisemement de deux marques doit systématiquement donner lieu à une résultante, c’est-à-dire à un bénéfice, un produit dérivé fécondé par les deux entités.

Les liens entre les entités du réseau doivent s’exprimer par des proximités de codes.


La notion de " marque germinatrice ".

On aboutit alors à la notion de marque " germinatrice ".
Etre une marque germinatrice suppose de posséder un code d’expression suffisamment riche pour pouvoir le disséminer. Ce code doit pouvoir se retrouver dans tous les développements, les bouquets de la marque mère.

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  Ce processus de dissémination peut être comparé à celui de la transmission du code génétique. Le génome humain étant d’une diversité infinie, il existe une infinité de manières différentes pour les membres d’une même famille de se ressembler. Ces ressemblances deviennent alors indescriptibles : on reconnaît des traits de ressemblance (dans le visage par exemple) sans forcément pouvoir les associer à un facteur particulier. De la même manière, la X-Box est apparentée à Microsoft sans raison objective.

Il faut ainsi établir la liste de tous les éléments qui composent la matrice de l’identité du noyau afin de déterminer ce que l’on peut disséminer de ces éléments dans une logique de résultante à chaque croisement de marque. Téléchargement galaxie Microsoft.doc

Le remplacement de la notion de logo par celle de " pattern ".

La marque germinatrice a vocation à créer son réseau par dissémination sur un mode fluide.

Dans le système classique, les marques sont inscrites dans des ensembles finis. Leur logique est binaire (sur le mode oui / non, appartenant / n’appartenant pas à la classe).

Le réseau de marques en univers virtuel fonctionne comme un ensemble flou. La reconnaissance ne doit pas être assignée à des éléments fixes. Les marques du réseau ne fonctionnent pas par inclusion / exclusion mais par une plus ou moins grande proximité avec le modèle de référence. Sur différents paramètres, elles sont plus ou moins éloignées du noyau central.

Dans l’exemple de Microsoft, il existe un rayonnement de la marque mère sur toute une série de marques (MSN, Hotmail, Office, Word,…) qui en émanent, en lui empruntant des éléments divers. Une expansion floue et sans limite s’opère ainsi à partir d’un foyer dense (la marque Microsoft).

Le dogme de l’intangibilité du logo ne marche donc plus. Le système d’identité visuelle ne doit donc pas être considéré comme un simple logo fixe mais comme un pattern.

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Dans le cas d’Orange, l’identité visuelle comprend non seulement la couleur orange mais aussi son négatif le noir. Le orange, qui est la couleur du soleil, de la lumière, s’oppose au noir : le négatif du orange fait partie du code de l’identité. Le code est dans la virtualité du logo : le noir est là comme opposé au logo lui-même.

Il ne faut donc pas penser le logo uniquement en termes visuels. Un logo peut par exemple être auditif. La marque Orange se trouve ainsi prononcée par une voix d’enfant qui a pour but d’empêcher l’identification du français ou de l’anglais. Le logo devient oral, l’oralité transcrite faisant partie du code de la marque.

Pour terminer cet article, l’exemple des différentes entités de Carat et du groupe Aegis mérite d’être montré. On y voit des airs de famille à travers des liens subtils et riches.

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Auteur : Daniel Bô
Source : Analyse Sémiologique et Etudes marketing
Publié par : Nicolas Marronnier
Publié sur : levidepoches


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