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[réflexion] "Me suis fais l'intégrale en 2 jours" : bâfrer une série, pure réflexe sériephile ?

Publié le 08 avril 2009 par Red

C'est de plus en plus souvent, sur le virtuel ou dans la vie réelle, qu'on entend cette fameuse réplique - de la part de sériesphiles(/vores) avertis ou pas - vis-à-vis des séries télévisées : "j'ai dévoré la série en un week-end, resté scotché devant mon poste TV à enchaîner les épisodes."
C'est souvent - logiquement - les séries volontairement addictives qu'on cible par cette expression mais finalement quand on y pense, quelles séries peuvent réussir l'exercice, lesquelles le réussissent bien et finalement, cette attitude de fan-aveugle a-t-elle ses raisons d'être ? Est-elle subjective ? Ne serait-il pas mieux d'apprécier une série en conservant les épisodes sur le long-terme ou au contraire, certaines séries sont-elles destinées à être suivies ainsi ?
Deux exemples : Greek, Skins. Du teen drama de qualité, mais... addictif ou pas ?
J'aimerais répondre, respectivement, oui et non. Pourtant l'une n'est pas forcément plus avantagée qualitativement parlant que l'autre (même si j'estime que Skins a plusieurs avantages vis-à-vis de Greek, une certaine facilité à aborder certains thèmes que Greek n'a pas, mais elles jouent sur un registre complètement différent). Et la question de la qualité n'entre pas en jeu ici.
Pourquoi Greek serait un produit plus addictif que Skins, dans le sens où il serait plus facile - et finalement plus jouissif-  d'enchaîner les épisodes de Greek (comparée à Skins) ? Il y a continuité entre les épisodes, il y a des storylines qui s'étalent sur la saison complète, chose qui est beaucoup plus rare dans Skins. Je prends l'exemple de Greek car je me suis posé la question une fois, mais on peut prendre des homologues comme Gossip Girl, Friday Night Lights - là encore, la question de la qualité n'entre pas en jeu. (!!)

Posons-nous la question : préférais-je passer une nuit (ou une journée si vous préférez) entière à suivre la première saison intégrale de Greek ou une nuit entière à suivre la première saison intégrale de Skins ? De mon point de vue, Greek prend mon vote même si je préfère Skins, m'y sentant plus proche.

Pourquoi ? Le schéma narratif est différent, indéniablement. Et la réponse vient sûrement de là.

Chaque épisode de Skins se recentre sur un personnage en particulier. On oublie du coup le reste des personnages et le schéma est beaucoup plus uniforme. Et surtout, l'univers évolue bizarrement entre les épisodes de Skins : on peut passer d'une ambiance noire dans un épisode consacré à Effy, pour passer à un épisode comique consacré à Chris pour finalement revenir à un climat ébranlé dans l'épisode consacré à Cassie. La transition est plus brute, l'enchaînement des épisodes est plus perturbant.
On pourrait déduire que 1 chapitre de Skins = 1 épisode de Skins alors qu'un chapitre de Greek = plusieurs épisodes où les storylines trouvent un début et une fin... dans le quota d'épisodes en question. Ça peut durer une saison, ça peut durer une mi-saison, ça peut durer un quart de saison mais l'efficacité est plus facilement garantie dans une série qui adopte le schéma narratif de Greek : l'atmosphère est homogène sur la saison complète et on arrive à suivre agréablement une série de ce genre à raison de plusieurs épisodes puisque les storylines évoluent de façon traditionnelle : début, milieu (éléments perturbateurs, développement), fin (résolution).

skins

Et après ?

Le PC est vide. On a épuisé notre stock des épisodes de la première saison de Desperate Housewives en peu de jours - parce que c'était innovant, parce que c'était politiquement incorrect (un peu), parce que ça faisait longtemps qu'on avait pas eu d'héroïnes aussi attachantes à la télévision (on se plaisait à suivre leurs histoires qui sortaient de l'ordinaire) et donc tout cela a créé une série addictive -.
Plus d'épisodes : il va falloir s'habituer au rythme américain d'un épisode par semaine, c'est plus difficile. Donc finalement, on en vient à se poser la question suivante :

Se goinfrer d'inédits en peu de jours, c'est bien ou pas ? (outre le fait que votre vie sociale en pâtit)

Ça dépend. Dans certains cas de séries, c'est effectivement difficile de passer du rythme soutenu au rythme d'un épisode par semaine une fois le stock épuisé. Surtout quand on peut l'éviter. Desperate Housewives, par exemple. À première vue, c'est plutôt une série qui est destinée à être suivie à un rythme d'un épisode par semaine vu que le scénario est peu complexe et qu'il n'y a pas le risque de louper des détails pendant les 7 jours où l'on attend la diffusion du prochain inédit - pas de mythologies complexes et conspirations entre personnages - (donc, ce n'est pas Lost, ce n'est pas Damages).

Dans le cas d'une série comme DHW, un épisode tous les dimanches semble être le rythme parfait (oublions les pauses dans la diffusion américaine, elles tâchent le raisonnement). Et si même on possède les DVD's chez nous ou que le PC porte une saison complète d'épisodes non-vus par le sérievore européen friand du gossip banlieusard made in Wisteria Lane, mieux vaut s'accorder à ce rythme << parfait >> : un épisode par semaine, du pilote jusqu'au series finale, et on arrive à installer un RDV sériel quotidien ; un épisode de Desperate Housewives chaque lundi, de 2004 jusqu'en 2013, c'est un parcours (et une dévotion) sériels uniques qui vous suivent pendant 9 ans de votre vie. Alors qu'un rythme tout biscornu c'est navrant à côté non ?

Non.

Un seul mot : Damages. Pression, action, adrénaline, conspirations, mythologie. Damages est typiquement le genre de séries qui se visionne à un rythme effréné. Il y a beaucoup de détails qu'on peut louper en une semaine et la série est clairement construite pour être suivie à un rythme soutenu. C'est plus difficile de suivre Damages à un épisode par semaine.
Imaginez : épisode 7 le lundi soir, beaucoup de révélations à retenir, vous visionnez le 8 une semaine plus tard, entre temps vous avez eu le temps de mater Mad Men, Californication, Dexter, Nip/Tuck, Heroes, Fringe, Lost, Battlestar Galactica, 30 Rock (...). Des séries toutes plus différentes les unes que les autres : c'est dur. Et c'est pas le Previously on Damages du 8 qui vous aidera (zappez-le).

En plus, se goinfrer de Damages ne nuit pas à votre vie sociale : les expressions faciales de Patty Hewes, vous pouvez les ressortir dans la vie réelle pendant des situations difficiles. Ça marche. (c'est hypothétique, j'ai jamais essayé)

Entre les deux ?

Il y a Prison Break. La saison 1 de Prison Break pour moi, c'était un marathon exceptionnel : mercredi après-midi, j'enchaînais les épisodes les uns après les autres. C'est jouissif. Parce que c'est une série qui est volontairement addictive, il y a de l'action (beaucoup), de l'adrénaline à outrance : le générique de fin arrivé, on sort le fameux "putain vas-y, enchaîne avec le suivant" (si vous avez un ami peu recommandable à vos côtés)

Pourtant, à la base, Prison Break n'est pas une série qui se suit à un rythme soutenu. La trame de fond - le plan pour s'échapper de la prison - est certes complexe mais les dynamiques entre les personnages sont raisonnablement compréhensibles pour pouvoir s'attarder à un rythme d'un épisode par semaine (voire deux). Et les conspirations, y en avait pas beaucoup.

Mais c'est l'effet que fait une série comme Prison Break : beaucoup d'action, un plan d'évasion qui tue - qui n'a jamais rêvé voir des personnages s'échapper d'une prison? - et des personnages devenus des icônes dans la dimension médiatique que prennent les séries télévisées (Michael Scofield et ses tatouages, T-Bag et sa main décapitée). Ça devient finalement difficile de se limiter à un épisode (deux) par semaine tant la série a su faire évoluer un fil rouge passionnant tout au long de la première saison.

Après, les goûts varient évidemment, il y aura toujours ceux qui préfèreront rêver de leur future carrière médicale en fantasmant devant Meredith Grey et Derek Shepard s'embrassant dans l'ascenseur. C'est différent.

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Et vous, vous êtes plutôt patient et dévoué donc vous suivez le rythme calme (si vous avez un stock d'épisodes consistant) ou au contraire, vous est-il arrivé d'avaler littéralement une série (ou une saison) ?


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