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Irak : pas de fin en vue...

Publié le 12 avril 2009 par Tanjaawi
Cela fait six années que les Irakiens subissent la tragédie de l’invasion américaine et la spirale de violence qui s’en est suivie, écrit Salah Hemeid. (JPG) L’Irak est encore et toujours sous la botte de l’occupant américain.

Jusqu’à il y a quelques semaines, les Irakiens espéraient encore que le sixième anniversaire du renversement du régime de Saddam Hussein serait l’occasion de quelques bonnes nouvelles pour leur nation sous occupation, particulièrement en termes de réconciliation, de paix et de stabilité. Mais hélas, les bruits et les images d’un Irak déchiré par la guerre sont plus évidents que jamais.

Les attentats à la bombe, les embuscades et les kidnappings sont revenus en force à Bagdad et dans les autres villes irakiennes après une diminution ces derniers mois, remettant en question les affirmations du premier ministre Nuri Al-Maliki et reprises par les officiels américains, selon lesquelles l’Irak était finalement revenu à une situation normale.

Des centaines de personnes ont été cette semaine soit tuées soit blessés dans une série d’attentats qui ont ravagé des marchés et d’autres lieux de rassemblement, ces événements contredisant d’une manière flagrante l’image de la ville attrayante que le pouvoir à Bagdad et Washington essayent de peindre. L’Irak reste un pays prisonnier de la violence sectaire.

Les Irakiens à travers le pays ont célébré l’anniversaire d’aujourd’hui avec peu de fanfare, mais peut-être avec le sentiment « de choc et de terreur » que l’ancien Président Bush a tellement brutalement voulu instiller dans la population au moment où il a lancé sa guerre il y a six ans. En effet, la guerre a été un choc pour la conscience, générant un sentiment collectif d’amertume et d’humiliation car la nation irakienne constate combien elle a été transformée après six ans d’occupation américaine, de massacres sectaires et de peur généralisée.

L’anniversaire de cette année vient à un moment précis pour le futur de l’Irak, après la déclaration du président Barack Obama selon laquelle les troupes des Etats-Unis se retireront l’année prochaine. Le lien entre cette annonce et la violence qui augmente à nouveau est très bien compris. On s’est toujours attendu à ce que le retrait des troupes américaines fasse monter la température en Irak, créant un vide sécuritaire que les groupes attendant leur revanche essayeront de combler.

Ces dernières semaines les Conseils du Réveil — groupes armés sunnites mis en place par les Américains — se sont désagrégés, avec quelques uns de leurs membres rejoignant l’insurrection. C’est ce processus de désagrégation qui parait être à l’origine des attaques qui ont détruit des quartiers chiites à Bagdad cette semaine. Alors que les groupes [sunnites] affirment que le gouvernement ne les a pas payés et a été trop lent à les intégrer dans les forces de sécurité, le gouvernement prétend de son côté que les Conseils sont infiltrés par des partisans de l’ex-parti Baath et des membres d’Al-Qaeda dont l’objectif est de déstabiliser le pays.

Indépendamment des raisons à l’origine de la récente escalade [de violence], cette dernière polémique souligne le fait que les gains beaucoup vantés dans le domaine de la sécurité sont fragiles et que la situation politique demeure explosive. Celle-ci sera bien plus compliquée quand les Américains commenceront à réduire le nombre de leurs soldats stationnés en Irak.

Les mouvements rivaux dans le pays ont encore à résoudre le conflit concernant le pouvoir et le partage des richesses nationales, et tous les efforts visant à une réconciliation devront surmonter une foule de demandes et d’objectifs contradictoires.

Un problème fondamental est que la réconciliation nationale continue à être contrecarrée par la poursuite des projets ethniques et sectaires, locaux et régionaux. Les six dernières années donnent suffisamment la preuve que la politique et la violence font partie de la même équation. Pour résoudre un problème vous devez également résoudre l’autre. L’escalade récente de la violence est une manifestation claire des fossés qui continuent d’exister en Irak entre les groupes religieux et ethniques qui se font concurrence pour le pouvoir, leur niveau d’influence et les ressources du pays.

Les élections parlementaires programmées pour la fin de cette année seront un des premiers terrains d’affrontements. On s’attend à ce ces élections soient violemment disputées non seulement entre les différents groupes mais également au sein de communautés précises.

La situation devient encore plus compliquée étant donnée la manière dont les voisins de l’Irak agissent pour gagner en influence. L’Irak a des frontières communes avec l’Arabie Saoudite, l’Iran, la Syrie, la Jordanie, la Turquie et le Koweit, et bon nombre de ces pays complotent pour avoir leur mot à dire sur l’avenir irakien. Leur appui aux diverses factions en Irak représente un défi important pour la stabilité à long terme de l’Irak et pour son indépendance politique. Certains des voisins de l’Irak accueillent, forment, financent, arment et manipulent des groupes opposés au gouvernement irakien. Alors que le retrait américain approche, on s’attend à ce que les voisins de l’Irak tentent d’y renforcer leur influence.

Tandis que l’impasse politique perdure, plus de massacres semblent inévitables alors que l’administration Obama parait attentive à rester en marge du cours sanglant dans lequel l’Irak s’enfonce. Pour l’administration en place, l’anniversaire du renversement de Saddam, présenté par son prédécesseur comme la libération des Irakiens d’une dictature brutale, n’est en rien un moment à célébrer. Le président Obama et son administration ont même ignoré l’occasion alors que des explosions faisaient rage dans la capitale irakienne et tuaient les gens par dizaines.

La brève visite d’Obama à Bagdad cette semaine était prévue pour le mettre en valeur et pour mettre en évidence l’accueil reçu des soldats américains, plutôt que d’être une tentative sérieuse de traiter les problèmes irakiens. Les Etats-Unis n’ont plus aucun ambassadeur en Irak depuis que Ryan Crocker a quitté Bagdad le 13 février, un signe clair que Washington ne voit aucune urgence dans la situation qui pourtant se dégrade.

L’anniversaire pourrait servir à rappeler aux Irakiens la nécessité de mettre un terme au drame politique que vit leur nation et, tout aussi important, que la solution à leur crise nationale est entre leurs propres mains.

Les Irakiens doivent agir de façon responsable, et rapidement, pour dissiper le sentiment qu’ils vont manquer une nouvelle occasion pour une réconciliation nationale. S’il y a quoi que ce soit à espérer du carnage de cette semaine c’est que l’inquiétude exprimée par beaucoup d’Irakiens secoue les hommes politiques et leur fasse prendre conscience même tardivement de la profondeur des dangers auxquels l’Irak fait face.

Salah Hemeid - Al Ahram al Weekly / 12 avril 2009 / Info-palestine

9 avril 2009 - Al Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2009/942...
Traduction de l’anglais : Claude Zurbach


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