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De l'image hybride au cinéma

Publié le 14 avril 2009 par Vance @Great_Wenceslas

Regards sur l'image hybride

Un dossier par TWIN

Le photoréalisme dans l'image numérique de cinéma est une notion qui a dépassé ses propres enjeux formels.

Depuis les premières exploitations de ces images dites " bitmap " ou vectorielles - à l'origine vues comme des outils d'aide à la représentation avant de devenir des entités fondues à la chaîne de production -, la recherche constante visant à imiter la réalité est l'une des problématiques dominantes ayant hanté tout cinéaste dans sa quête de la figuration idéale d'espaces et de mondes.

Malheureusement pour le cinéaste en question, le photoréalisme numérique est resté pendant longtemps le Saint Graal de certaines intentions picturales. Ainsi, de la même façon que nous percevons aujourd'hui les trucages optiques d'anciens films, l'effet du temps et la distanciation créent un malaise perceptif quant à la conservation d'une certaine qualité figurative - et d'une fidélité représentative pour la couche numérique par rapport à son modèle iconique - des trucages qui subissent, peut-être plus que tout autre élément au cinéma, le poids du temps et son vieillissement.

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Ainsi, si la nostalgie et la cinéphilie patrimoniale jouent énormément dans notre perception et notre appréciation contemporaine des effets spéciaux optiques de certaines œuvres - tout autant qu'une certaine admiration pour le talent et le génie rétrospectif des pionniers - telles que leKing Kong de 1933 ou le Citizen Kane d'Orson Welles, bien ancrées dans des pans entiers de notre culture cinématographique occidentale, il peut en être autrement pour les films issus des années 70 et 80, qui témoignaient de la fin prochaine des effets optiques, arrivés alors au maximum de leur achèvement technique et esthétique. Il est probable que la perception spectatorielle envers les effets de ces films -la Guerre des étoiles , l'Empire contre-attaque et le Retour du Jedi en étant semble-t-il les titres phares -, qui expérimentaient beaucoup et donc risquaient d'autant plus leur homogénéité dans le champ, soit devenue moins tolérante devant des effets qui, s'ils paraissaient comme l'avènement du jamais vu à leur époque, peinent
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aujourd'hui à trouver une quelconque aisance dans leur figuration optique. De cette façon, par le biais de notre œil habitué et sans doute également relativement fatigué par la densité d'effets mis dans le contexte actuel à notre disposition de spectateur, les projections arrière sur plaque d' Aliens : le retour ne jurent-elles pas particulièrement ? Les monstres rotoscopés du Seigneur des anneaux de 1978 ne semblent-ils pas déplacés de l'environnement graphique de l'image ? Et les incrustations optiques des héros dans leur avion par-dessus un ciel nuageux dans Indiana Jones & la dernière croisade n'ôtent-elles pas une certaine crédibilité à la séquence quand les lignes de démarcation entre les couches sont si épaisses et contrastées que le punctum de l'image se veut plus comme le collage optique grossier que comme l'action elle-même ?

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La situation est la même pour les films ayant incorporé en leur sein les traitements représentatifs en image numérique. Si la qualité esthétique des portions d'images issues de couches numériques garde étonnement encore à ce jour toute intégrité formelle, notamment dans les cas du robot en métal liquide deTerminator 2 , des dinosaures reconstitués de Jurassic Park ou encore du chevalier animé sortant du vitrail dans le Secret de la pyramide , il en est tout autrement pour les films ayant suivi la phase de rupture de cette fin de millénaire, par le numérique, dans les procédés de représentation cinématographique. Ainsi, à l'instar de la perception a posteriori des compositions optiques, certaines figurations numériques vieillissent, et le photoréalisme revendiqué hier quant à sa qualité esthétique ne devient plus aujourd'hui qu'un surprenant souvenir. De cette façon, les animaux de Jumanji ont ceci d'artificiel qu'il est difficile de les regarder autrement que comme des coquilles vides, des modélisations dont la surface cache une absence de " remplissage " intérieur et dont les rendus trahissent l'hybridation douloureuse d'une représentation qui se veut photoréaliste mais qui finit par tenir pour beaucoup du dessin animé. Même chose pour les rajouts numériques des éditions spéciales de l'ancienne trilogie Star Wars : les environnements numériques de Bespin, la cité des nuages, ou de Tatooine, l'astroport perdu en plein désert, ne bénéficient plus, aux yeux d'aujourd'hui, de la même complexité dans la peinture signifiante des mondes imaginés.

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L'esthétique de la représentation des espaces au cinéma n'en finit pas pour autant en statu quo : il est plus que probable que, dans quelques années, notre vision des œuvres, encore plus performantes et riches aux yeux, sera tronquée par le renversement inévitable des normes qualitatives pour des figurations et un niveau de traduction indicielle encore plus exigeants.

C'est un mouvement perpétuel qui s'inscrit dans une évolution technique logique, hyper dépendante de ses conditions de production.


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