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Positionnement des radars suite et fin ?

Publié le 23 avril 2009 par Zadvocate

Il y a 3 mois de cela, j’avais traité ici d’un arrêt rendu par la Cour d’Appel de Montpellier prononçant la relaxe d’un automobiliste poursuivi pour un excès de vitesse au motif qu’il n’était pas permis de s’assurer de la fiabilité du contrôle de vitesse opéré faute pour les services de Police de démontrer que le radar avait été correctement étalonné.

J’avais attiré l’attention du lecteur sur l’absence de décision de la Cour de Cassation en la matière qui devait donc amener à relativiser l’importance de l’arrêt de la Cour d’Appel de Montpellier.

La Cour de Cassation vient de rendre deux arrêts traitant du sujet le 18 mars 2009.

Cour de cassation chambre criminelle
Audience publique du mercredi 18 mars 2009 - N° de pourvoi: 08-87925

Cour de cassation chambre criminelle - Audience publique du mercredi 18 mars 2009 - N° de pourvoi: 08-87926

Ces décisions ne sont malheureusement pas favorables aux automobilistes.

La Cour avait à connaître de deux jugements rendus le 7 octobre 2008 par le Juge de proximité près le Tribunal de Police du Vigan (Gard). Par deux fois, le Juge de proximité à relaxer des automobilistes poursuivis pour un excès de vitesse. Le Parquet a formé un pourvoi en cassation à l’encontre des deux jugements.

La Cour de Cassation casse les jugements de première instance et renvoie les deux affaires pour être jugées devant le Juge de proximité près le Tribunal de Police de Nîmes.

La motivation des arrêts est pour le moins laconique:

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 130-9, alinéa 1er, du code de la route et 537 du code de procédure pénale ;

Vu lesdits articles ;

Attendu que, selon ces textes, les procès-verbaux dressés par les officiers ou agents de police judiciaire font foi jusqu’à preuve contraire des contraventions qu’ils constatent ; que la preuve contraire ne peut être rapportée que par écrit ou par témoins ;

Attendu que, pour relaxer Jean-Pierre X…, poursuivi du chef d’excès de vitesse à la suite d’un contrôle automatique effectué le 9 septembre 2006, à Saint-Gely-du-Fesc, la juridiction de proximité énonce que l’autorité poursuivante ne produit aucun justificatif de la régularité du positionnement du radar, notamment au regard de l’angle qu’il doit faire avec l’axe de la route sachant qu’une variation de cet angle engendre des modifications de la vitesse enregistrée ;

Mais attendu qu’en statuant ainsi, alors que le bon fonctionnement du cinémomètre était suffisamment établi par son homologation et sa vérification annuelle, la juridiction de proximité a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;

On pourrait résumer, circulez ya rien à voir.

Plus sérieusement, la Cour fait prévaloir un principe de procédure pénale qui veut que les procès-verbaux dressés par les services de Police en matière de contravention font foi jusqu’à preuve contraire (à charge donc pour le prévenu de rapporter cette preuve contraire selon des moyens limités par la loi).

Art.537 Code de Procédure Pénale:

Les contraventions sont prouvées soit par procès-verbaux ou rapports, soit par témoins à défaut de rapports et procès-verbaux, ou à leur appui.

Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les procès-verbaux ou rapports établis par les officiers et agents de police judiciaire et les agents de police judiciaire adjoints, ou les fonctionnaires ou agents chargés de certaines fonctions de police judiciaire auxquels la loi a attribué le pouvoir de constater les contraventions, font foi jusqu’à preuve contraire.

La preuve contraire ne peut être rapportée que par écrit ou par témoins.

Et la Cour de considérer que le fait que figure dans le procès-verbal de contrôle de vitesse l’indication que le radar avait fait l’objet d’une homologation et de sa vérification technique annuelle suffit à démontrer la fiabilité du contrôle de vitesse.

Il faut en effet savoir que les différents types de radars utilisés par les forces de l’ordre doivent faire l’objet d’un certificat d’examen par les services de la Direction de la Métrologie du Ministère de l’industrie.

Vous pouvez consulter celui du Mesta 210.

Une fois homologué, chaque radar doit faire l’objet d’un examen technique annuel pour s’assurer de son bon fonctionnement. Les services de Police lorsqu’ils dressent un procès-verbal de contrôle de vitesse doivent mentionner la date du dernier examen pour permettre au juge de s’assurer que l’appareil utilisé était fiable.

En résumé, la Cour juge qu’un radar homologué et qui a fait l’objet de sa vérification annuelle fonctionne très bien et qu’il n’y a pas lieu de douter de sa fiabilité.

Que doit-on penser de ce raisonnement ?

Pour ma part, je pense que la Cour de Cassation fait une erreur d’analyse.

En effet, dans les cas jugés, on peut penser que les prévenus n’ont pas mis en cause le bon fonctionnement du radar lui-même.

Ils ont sûrement soutenu que faute pour les services de Police d’indiquer dans un procès-verbal les opérations réalisées pour l’étalonnage et le positionnement du radar conformément aux prescriptions du constructeur, il n’était pas possible de s’assurer que la vitesse constatée par les services de Police correspondait à la vitesse réelle du véhicule.

Et répondre à cet argument en mettant en avant l’homologation du radar et la visite de contrôle annuelle, c’est un peu court.

On peut très imaginé un radar homologué, qui une fois par an est confié aux services chargés de contrôler sa fiabilité et qui une fois rendu aux services de Police sera mal positionné sur le bord de la route.

Or c’est ce mauvais positionnement qui de l’aveu même des services de Police (voir le rapport du SGAP) et des constructeurs est à même de fausser la vitesse relevée (à la baisse mais aussi à la hausse).

En bref, un policier qui positionne mal son radar (parce qu’il est maladroit, voire pas équipé pour le faire), va de toute bonne foi constater que s’affiche une vitesse supérieure à la vitesse autorisée et procéder à la verbalisation de l’automobiliste.

Ce faisant, il verbalise peut-être quelqu’un qui n’était pas en excès de vitesse ou qui ne l’était peut-être pas de 20km/h au dessus de la limite mais seulement de 5. Or les sanctions encourues ne sont les mêmes.

Doit-on voir dans les arrêts de la Cour de Cassation des décisions d’opportunité pour éviter que l’ensemble des contrôles de vitesse soient contestés et déclarés irréguliers ?

Je n’en sais rien, je note que les décisions ne sont pas publiées au Bulletin de la Cour de Cassation.

Il nous reste maintenant à attendre d’autres décisions, notamment peut-être celle visant l’arrêt de la Cour d’Appel de Montpellier contre lequel le Parquet n’aura pas manqué de former un pourvoi.


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