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«Millénium» de Niels Arden Oplev : l’avant-première sur les Champs Elysées

Par Sandra.m

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Il fallait un endroit d’exception pour l’avant-première française de la très attendue adaptation du best seller de  Stieg Larsson, en présence de l’équipe du film (le producteur, le réalisateur Niels Arden Oplev et l’actrice Noomi Rapace). Ce fut donc les Champs Elysées et plus précisément l’UGC Normandie, avant-hier soir.

Pour ceux qui, comme moi, n’ont pas lu le roman, voici l’intrigue en quelques mots : Michael Blomkvist (Michael Nyqvist) est journaliste économique au magazine « Millenium ». Condamné pour diffamation, il décide de prendre de la distance avec sa vie et son métier. Mais Henrik Vanger (Sven-Bertil Taube), grande figure de l’industrie suédoise, et membre d’une famille dont les membres sont tous plus monstrueux les uns que les autres, fait appel à lui afin qu’il mène l’enquête sur un meurtre non élucidé, celui d’Harriet Vanger (Ewa Fröling), nièce du grand homme, et disparue à l’âge de seize ans, une exception à la monstruosité familiale. Au cours de ses recherches, Blomkvist se rend compte que la famille Vanger semble cacher bien des haines et des secrets.

 L’impétueux et téméraire journaliste se rend donc sur les lieux pour poursuivre son enquête (un endroit isolé et sinistre comme il se doit, ou peut-être devrait, ces grandes étendues angoissantes ne constituant finalement pas un élément de tension et de frayeur comme elles auraient pu)  est amené à rencontrer Lisbeth Salander (Noomi Rapace) qui mène l’enquête en parallèle à partir des informations de l’ordinateur de Blomkvist. La jeune femme de vingt-quatre ans, au douloureux passé (et c’est un euphémisme), est en effet une hackeuse professionnelle. Tous deux vont bientôt être amenés à se rencontrer pour finalement mener l’enquête ensemble dans ce cadre glacial.

Cette adaptation cinématographique a suscité une incroyable attente car adapter une trilogie (suédoise, ce qui ajoute à l’étrangeté du phénomène), qui s’est vendue à 10 millions d’exemplaires dans le monde et  à 2, 6 millions d’exemplaires rien qu’en France en faisant ainsi le livre le plus vendu en 2008 dans l’hexagone, ne peut évidemment être anodin. Ne manquait plus que la crise cardiaque de l’auteur à 50 ans alors qu’il venait de gravir sept étages pour se rendre chez son éditeur et y déposer la trilogie pour que la légende soit complète.  Miraculeusement les Suédois se sont emparés de l’adaptation avant que les studios hollywoodiens ne s’en mêlent et c’est à Niels Arden Oplev que fut dévolue la réalisation de l’adaptation de ce phénomène littéraire.

N’ayant pas lu le roman mais en en ayant eu de nombreux échos, je ne pouvais qu’être impatiente de découvrir cette adaptation et de me plonger dans l’univers a priori si fascinant de « Millenium » au pays de Bergman (la nationalité étant bien leur seul point commun).  Il m’a d’abord fallu m’habituer : à la noirceur exacerbée par la blancheur paradoxalement inquiétante (quoique … : on ne recourt finalement que très peu à ce contraste qui aurait pu être saisissant) de ces grandes étendues cauchemardesques, à ces personnages archétypiques plus monstrueux les uns que les autres, à ce rythme trépidant et « téléfilmique » qui ferait passer le feuilleton de l’été de TF1 pour un film de Nuri Bilge Ceylan, et à ces ellipses réduisant au stricte minimum la psychologie des personnages.

Tout ce qui est excessif est insignifiant dit-on, c’est probablement la raison pour laquelle je n’ai pas  éprouvé la moindre empathie tant l’univers est glauque, tant les malheurs sont excessifs, tant la perversité et le sadisme sont omniprésents.

Je ne sais pas très bien comment le réalisateur parvient à maintenir notre attention pendant 2H20 (quoique ma perspicace voisine m’a dit que j’avais très souvent regardé  ma montre…) tant la quête du coupable m’a indifférée (de toute façon ils sont tous plus monstrueux les uns que les autres donc que cela soit l’un ou l’autre ne change pas grand-chose, le réalisateur n’implique d’ailleurs pas du tout les spectateurs dans cette quête qui paraît accessoire) l’intrigue étant centrée sur les relations entre le fade journaliste interprété par Michael Nyqvist (paraît-il une star dans son pays) avec ses airs de Daniel Craig mal en point ( que les admirateurs de Daniel Craig ne s’en offusquent pas, mal en point ai-je dit, bien mal en point même ) et la jeune Lisbeth dont l’allure androgyne, gothique, et surtout son regard noir, froid et déterminé dévorent l’écran, ainsi que la singularité de son personnage à la personnalité aussi âpre que l’univers qui l’entoure, sortant enfin et ainsi des archétypes auxquels sont réduits les autres personnages. Incroyable donc pour un thriller : on se fiche totalement de savoir qui est le criminel puisque le portrait psychologique des potentiels assassins n’est pas dressé, ou alors grossièrement.

Paraît-il  en effet que le bestseller est à la fois un roman politique et un thriller. Malheureusement, le film n’est ni l’un ni l’autre. Le caractère antisémite des assassins ne semble être là que pour atteindre le degré maximal du sordide (pour ça c’est réussi) et de la perversité dans laquelle se complait le film, celle-ci étant  montrée frontalement. L’aspect politique qui aurait pu être intéressant est donc complètement éludé. Dommage…

Probablement le roman le justifie-t-il mais au regard de ce film on a également du mal à comprendre où le titre trouve sa justification tant le journal « Millenium » est ici un arrière-plan et tant les portraits de ses membres en sont esquissés.

Reste Noomi Rapace, cette jeune actrice autodidacte à laquelle le film doit beaucoup (tout ?), ce dont les distributeurs ont parfaitement conscience tant la campagne de promotion semble orchestrée autour de sa personne…

Cette adaptation du best seller de Stieg Larsson ne m’a pas donnée envie de lire ce roman même s’ il l’a, après tout, peut-être trahi. Et alors donc honteusement trahi. Il m’a en effet laissé un goût âpre tant son succès semble être le reflet désolant, voire inquiétant,  d’une société avide de noirceur absolue et de perversité monstrueuse, d’autant plus dangereuse qu’elle semble ici finalement banalisée car beaucoup plus ridicule que finalement insupportable (même si son idée, elle, l’est…ô combien).

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