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Poétique de l'hygiène bucco-dentaire

Publié le 06 mai 2009 par Francisbf

Se laver les dents

C'est bien embêtant

Mais

Avoir les dents jaunes

Ça n'est pas bien beaune.

Voilà.

C'est ce que j'ai réussi à faire de mieux pour répondre à un concours de poésie d'un magazine de dentistes. Un concours de poésie pour la promotion du brossage de dents.

Le mot beaune n'existe pas, mais c'était pour la rime. En poésie, on a le droit de rajouter des lettres au bout des mots, pour la rime. Enfin, en poésie moderne. Ou en vieille poésie respectable faite par des gens morts et souvent homosexuels mais pas obligé.

Malheureusement, cette poésie est trop récente et je ne suis ni assez mort ni assez homosexuel pour que ce soit une poésie respectable. Elle date de hier soir, quand je me brossais les dents, dans ma salle de bains rose, au dessus de mon évier rose. Et j'ai peur qu'elle soit trop moderne pour un journal de dentistes, avec un mot inventé dedans, fût-ce pour la rime. Les journalistes de journaux de dentistes sont un peu frileux avec l'art, je crois. Ou c'est peut-être une idée que je me fais. Je me dis que dans un journal de dentistes, qui sont des gens respectables, les journalistes ne veulent pas choquer, et l'art moderne choque les gens respectables. C'est même fait pour ça.

Devant l'art moderne, les gens respectables disent « Môn Dieû ! » avec des accents circonflexes là où les gens moins respectables disent « waw, grave. » sans accent circonflexe, mais avec une pointe d'admiration. Et ils oublient la majuscule, parce qu'en mode T9, elle passe pas.

Le mieux, ça reste quand même si c'est joli et que ça choque. Là, c'est joli parce que ça rime, et ça choque parce que le mot beaune existe pas sauf en nom propre, et inventer des mots, c'est irrespectueux vis-à-vis des gens respectables de l'Académie Française qui décident quels mots existent, comme pyjama ou bravitude, et l'irrespect, ça choque, comme par exemple dire du mal de Gregory Lemarchal alors qu'il est mort et que du coup, c'est triste.

Enfin, là, cette poésie choque mais pas trop, moins que de se moquer de Gregory Lemarchal, parce que ça dit quand même qu'il faut se laver les dents, et ça c'est consensuel. Donc c'est pas de la poésie moderne mieux.

En fait, pour faire de la poésie moderne mieux, il faudrait dire :


Se laver les dents

C'est bien embêtant
Alors
Qu'avoir les dents jaunes
Y'a rien de plus beaune.

Mais ça, ça aurait aucune chance de passer dans un journal de dentistes parce que là, le fond est trop révolutionnaire et pendant la révolution, même si on a mal aux dents, on guillotine les dentistes, qui sont des bourgeois (ils ont des lustres en cristal dans leurs salles d'attente). Et après, on se met des clous de girofle sur les dents et on agite les têtes des dentistes au bout de piques en chantant Ça ira, ça ira alors que quand même, ça irait mieux avec des dentistes. Mais on ne fait pas d'omelette à la prolétarienne sans casser des oeufs. Les oeufs, c'est les dentistes, là.

Et les dentistes sont comme les autres gens, ils n'aiment pas qu'on fasse d'eux de l'omelette au bout de piques.Donc ça passerait sans doute pas. Je vais me tenir à la première version, pour le concours de poésie de journal de dentiste. J'avais pensé aussi à

Brosse-toi les dents

D'arrière en avant

Puis de bas en haut

C'est vraiment du gâteau

Mais finalement l'allusion à du gâteau, c'est maladroit aussi, dans un magazine de dentistes, et dans une poésie sur le brossage des dents, il vaut mieux s'en tenir à une audace de forme, parce qu'après tout qui ne tente rien n'a rien, hein.

Ne me reste plus qu'à trouver un concours de poésie dans un journal de dentistes, et à moi la gloire et les détartrages gratuits !


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