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La salle des fêtes et les troubles du voisinage

Publié le 24 mai 2009 par Christophe Buffet

La salle des fêtes et les troubles du voisinage


Voici un cas qui a justifié une indemnisation :


" Vu 1°), enregistrée au greffe de la cour le 2 septembre 1996 sous le n° 96LY02054, la requête présentée par maître J.M. Camous, avocat, pour la COMMUNE DE SAINT-LAURENT-DU-PONT (38830), représentée par son maire en exercice ;
La COMMUNE DE SAINT-LAURENT-DU-PONT demande à la cour :

a) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 923801 du 26 juin 1996 en tant que ce jugement l'a condamnée, d'une part, à payer à M. et Mme Y... une indemnité de 30 000 francs en réparation des troubles qui résultent pour eux du fonctionnement de la salle des fêtes du Revol et de la carence des autorités de police municipale à prendre les mesures appropriées pour y mettre fin et, d'autre part, à leur verser une somme de 3 000 francs au titre des frais non compris dans les dépens ;

b) de condamner les époux Y... à lui verser, au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la somme de 8 000 francs demandée en première instance et, en outre, une nouvelle somme de 8 000 francs ;

Vu 2°), enregistrée au greffe de la cour le 6 septembre 1996 sous le n° 96LY02112, la requête présentée par maître Géraldine Brambilla, avocat, pour M. et Mme X... Y..., demeurant ... ; M. et Mme Y... demandent à la cour :

a) de réformer le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 923801 du 26 juin 1996 en tant que ce jugement a condamné la COMMUNE DE SAINT-LAURENT-DU-PONT à leur payer une indemnité de 30 000 francs, qu'ils estiment insuffisante, en réparation de leur préjudice ;

b) de condamner la COMMUNE DE SAINT-LAURENT-DU-PONT à leur payer une somme de 950 000 francs en réparation du dommage causé par la construction de la salle des fêtes et une somme de 100 000 francs pour les troubles causés à leur vie personnelle ;

c) de condamner la COMMUNE DE SAINT-LAURENT-DU-PONT à leur verser la somme de 10 000 francs au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 février 2000

- le rapport de M. BOUCHER, premier conseiller ;

- les observations de Me TAULEIGNE substituant Me CAMOUS, avocat de la COMMUNE DE SAINT-LAURENT-DU-PONT et de Me BOULLOUD, avocat de M. et Mme Y... ;

- et les conclusions de M. BOURRACHOT, commissaire du gouvernement

Considérant que les requêtes susvisées de la COMMUNE DE SAINT-LAURENT-DU-PONT et de M. et Mme Y... sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre afin de statuer par un seul et même arrêt ;

Sur la responsabilité et l'existence d'un préjudice indemnisable :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la salle des fêtes du Revol peut accueillir jusqu'à 456 personnes pour des spectacles et jusqu'à 683 personnes pour des soirées dansantes ; qu'elle est équipée d'une importante installation de sonorisation comportant notamment un amplificateur d'une puissance de 300 watts sans que, par conception, les émissions sonores vers l'extérieur soient suffisamment réduites ; qu'elle est utilisée régulièrement chaque fin de semaine, en particulier pour des soirées dansantes, notamment à l'occasion de manifestations privées telles que mariages ou bals " disco " ;

Considérant que, par elle-même, la présence d'un tel ouvrage dans la partie agglomérée d'une commune de moins de 5 000 habitants entraîne, pour les occupants des habitations les plus proches, des troubles de voisinage répétés, et, notamment, des nuisances sonores noctures, dues aux manifestations qui s'y déroulent et aux mouvements de véhicules qu'elles engendrent à des heures tardives ; que M. et Mme Y..., dont la propriété, acquise avant la construction de la nouvelle salle des fêtes, est située à une vingtaine de mètres de celle-ci, subissent ainsi des troubles de jouissance qui excèdent, quelles que soient les mesures de police prises pour en atténuer l'importance, les inconvénients inhérents au voisinage d'un ouvrage de cette nature ; que ces troubles de jouissance, ainsi que la perte de valeur vénale en résultant, présentent le caractère d'un préjudice anormal et spécial dont ils sont fondés à demander réparation à la COMMUNE DE SAINT-LAURENT-DU-PONT ;

Sur le montant de l'indemnité :

Considérant, en premier lieu, qu'il sera fait une juste appréciation des troubles de jouissance de toute nature résultant pour les époux Y... du fonctionnement de la salle des fêtes du Revol, en leur allouant de ce chef une indemnité de 50 000 francs ;

Considérant, en deuxième lieu, que le dossier ne comporte pas les éléments d'appréciation nécessaires pour l'évaluation du préjudice résultant de la perte de valeur vénale subie par la propriété des époux Y... du fait de la proximité de la nouvelle salle des fêtes ; qu'il y a lieu, dès lors, d'ordonner sur ce point une expertise aux fins précisées ci-après dans le dispositif ;

Sur les conclusions de la COMMUNE DE SAINT-LAURENT-DU- PONT tendant à la condamnation de M. et Mme Y... à des dommages et intérêts pour procédures abusives et vexatoires :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que ces conclusions doivent être rejetées ;
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE SAINT-LAURENT- DU-PONT est rejetée.
Article 2 : La somme que la COMMUNE DE SAINT-LAURENT- DU-PONT a été condamnée à payer à M. et Mme Y... par le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 26 juin 1996 est portée de trente mille francs (30 000 F) à cinquante mille francs (50 000 F).
Article 3 : Avant de statuer sur les conclusions de M. et Mme Y... tendant à la condamnation de la COMMUNE DE SAINT-LAURENT-DU-PONT à les indemniser de la perte de valeur vénale de leur propriété, il sera procédé à une expertise. L'expert, désigné par le président de la cour, aura pour misssion : 1°) de décrire l'évolution de l'environnement de la propriété avant et après la construction de la nouvelle salle des fêtes du Revol. 3°) de rechercher depuis quand et dans quelles conditions, des bâtiments industriels désaffectés situés à l'emplacement de la nouvelle salle du Revol ont été, avant la construction de celle-ci, utilisés comme salle des fêtes. 3°) d'évaluer, compte tenu notamment des informations ainsi recueillies, la perte de valeur vénale subie par la propriété des époux Y... à la suite de la construction de la nouvelle salle des fêtes du Revol.
Article 4 : L'expert prêtera serment par écrit avant le commencement de sa mission. Le rapport d'expertise, établi en cinq exemplaires, sera déposé au greffe de la cour dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'ordonnance du président de la cour portant désignation de l'expert.
Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 26 juin 1996 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 6 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas statué expressément par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance."

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