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[Interview] Comment Katherine Neville a écrit "Le feu sacré"

Par Bouquiner
[Interview] Comment Katherine Neville a écrit 20 ans après le huit, Katherine Neville revient avec « Le feu sacré ». Les personnages ont vieilli, Cat a eu une fille et une nouvelle partie commence. Le mystère du jeu de Montglane est une fois de plus au cœur de l’intrigue. Les blancs déclenchent une nouvelle lutte à mort contre les noirs afin de contrôler le pouvoir mystérieux de ce jeu ayant appartenu à Charlemagne.
Commencé il y a plus de 15 ans, l’écriture de ce livre est à elle seule un véritable roman. Katherine Neville le raconte en exclusivité à Bouquiner.net.



Bouquiner.net : A la fin du Huit on pensait que tout était fini. Qu’est ce qui a déclenché l’écriture de cette fabuleuse suite ?
Katherine Neville : Quand j’ai écris le Huit mon éditeur ne voulait pas que je fasse une suite. En effet à l’époque avec les grandes sagas, chaque tome se vendait moins bien que le précédent. Mais une fois que j'avais presque terminé le livre, mon éditeur,m’a finalement suggéré de prévoir une fin qui ouvre la porte à une suite, "on ne sait jamais".
Et puis bien plus tard, en 1992, c’était le 17 juillet, j’allais prendre le train pour Prague quand je suis tombée dans les escaliers de la gare et je me suis blessé.e Mon mari Karl, qui est médecin, m’a conseillé de ne pas rester assise pendant toute la durée du trajet qui durait presque 16 heures. Je me suis alors mise à marcher et faire des allers-retours dans le train, c’est comme ca que je me suis mise à imaginer les contours du « Feu Sacré ».
On était en 1992 et l’histoire du « Huit » se déroulait en 1972, donc je me suis dit que les personnages pouvaient avoir eu des enfants. Ces enfants ne sauraient absolument rien du jeu qui s’est déroulé 20 ans auparavant. Des personnages différents débarqueraient et leurs raconteraient ce qu’il s’est passé dans « Le Huit » mais d’un point de vue différent. Un peu comme revoir les mêmes scènes mais comme si on entrait par une autre porte pour voir des choses qu’on ignorait auparavant.
C’était formidable car je connaissais déjà les personnages et l’intrigue du roman au bout de seize heures. Je me souviens très bien de ce jour le 17 juillet car c’était le jour de la séparation de la Tchécoslovaquie et c’est le frère de Vaclav Avel en personne qui nous recevait. C’était une vraie effervescence dans la ville et tout le monde ne parlait que de la dissolution du pays. C’était incroyable de vivre ça et je pense que cela a influencé ma réflexion.
Je trouvais passionnant d’écrire « Le feu Sacré » mais en même temps il y a des choses qui me ralentissaient. J’ai revu un roman précédent « Risque calculé », puis j’ai publié le « Cercle magique ». C’est comme si le destin me disait d’attendre avant de commencer la rédaction. Et finalement quand j’ai commencé à écrire « Le feu sacré » il y a eu les évènements du 11 septembre et plus particulièrement l’avion qui a percuté le Pentagone qui se trouvait…. en face de mon appartement ! Je me suis dit que ca devait être lié à ce que j’écrivais. J’ai fait une pause et je me suis dit que je n’allais pas reprendre avant d’avoir un peu plus de perspectives. C’était comme d’être dans l’œil du cyclone. On voit qu’il y a un cyclone mais on n’a pas de recul. J’ai donc arrêté pendant deux ans.
Quand je m’y suis remis, j’ai écris les trois premiers chapitre et j’ai vendu le livre à mon éditeur. Très rapidement j’ais écris plus de la moitié de l’histoire. Il faut dire qu’à partir de là j’avais un délai car on voulait le sortir pour le 20ème anniversaire du Huit. Et là je reçois un mail d’un lecteur qui me disait qu’il était au Koweït quand il avait lu mon livre, après que la guerre ait commencé en Irak. Il me raconte que quand il était à Bagdad il s’est pris de passion pour les échecs grâce à la lecture du Huit. Il dit vouloir m’inviter à diner et me faire visiter le ministère des finances où il travaillait ainsi que les tunnels secret sous le bâtiment.
J’ai alors pensé que c’était quelqu’un qui voulait m’arnaquer pour que je donne mon numéro de compte. Je l’ai remercié pour l’intérêt qu’il portait à mon écriture et de sa proposition mais que j’étais très occupé pour le moment et que je n’écrivais pas sur l’argent ou la finance.
Trois mois plus tard, je reçois un autre email où il me demande quand il pourrait m’inviter à déjeuner. Comme je devais participer à une table ronde à Washington sur l’économie, j’ai finalement accepté cette invitation de ce lecteur qui était en fait le chef de cabinet du ministre des finances. Il m’a fait visiter le trésor américain ainsi que le passage secret avec la maison blanche construit dans les années 30-40.
On se met à parler de l’Irak et là il me dit qu’il était la deuxième personne à rentrer dans Bagdad ! Je lui demande alors qui était la première ? Sa patronne de l’époque me répond-il, Condoleezza Rice! Il m’apprend qu’il était un expert en communication et que son job était de s’occuper du protocole. Il a ainsi appris plein d’histoire sur Bagdad qu’il m’a raconté.
A la fin du huit on apprend que l’échiquier ayant appartenu à Charlemagne a été créé à Bagdad. C’est pour ca qu’il voulait me rencontrer, il était sur que cela allait m’intéresser. Il m’a raconté tout ce que je devais savoir sur Bagdad. Je me rendais compte que j’essayais d’écrire ce livre comme une continuation du Grand jeu qui se déroule dans le Huit, alors qu’en fait l’histoire devait se concentrer sur l’échiquier, sa création, pourquoi est ce que charlemagne s’est retrouvé avec cet échiquier entre les mains, comment il est arrivé en France, etc.
Puis Je me suis rendu compte que la période pendant laquelle se passait l’histoire se passait dans les quinze premiers jours d’avril 2003. Je suis donc allé consulter les archives du Washington post pour savoir ce que disais le journal le jour ou je fais rentrer mon héroïne à Washington. Je me suis mise à la recherche des archives et quand j’ai trouvé la semaine le journal du lundi en question … avait disparu. On a quand même réussi à le retrouver. Je regarde enfin le titre de une, et là je n’en reviens vraiment pas : ils avaient titré : « Les troupes entre dans Bagdad ». Exactement le même que j’ai mis en une du post dans le roman !
Quand les choses se passent comme ca, je me dis qu’il faut avoir confiance dans le livre.

Bouquiner.net : On retrouve beaucoup de vous dans Cat et dans Xie, les deux héroines ?

Katherine Neville : J’essaye toujours que mes personnages centraux aient les mêmes centres d’intérêt que moi et que je sache faire ce qu’ils font. Comme ca je sens que j’ai le droit d’écrire à la première personne. Avec ce livre ca é été difficile parce que Xie est une prodige des échecs et moi je ne l’ai jamais été. La chose qui m’a aidé dans le personnage est la partie culinaire. J’adore faire la cuisine. Mon mari et mes voisins étaient très content parce que j’ai essayé toutes les recettes dont je parle dans ce livre.
Pourquoi les échecs ?
J’ai toujours adoré le symbolisme des échecs. J’ai écris « Le huit » avec la guerre froide en tête, et à l’époque dans les médias on comparait cela aux échecs. Et puis lorsque j’ai habité à Alger, la crise de l’OPEP m’a vraiment fait pensé à une partie d’échec, celui qui a gagné est celui qui a sorti un coup que personne n’avait vu venir.
Il y a plusieurs niveaux de lecture ?
Oui j’ai voulu créer un environnement un peu comme un tableau de Dali. Au premier coup d’œil on voit un quelque chose et quand on recule on voit autre chose.
Est-ce que vous pensez à un numero 3.
C’est la première fois que oui … ces personnages là je les aime beaucoup. J’ai suffisamment de matériel historique pour en faire bien plus.

D’où vous vient cette passion pour la France ?

Ce n’est pas tant la France que les relations étroites qu’il y a entre la France et les Etats-Unis. La France a aidé l’Amérique dès le début de son histoire. Sans la France l’Amérique n’aurait pas été libre.
Et je vis prêt de là où habitais Thomas Jefferson qui a été un amoureux de la France après y avoir été ambassadeur. …Il y a tellement de pont entre les USA et la France !
Enfin j’habite aujourd’hui une maison où a séjourné Lafayette lors de son dernier voyage chez nous.
Justement, que trouve-t-on chez vous, dans votre Bibliothèque ?
Quand j’ai quitté la Californie j’avais plus de 6000 livres… avant je les organisais par couleurs. J’ai beaucoup de choses différentes, mais ma partie préférée est celle consacrée aux symboles.
Quel est votre auteur préféré ?
J’ai de nombreux écrivains favoris. J’aime vraiment beaucoup les histoires d’aventures, les vieux mythes. Le seul écrivain dont j’ai la photo dans mon bureau, c’est Goethe. C’est ma premier grande influence par rapport à ce que j’aime écrire. Sinon j’aime beaucoup Voltaire ou Dumas.
J’ai du reste acheté le dernier livre de Dumas dans sa première édition, relié en cuire, qui s’appelle « Le grand dictionnaire de cuisine ».
Une adaptation du « Huit » et du « Feu Sacré » au cinéma est-elle prévue ?
Ca va se faire…. Jusqu’à présent, à chaque fois qu’il y a eu un projet d’adaptation les producteurs ont voulu changer trop de chose, comme par exemple supprimer la révolution française…
J’étais très frustré. J’ai dis à mon agent littéraire qu’on avait qu’à le faire nous même. On va mêler les deux livres. Je veux que les personnages français soient joués par des français alors je regarde la télé tous les soirs pour connaitre les acteurs français du moment. J’aime beaucoup Jean Dujardin. Si vous avez des idées vous pouvez me les envoyer ! (rire)
Vous avez déjà en tête votre prochain roman ?
Ho oui, l’histoire se déroulera dans le milieu de la peinture et des artistes du 17eme siècle. Je connais bien ce domaine car j’ai été peintre à une époque, c’est comme ca que je gagnais ma vie, je les ai tous étudiés….

Le Feu sacré
Katherine Neville

Ed. Le cherche midi - 21,85 €

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