Cet essai de Régine Pernoud nous propose d'en finir avec nos idées préconçues sur le Moyen Âge, époque qu'on qualifie
volontiers de barbare et d'obscurantiste. Dans une série de chapitres incisifs, l'auteur part de nos préjugés, et rétablit chaque fois la vérité historique sur de nombreux points : le rôle des
femmes, l'art, l'esclavage, le pouvoir royal, la répression de l'hérétisme. Elle met en évidence le recul qu'a constitué, à de nombreux égards, la Renaissance. Cette période, qui met fin au Moyen
Âge, se caractérise par un retour à l'Antiquité classique, du point de vue artistique, juridique, et politique. La Renaissance n'est pas, comme on le croit souvent, une période de renouveau
culturel et de plus grande liberté par rapport au Moyen Âge. Tout au contraire, l'imitation servile de l'art gréco-romain a mené à l'académisme, d'où une certaine uniformisation des oeuvres. Le
droit romain, dont se sont inspirés les décideurs, a favorisé l'accroissement du pouvoir des monarques, allant de pair avec la confusion des pouvoirs. C'est
à cette période, non au Moyen Âge, que le fanatisme religieux s'est accru, que les
droits des femmes se sont trouvés réduits, tandis que l'esclavage (qui, contrairement au servage médiéval, dénie à l'autre le statut de personne) a été rétabli, alors qu'il n'avait plus cours
depuis l'Antiquité... D'où nous viennent alors ces idées reçues sur le Moyen Âge ? C'est l'âge classique qui a jeté le discrédit sur une époque s'étendant sur plus de mille ans, et le XIXe siècle
a continué sur cette lancée. Régine Pernoud, mettant en lumière la richesse et la diversité de l'ère médiévale, montre que cette période a été mal nommée, et qu'il faut cesser de la considérer
comme une ère intermédiaire entre l'Antiquité et les Temps modernes. De par son hétérogénéité, d'ailleurs, il conviendrait de la diviser : on peut distinguer, par exemple, la période
franque de l'époque féodale. Dans cet essai, bien écrit et abordable, l'auteur transmet sa passion pour l'étude historique, et plaide pour une recherche rigoureuse et débarrassée des idées reçues
et des dogmes (rappelons que ce livre a été initialement publié en 1975, alors que les théories marxistes avaient encore le vent en poupe...)