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Désespoir syndical

Publié le 26 août 2009 par Hmoreigne

 C’est sans doute la vraie surprise de cet été. Les organisations syndicales, déjà fragiles, loin d’être requinquées par la violence sociale de la crise économique se trouvent clouées au pilori accusées au mieux d’être aux abonnés absents, au pire de collusion avec les dirigeants de tous poils. La colère qui gagne les salariés n’épargne aucun syndicat. Si Bernard Thibault a essuyé les plâtres, ses collègues se trouvent bien malgré eux dans la même charrette.

Expression de colère froide ce matin sur les ondes de France Inter. Invité du 7-10, Jean-Claude Mailly le secrétaire général de FO se fait tancer par les auditeurs pour le manque de combativité de sa centrale. “Vous êtes en dessous de tout”, “Vous êtes partis avec Nicolas Sarkozy en vacances au Cap Négre ?”.

Les attaques dépassent la seule personne du leader de FO. Nombre de salariés s’estiment livrés à eux-mêmes, trahis par les syndicats. Au détour d’une phrase JC Mailly lâche ” le paysage syndical, c’est ce que les travailleurs en font“. Une formule dans l’esprit “avant de vous demander ce que les syndicats peuvent faire pour vous demandez-vous ce que vous avez fait pour les syndicats” qui refléte bien l’état d’esprit de nombre de responsables syndicaux.Seuls 8 % des salariés sont effectivement encartés.

Le décalage avec la base est total. “A Paris” on a trop voulu croire que les actions de terrains les plus radicales étaient isolées. En fait elles sont la partie immergée d’un dangereux iceberg.

La situation est inquiétante. Le risque d’explosion sociale avancé il y a quelques mois notamment par Dominique de Villepin avait suscité plus d’un sourire condescendant. Pourtant aujourd’hui le mécanisme de la machine infernale semble bien enclenché.

Les réponses syndicales et politiques à l’ampleur de la crise (600 000 chômeurs supplémentaires attendus d’ici la fin de l’année) demeurent indigentes. Avec brio Edwy Plenel a relevé dans Médiapart l’absence de la gauche pendant un été social meurtrier.

Précédent les élites le salariat a fait sienne la grille de lecture marxiste , en constatant simplement “les ravages d’un capitalisme saisi par la finance, destructeur de richesses collectives par obsession de fortunes privées” comme l’écrit l’ancien rédacteur en chef du Monde.

Face à sa paupérisation, les classes moyennes entendent bien user de leur droit de résistance à une oppression économique bien réelle.

Occulté ces dernières années, le conflit de classes est en train de renaître et dans son cortége, le syndicalisme de classe. Alors que la gauche reste obsédée à travers la question des primaires par l’élection présidentielle, l’électorat populaire attend une réponse sociale. La sévérité des jugements émis sur les leaders syndicaux témoigne du refus de la culture du compromis aujourd’hui perçue parfois caricaturalement comme celle de la compromission.

Alimenté par le désespoir et la révolte contre des injustices devenues trop flagrantes, le temps est à la construction de rapports de force . Dans ce contexte, “une gauche de négation qui se contente de ne pas être de droite ou de l’être avec modération”, comme l’écrit Daniel Bensaïd, apparaît difficilement audible.

Xavier Mathieu , le délégué CGT de Continental Clairoix a donné le la.Par radio interposée le syndicaliste de terrain a exprimé tout haut ce que beaucoup de salariés pensent tout bas, “La CGT, on les a pas vus. Les Thibault et compagnie, c’est juste bon qu’à frayer avec le gouvernement, à calmer les bases. Ils servent juste qu’à ça, toute cette racaille“. Par la suite, le responsable cégétiste de Clairoix avait maintenu ses propos, retirant simplement le terme de “racaille”, “trop sarkozyste” selon lui, au profit de celui de “parasites”.

Le message a été passé. Reste à savoir s’il sera entendu.

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