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La chambre du fils

Par Grocher

Nanni Moretti.

Vidéo

Giovani a une existence heureuse malgré son délicat métier de psychanalyste. Il vit avec sa charmante épouse Paola et ses deux enfants adolescents, Irene et Andrea. Giovani "absorbe", par la passion qu'il porte à sa fonction, les psychoses et les graves problèmes de santé de ses patients. Afin de se changer les idées et remédier à son excès de stress, il s'impose une discipline de vie notamment en s'évadant pendant ses quelques rares moments de liberté vers le sport et surtout le jogging qu'il effectue en compagnie de son fils Andrea. Il s'agit pour tous les deux, au travers de ce rituel, d'un moment d'échange privilégié . Un dimanche matin, le père et son fils sont fins prêts  pour leur jogging habituel lorsque Giovani est appelé d'urgence  auprès d'un patient. Afin d'occuper sa matinée Andrea part avec quelques copains faire de la plongée sous-marine. Ce fâcheux contre-temps va alors engendrer un véritable drame, car l'adolescent ne reviendra pas de sa sortie en mer.

 Giuseppe Sanfelice, Nanni Moretti, Nanni Moretti dans La Chambre du fils (Photo Christophe L)

 Dans ce film dur et touchant au possible, le réalisateur-interprète Nanni Moretti préfère analyser avec beaucoup de réalisme les difficultés d'exister et de se remettre d' un tel évènement plutôt que de s'appesantir sur le drame qui touche la famille. En effet ce cruel évènement complètement inattendu provoque une atmosphère qui va devenir de plus en plus oppressante entre Paloa et Giovani. Celui-ci se culpabilise, devient agressif notamment envers le patient auteur de l'appel fatal. Il s'isole de tous, son sacerdoce ne compte plus et le dégoûte même. Il voit sa vie tout à coup anéantie. Paola, minée elle aussi  par le chagrin, s'éloigne de son mari et ne cache pas sa rancoeur vis à vis de lui. Leur fille Irene,sans réconfort et voguant comme une âme en peine en plein milieu de ce terrible conflit, se renferme dans un profond mutisme. Avec l'arrivée de ce drame, c'est le moment où ceux qui restent font le bilan de leur vie et le négative. Certaines scènes émaillant ce film sont d'ailleurs déchirantes,  notamment lorsque Paola se recueille dans l'intimité d'une chambre funéraire devant le cercueil de son fils puis éclate en sanglots avant de s'isoler alors que  Giovani, effondré, tente de rester digne. On pourrait croire à ce moment que tout est fini pour cette famille désunie. C'est alors que de la manière la plus simple, grâce à l'amour que porte Irene pour un jeune homme, le soleil petit à petit va se lever, les nuages s'éloigner.  Tous vont se raccrocher à la vie. L'unité familiale va pouvoir maintenant se ressouder par petites touches et le sourire revenir timidement sur les visages. La vie reprend le dessus par le biais des petites joies que l'existence continue, malgré tout, à leur offrir. La guérison est alors toute proche. 

 Laura Morante, Nanni Moretti dans La Chambre du fils (Photo Christophe L)

 J'ai beaucoup de tendresse pour ce merveilleux film de Nanni Moretti pour lequel je suis très attaché et qui à mon avis est le plus abouti.  On aurait pu s'attendre avec ce type de sujet à  un film du genre mélo, moraliste et cherchant à tirer les larmes des yeux. Heureusement ces poncifs ont été évités et nous assistons  à une oeuvre d'un réalisme fabuleux, traitée avec  une extrême sensibilité, beaucoup de pudeur et de retenue. Il faut louer les interprètes, Nanni Moretti bien sûr et Laura Morante, pour leur sensibilité et leur naturel amenant une bonne dose d'émotion aux spectateurs. Ils nous font entrer au coeur de leur couple déchiré. La lumière revient par l'intermédiaire de Jasmine Trinca, elle aussi  remarquable dans son rôle d'adolescente torturée puis enfin rayonnante de bonheur à l'éveil de sa vie amoureuse. Quant aux apparitions de Giuseppe Sanfelice, ce fils par qui  involontairement le drame arrive, elles nous bouleversent. Cette oeuvre est assurément du grand art!

La Chambre du fils (Photo)

Ce film est plein de petits détails tous simples prouvant le don exceptionnel du réalisateur pour l'amour et la tendresse qu'il porte aux autres . Il nous décrit tout simplement une tranche de vie dans laquelle le spectateur se sent impliqué. Les acteurs,eux, n'interprètent pas mais vivent ce film tant ils semblent  imprégnés du drame. Remarquable et bouleversant!

Ce film a obtenu la Palme d'or du Festival de Cannes 2001.


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