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Un faux prête (qu’aux riches…)

Publié le 13 septembre 2009 par Cdsonline

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Une sollicitation que je ne pouvais pas décliner… Bon ben voilà, j’en sors. Pas fâché d’en sortir d’ailleurs. Dure au moins quarante minutes de trop ce film… Voici donc mes impressions à chaud, vous l’aurez voulu ! :-p
Passés les poncifs d’usage permettant de faire l’impasse sur le sens : quel jeu d’acteurs! quel réalisateur! quelle qualité d’image! blablabla… reste tout de même la question centrale : quelle prophétie?

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Un enfant tombé en enfer va devenir un diable comme les autres? Plus attachant, plus rusé, mieux adapté? La belle affaire.
Oui, c’est vrai, en enfer ne peuvent naître que des diablotins.
Mais ça, Lars von Trier dans Dogville ne l’avait-il pas déjà montré de façon indépassable, véritablement artistique, grâce à une réalisation autrement plus imaginative et subversive, sans rester enfermé dans le sombre constat?
Personnellement, je n’ai vraiment “marché” (j’appelle “marché” avoir été “dans le film” et non pas “dans une salle de cinéma en train de regarder un film“) que dans deux scènes, les deux scènes de meurtre… Fort bien maîtrisées, faut bien reconnaître, Scorcese n’aurait pas fait mieux. Pour le reste, ce Prophète m’a laissé aussi froid et distancié que le réalisateur lui-même, dans son regard d’entomologiste penché sur un univers carcéral totalement étranger à lui-même, comme si l’enfermement ne pouvait être… qu’extérieur! (rappelons-nous le mot d’esprit de Sam Goldwin, je crois : “Gentlemen, include me out!“)

Il ne suffit pas de piquer les daims traversant la route du “True story” de Lynch pour faire d’Un prophète une “histoire vraie“, et il ne suffit pas de copier-coller la faille psychotique magistralement mise en scène dans “Lost Highway” pour hisser ce Prophète à une portée métaphysique convaincante.
La métaphysique n’est pas la religion. La métaphysique — dont l’œuvre d’art cinématographique est la dimension privilégiée — consiste essentiellement en ceci : prendre acte qu’avant d’appartenir à n’importe quel ordre que ce soit (y compris biologique) l’homme appartient en priorité à l’ordre du langage. Sujet de langage.

Le langage cinématographique n’est-il pas le dernier bastion d’une expression artistique ET populaire digne de ce nom?
François Truffaut : “Il y a deux sortes de metteurs en scène : ceux qui tiennent compte du public en concevant puis en réalisant leurs films, et ceux qui n’en tiennent pas compte. Pour les premiers, le cinéma est un art du spectacle, pour les seconds une aventure individuelle. Il n’y a pas à préférer ceux-ci ou ceux-là, c’est ainsi.
Certes. Certes… Tarkovski le dit d’une autre manière, moins politically correct .
Bien envie de me refaire Stalker du coup. Ou un bon p’tit Sergio Leone de derrière les fagots…
Tiens, et pourquoi pas… Les tontons flingueurs !?!

PS : Vient de me tomber sous la main un extrait de L’image-temps (1985) “L’homme est dans le monde comme dans une situation optique et sonore pure. La réaction dont l’homme est dépossédé ne peut être remplacée que par la croyance. Seule la croyance au monde peut relier l’homme à ce qu’il voit et entend. Il faut que le cinéma filme, non pas le monde, mais la croyance à ce monde, notre seul lien. On s’est souvent interrogé sur la nature de l’illusion cinématographique. Nous redonner croyance au monde, tel est le pouvoir du cinéma moderne (quand il cesse d’être mauvais).
Gilles Deleuze


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