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L'honneur perdu de l'antifascisme

Publié le 08 octobre 2009 par Roman Bernard
Philippe Bilger est en forme. Après avoir qualifié l'eschatologiste millénariste Nicolas Hulot de « Savonarole du pauvre », il demande aujourd'hui au ministre de la Culture Frédéric Mitterrand de démissionner, dans un excellent article dont le titre rappelle L'Honneur perdu de Katharina Blum. Pour le célèbre avocat général à la cour d'appel de Paris, que j'ai eu l'honneur d'interviewer en avril dernier, « la ficelle est un peu grosse. [Elle] est usée jusqu'à la corde, qui consiste, au lieu de répliquer sur le fond, à jouer de l'indignation éthique et politique comme si on avait légitimité, plus que ses contradicteurs, pour le faire. » Cette ficelle, c'est d'estimer qu'être traité de pédophile par Marine Le Pen est un « honneur », ce qui est pourtant, de son propre aveu, la vérité (La mauvaise vie, 2005).
De même, on peut s'étonner que du fameux face-à-face télévisuel entre François Bayrou et Daniel Cohn-Bendit lors de la campagne électorale européenne, en juin dernier, ce soit ce dernier qui est sorti magnifié des accusations de pédophilie - tout autant fondées - lancées par le premier qui, pour une fois, avait fait preuve de courage.
« Frédéric Mitterrand évoque son "honneur" à bon compte. Il devrait trouver mieux. Car le Front national est vraiment usé à force d'avoir trop servi. Si son honneur de ministre, c'était tout simplement de partir ? », conclut ainsi Philippe Bilger.
Cette affaire ne peut, toutes proportions gardées, manquer de me rappeler celle autrement plus dramatique du sang contaminé, dans les années 1980. Le journal d'extrême-droite Minute avait contribué à révéler le scandale, mais, bien sûr, ses allégations ne pouvaient être que fausses, puisque émanant de l'extrême-droite.
Il avait fallu attendre que L'Express se saisisse du dossier pour qu'enfin l'affaire éclate, comme le rappelait l'excellent Jean-Pierre Tailleur dans son livre Bévues de presse, déconstruction salutaire du maljournalisme à la française.
Encore aujourd'hui, mon commentateur Philippe Arnaud, bien d'extrême-gauche lui, peut écrire sans rire : « Si Le Pen disait aimer un plat que j’aime, je cesserais d’en manger, s’il aimait un auteur que j’affectionne, je cesserais de le lire, s’il trouvait des qualités à ma femme, j’en divorcerais, et s’il m’en trouvait, j’irais me pendre… » Il faudra pourtant bien finir par se demander quel est le coût humain du risible cordon sanitaire mis en place autour de l'extrême-droite depuis les années 1980. Des transfusés contaminés, des dignités d'enfants bafouées, voilà où mène l'hygiénisme moral des bien-pensants.
Les mêmes qui, il n'y a pas si longtemps, expliquaient les vertus de la pédophilie :

Gabriel Matzneff : Les moins de 16 ans
par FrenchCarcan

Hitler étant mort, il va être de plus en plus difficile d'invoquer l'antifascisme à tout propos pour se dédouaner de ses propres crimes.
Roman Bernard

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