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Fichiers policiers, quelle légitimité ?

Publié le 20 octobre 2009 par Forrestgump54

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Le ministre de l’Intérieur a lancé, par décret, deux nouvelles bases de données qui ressemblent furieusement aux fichiers Edvige et Edvirsp, abandonnés il y a un, après une forte mobilisation citoyenne. Existe-t-il des fichiers légitimes ? C’"est la question du jour.

Edvige, la petite fille de Big Brother, est ressuscitée

Depuis l’université d’été de l’UMP, nous savions que le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, ne manquait pas d’humour. Il vient d’apporter une preuve supplémentaire de son esprit taquin : il a profité de la Sainte Edwige pour promulguer deux décrets créant deux nouvelles « bases de données » destinées à renforcer les moyens d’enquête de la police. Le ministre avait pris la spécieuse précaution de dire il y a peu qu’il n’avait pas l’intention de déterrer le fichier Edvige, victime de la mobilisation citoyenne à l’automne 2008. En fait, les bases de données d’Hortefeux sont les jumelles d’Edvige et de son double mal cloné Edvirsp. Saisissant le prétexte des incidents de Poitiers, le ministre a sorti de sa manche des textes dont la lettre, à défaut de l’esprit, s’attachent à se différencier des fichiers originels.

Du fichier à la base de données

La première base de données, consacrée à la « prévention des atteintes à la sécurité publique » est « ciblée sur les bandes, les hooligans et les groupuscules ». La seconde, relative aux « enquêtes administratives liées à la sécurité publique », porte sur les postulants à un emploi dans la police, la gendarmerie ou des secteurs sensibles (aéroports, les centrales nucléaires…) Echaudé par ses premiers échecs, le gouvernement a pris quelques précautions. Ces deux textes ne recensent aucune personnalité, ne comportent pas de références explicites à des opinions, à des origines ethniques, à la santé ou aux orientations sexuelles et ils ont reçu le feu vert de la Cnil et du Conseil d’Etat. Mais rentre par la fenêtre ce qu’on a fait sortir par la porte : le premier fichier comporte les « signes physiques particuliers et objectifs », recense, à titre dérogatoire, l’« origine géographique ou appartenance à un même quartier »,et les « activités politiques, philosophiques, religieuses, syndicales ». Magnanime, ces bases de données fichent les mineurs, dès 13 ans pour la première, dès 16 ans pour la seconde, mais avec un « droit à l’oubli » trois ans après « le dernier événement ayant donné lieu à l’enregistrement ».

Un accès contrôlé mais pas si limité

Les décrets stipulent que l’accès aux bases sera « limité, contrôlé et archivé ». Seuls les policiers relevant de la Sous-direction de l’information générale (Sdige) et ceux des services de la préfecture de police en charge du renseignement, dûment désignés et habilités par le directeur central de la Sécurité publique, par le directeur départemental de la Sécurité publique et par le préfet de police, pourront accéder et alimenter le fichier. Mais comme pour les fichiers précédents, devenus des mastodontes avec le temps, les exceptions sont prévues. Les policiers chargés de la prévention des violences urbaines et des phénomènes de bande pourront également y accéder « pour les seuls besoins de leur mission ». Au cas par cas, les autres policiers et les gendarmes y auront accès à la suite d’une « demande expresse de leur chef de service, précisant l’identité du consultant, l’objet et les motifs de la consultation ».

Un passage en force

Les deux décrets ont été promulgués un dimanche aux aurores alors qu’à l’Assemblée nationale, depuis des mois, une proposition de loi garantissant les libertés individuelles, issue de travaux parlementaires, est prête à l’emploi. Le parlement ne sera pas consulté. Le collectif Non à Edvige n’ pas l’intention d’attendre qu’on le consulte pour agir.


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