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Sommet de Copenhague: la réponse technologique est-elle suffisante ?

Publié le 22 octobre 2009 par Jblully

Sommet de Copenhague: la réponse technologique est-elle suffisante ?

Sommet de Copenhague: la réponse technologique est-elle suffisante ?

Le prochain sommet de Copenhague sur le changement climatique a pour ambition de prolonger et d’approfondir les engagements pris dans le cadre du protocole de Kyoto.

Mais l’enjeu essentiel pourrait se trouver ailleurs. Avec le retour dans le jeu diplomatique international des Etats-Unis et l’entrée en force de la Chine, voire de l’Inde, la position européenne, jusqu’alors dominante, risque d’être fortement contestée. Les Etats-Unis viennent, en effet, avec un horizon sensiblement plus long que celui des européens et surtout des priorités d’actions radicalement différentes. D’un strict point de vue économique, Copenhague pourrait consacrer l’ouverture d’une nouvelle ère, celle des défis technologiques à relever pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. C’est dans une course au leadership sur les technologies vertes que s’engagent ainsi américains et chinois. Pour autant, la réponse technologique épuise-t-elle le débat ? Symétriquement, les européens qui s’affirment comme leaders dans les négociations sur le climat depuis 10 ans prennent-ils suffisamment en compte la dimension technologique ?
Le sommet de Copenhague doit conduire à un accord international faisant suite au protocole de Kyoto. Force est de constater que nous sommes à J-46 du sommet et que la confusion au niveau diplomatique est de plus en plus forte, très loin d’une vision partagée sur les objectifs à atteindre. A ceci s’ajoute des constats contradictoires de la part de la communauté scientifique sur l’ampleur du réchauffement climatique.

Si les engagements en termes de réduction des gaz à effet de serre (GES) sont essentiels, la question majeure reste : comment atteindre ces objectifs ?

L’élection du Président Obama a permis le retour des Etats-Unis dans les négociations internationales, pour autant américains et européens sont loin de partager une vision commune. En particulier, les américains privilégient une trajectoire de long terme avec une diminution de 1% des GES en 2020 par rapport à 1990 et de 68% en 2050.

Les américains justifient cette trajectoire de long terme en grande partie par leur choix quant au moyens pour atteindre ces objectifs. Plutôt que des politiques visant à modifier les comportements et les modes de consommation, les Etats-Unis préfèrent l’approche « technologique ». En particulier, si la technologie permettait de mieux maîtriser les effets négatifs du changement climatique, la prise d’engagements fermes seraient moins urgentes.

On peut légitimement s’interroger sur ce positionnement qui remettrait en cause la nécessité d’engagements à l’échelon mondial. Des objectifs stricts et des engagements formels des pays les plus pollueurs sont considérés par les économistes comme un signal indispensable à adresser aux décideurs politiques et aux entreprises pour qu’il s’engagent dans des investissements de long terme.

Il apparaît souhaitable que réponse technologique et réponse diplomatique se mettent en place simultanément.

Les Etats-Unis ne sont pas les seuls à faire le choix de la réponse technologique, la Chine s’est également engagée dans cette bataille. (voir papier précédent Les technologies de rupture qui vont changer le monde). Dans une lecture rapide on pourrait croire que les Etats-Unis, en raison de la position de l’administration Bush, ont pris un retard considérable. Pourtant en parallèle des accords internationaux, le monde économique s’est depuis longtemps intéressé à la question. L’argument mis en avant est la volonté de réconcilier technologies vertes et croissance économique, s’appuyant sur l’hypothèse développée par l’économiste Porter selon laquelle les contraintes liées à la prévention de la pollution peuvent être génératrices de bénéfices sociaux et de gains de productivités pour les entreprises. Cependant cette théorie ne fait pas l’unanimité auprès des économistes. (voir “Changement climatique : quels enjeux économiques pour les entreprises ?” par Stéfan Ambec Ecole d’Economie de Toulouse et Francesco Ricci Université de Poitiers et Ecole d’Economie de Toulouse, Prospective et Entreprise n°8 Septembre 2009, une publication de la CCIP) .

Dans certains domaines, comme l’éolien la Chine a engagé des investissements massifs, en 2007 et en 2008 elle a ainsi augmenté sa capacité de production de 200%. Elle prévoit de poursuivre cette croissance sur un rythme similaire au cours des prochaines années. Elle affiche également des ambitions dans la production de palles d’éoliennes pour son marché mais également pour le marché japonais et anglais et a pour ambition d’attaquer le marché américain.

Face aux ambitions affichées par les Etats-Unis et la Chine, l’Europe et en particulier, la France dispose d’un certain nombre d’atouts. La priorité publique accordée au nucléaire depuis trois décennies a fait de la France un leader incontesté dans ce domaine mais a conduit à un moindre développement d’énergies alternatives comme le solaire ou l’éolien. D’un strict point de vue de la lutte contre le réchauffement climatique, il est incontestable que ce choix a permis de réduire les émissions de gaz à effet de serre, plaçant la France en bonne position dans les comparaisons internationales. Cependant le nucléaire n’en reste pas moins une technologie soumise à de nombreuses controverses : gestion des risques, gestion des déchets, prolifération à des fins militaires, épuisement des ressources d’uranium) Pourtant, c’est, de fait, une option énergétique qui est de plus en plus considérée comme une réponse technologique de premier plan y compris par certains écologistes. Reste que la bataille économique et technologique ne peut se gagner sur une seule technologie, et la France, qui dispose de leaders mondiaux dans les domaines de l’eau, des déchets et de l’électricité, est dans une position favorable pour en tirer profit.

Aujourd’hui la nouvelle administration Obama affiche une ambition politique en matière de lutte contre le changement climatique qui interpelle par sa détermination à vouloir prendre le leadership économique et technologique. Les européens qui ont acquis un certain leadership diplomatique sur le sujet ne doivent pas passer à côté de la bataille technologique et économique qui se joue à l’échelle mondiale. Les engagements pris à Copenhague constitueront un signal fort pour l’ensemble des acteurs économiques (entreprises, investisseurs et marchés financiers) en donnant un cadre stable pour la prise de décisions. Des engagements formels des pays devraient permettre d’augmenter massivement les investissements tant publics que privés dans ce secteur et pourrait avoir un impact sur la croissance économique des pays qui auront développé une capacité d’innovation et de production dans les technologies vertes.

Mais il ne faut pas oublier que les technologies ne seront pas en mesure de résoudre l’ensemble des problèmes liés au changement climatique. L’enthousiasme, notamment américain pour les technologies, ne doit pas faire oublier qu’une réponse efficace consistera d’abord à économiser les énergies et donc à changer les comportements des consommateurs et des entreprises.
(pour une version plus détaillée)


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