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Pluralité dissonante: Astérix et le Parti Socialix

Par Sylvainrakotoarison

Astérix, le personnage créé par Goscinny et Uderzo, a cinquante ans ce 29 octobre 2009. Il est apparu dans la revue "Pilote". Un contexte qui fait penser un peu au Parti socialiste en France, à la différence près qu’il n’y a pas plus de… pilote.

Pluralité dissonante

Nous sommes en 51 après Charles De Gaulle ; toute la France est occupée par la VeRépublique… Toute ? Non ! Car un parti peuplé d’irréductibles carriéristes résiste encore et toujours à la logique majoritaire. Et la vie n’est pas facile pour les garnisons de militants socialistes des camps retranchés de Ségobarnum, Martinaubrum, Deskabankum et Hamonpetibonum...


Le Parti socialiste a un handicap fort depuis quelques temps, c’est son unité. En fait, si on regarde historiquement, à part la période François Mitterrand (1971-1981) qui n’était même pas issue des socialistes d’origine, le Parti socialiste n’a jamais été uni et n’a jamais vraiment su compter. Et parallèlement, il n’a jamais été vraiment au pouvoir, ou, s’il l’a été, du moins, de façon très sporadique.


Reprenons très succinctement.
Un parti sporadiquement au pouvoir


Jean Jaurès n’a pas eu le temps, car assassiné. Léon Blum a réussi en 1936 avec le Front populaire (il est revenu deux fois encore, en 1938 et 1946) mais de façon si furtive qu’il a gravé cette singularité dans les mémoires de la gauche. Grâce à lui, il y a quelques acquis sociaux (les congés payés entre autres) mais pas plus nombreux que ce que De Gaulle a fait à la Libération ; en revanche, à son passif, son incapacité à regarder autour de lui, trop égocentré sur ses dogmes : l’Allemagne, nazie depuis trois ans, et l’Espagne, en guerre civile et les républicains sans aide gouvernementale française.


On trouvera bien en Guy Mollet aussi un passage éclair à Matignon dans les multiples et complexes combinaisons de la IVeRépublique, mais dans une erreur de casting qui aurait dû hisser Pierre Mendès France, réelle âme du Front républicain.


Et puis le trou… de vingt-trois ans, jusqu’à l’arrivée au pouvoir de François Mitterrand. Deux fois élus au suffrage universel direct. Une première (Jacques Chirac est le second dans ce cas-là), et un record de longévité (quatorze ans désormais imbattables avec l’institution du quinquennat et la limitation à deux mandats successifs votée le 21 juillet 2008).


Mitterrand élu, le PS fut de nouveau désuni. Il n’a pas fallu attendre longtemps, dès la campagne des européennes de juin 1984 puis celle des législatives de mars 1986, pour voir apparaître la rivalité entre Fabius et Jospin, qui culmina au congrès de Rennes de 1990.


François Mitterrand a été le premier et pour l’instant le seul socialiste élu à l’Élysée (à l’exception de Vincent Auriol élu par les parlementaires et qui n’avait aucun pouvoir dans d’autres institutions). Ce qui a permis aux socialistes deux victoires législatives consécutives à ses victoires présidentielles (en juin 1981 et juin 1988).


Mais la victoire des socialistes en juin 1997 a fait croire que la malédiction antisocialiste était terminée. Lionel Jospin devenait le nouveau leader des socialistes, devenu Premier Ministre de cohabitation (donc avec des pouvoirs bien plus importants que hors cohabitation, une sorte de Président bis), et rassemblait son camp de façon incontestée (un leadership accepté même de Laurent Fabius).


C’était oublier que le PS avait gagné par défaut, grâce à une dissolution aux motivations bien étranges et à des triangulaires où le Front national n’avait cessé de faire le jeu des socialistes (collusion qui s’est retrouvée curieusement lors de la récente affaire Frédéric Mitterrand).


L’effondrement de Lionel Jospin en avril 2002, la réélection de Jacques Chirac et l’élection de Nicolas Sarkozy ont remis les socialistes dans l’opposition et si j’en crois leur capacité de rassemblement, en interne et en externe, j’ajouterai pour un long moment sans doute.
Une analogie… juste pour m’amuser


La situation du Parti politique en fin 2009 fait curieusement penser au village d’Astérix, vous savez, ces irréductibles Gaulois qui sont bagarreurs, susceptibles, ambitieux et… désunis. Ce 29 octobre 2009, le personnage fête d’ailleurs son cinquantième anniversaire. Presque autant que la Ve République dont le fonctionnement n’a jamais été bien compris des socialistes à l’exception de François Mitterrand… et de Ségolène Royal.


Lionel Jospin, en formant son unique mais long gouvernement en 1997 avait même théorisé son propre enterrement ; il l’avait appelée "gauche plurielle". Ce qui signifiait en gros : tout le monde peut avoir son opinion, ou être candidat à gauche ; de toute façon, tout ce beau monde votera pour moi au second tour (en oubliant quelque chose dans sa théorie).


Maintenant, les fils et petits-fils de Mitterrand se jettent dans la bataille de l’investiture pour 2012. Deux années qui vont encore amuser sans aucun doute leurs détracteurs et adversaires politiques.


Gaulois en bagarres intestines continuelles dans leur village (et en oubliant que les Romains sont là), ou Goths qui se livrent à des guerres fratricides astériciennes : chacun levant une armée pour avoir le poste de candidat à la place d’un autre (on notera d’ailleurs que l’enjeu n’est pas d’être élu, tant la réélection de Nicolas Sarkozy semblerait ne faire aucun doute parmi les hiérarques du PS, mais d’être le candidat pour se positionner en 2017, un peu comme la candidature désespérée de Lionel Jospin en 1995 qui l’a hissé à Matignon dès 1997).


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Et là, la situation est plutôt confuse.


La chef des socialix, Martinaubrine, de sang de l’or, semble pour l’instant avoir l’avantage de la légitimité, mais sa plus grande rivale, Ségoline, de sang royal, a réussi à bâtir une armée de désirs qui reste encore assez populaire dans le village. Le vieux Bertrandelanohix, un moment au top 50 des espoirs, a vite abandonné ses velléités alors que le jeune Hamonix vient d’apprendre que montrer trop vite ses crocs pouvait lui porter du tort.


Si le druide Jospinix n’ose plus rien dire, le barde Jacklangix préfère à tout hasard chanter des louanges aux adverses romains afin peut-être de faire partie de nouveaux promus après l’intégration d’Éricbessonix, de Kouchnérix et de Bockélix dans l’armée du général Sarkozus et en attendant celle de Juliendréhix, Manuvalsix (qui joue sur plusieurs tableaux) et Clodallaigrix.


L’ancien chef, Grosollandix, dont la faible notoriété fait frémir ses plus fidèles soutiens, croit encore survenir en sauveur providentiel malgré ses onze années de conduite dans le brouillard idéologique le plus complet.


Quant au doyen souvent sollicité, Agerocardix a décidément préféré faire œuvre de charité publique en offrant à Sarkozus sa créativité fiscalo-écologiste.


Déterminé à garder le temple, Fabiusix (d’origine romaine) paraît avoir renoncé à l’ultime tout en maintenant sa capacité de nuire, un peu comme son pendant romain Giscardus il y a quelques années. L’aile gauche de l’armée est elle-même gangrenée par la division entre un Enrilemanuellix fidèle au village et un Mélenchix attablé au village voisin, chez les communix, après avoir vu d’un bon œil l’ascension du barbare Bayrouhic pour empêcher Ségoline d’atteindre le podium.


Plus égoïste que politique, l’économiste du village Strauscanix a malheureusement abandonné ses petits amis et est parti étudier les finances planétaires. Même s’il n’a pas renoncé, ses adeptes se livrent désormais à un savant jeu personnel dont le plus remarquable est celui de Moscovix qui voulait déjà prendre la place de Martinaubrine.


Évoluant également dans leur propre sillon personnel, les anciens sbires d’éléphants Montebourix et Vincenpeyonix ont compris qu’il fallait imiter leurs aînés dans le processus égotique.


Et si l’on en croit les réservations de noms de domaine, même Ubervédrix, dont le nom était pourtant souvent cité pour diriger une structure pan-romaine, serait prêt à s’engager dans une bataille très incertaine.


Les socialix ne sont pas au bout de leurs peines car même en considérant qu’ils puissent faire un jour le ménage dans leur demeure, comme l’ont fait leurs voisins eux aussi bagarreurs, il reste que, malgré quelques gesticulations, ils sont bien circonscrits par la présence des troupes, d’une part, de l’armée alterromaniste du général Besancenaf et des garnisons des écologix du général Connbendax, et, d’autre part, des lieutenants entredeuxchaisistes du général barbare Bayrouhic.


L’histoire ne dit pas, à cette heure, si l’éclatement ou la disparition du petit village aurait été ou pas un bien pour la suite des événements.
[Illustrations : issues des albums de Goscinny et Uderzo (et une parodie par le blog ecrytures.fr).]

Pluralité dissonante


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