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Le nucléaire s'invite dans le plan cancer de Sarkozy...

Publié le 04 novembre 2009 par Juan

Le nucléaire s'invite dans le plan cancer de Sarkozy...
"Plus ça va, plus j'ai envie, du fonds de mon coeur et de ma conscience, de dire aux Français, la vérité."
Nicolas Sarkozy, lundi 2 novembre.
Ce jour là, Nicolas Sarkozy a repris son baton de pèlerin. Depuis des semaines, il tente de concentrer le débat politiques sur des sujets à son avantage. Après "l'identité nationale française", l'agriculture, voici le tour du cancer. Lundi, il a rapidement présenté son plan de lutte, 750 millions d'euros supplémentaires, ponctionnés on ne sait où, pour intensifier la lutte contre la maladie. Puis, il est retourné au Cap Nègre. mardi 3 novembre, il se repose. Son agenda officiel est vide. Le jour même, trois autorités européennes qualifiaient d'insécure le projet d'EPR.
Un plan cancer, un vacarme de plus ?
Personne ne contestera l'utilité d'un plan Cancer. On peut simplement s'interroger pourquoi Sarkozy a tant attendu : 30 mois de présidence, et quelques franchises médicales plus tard, quelle surprise d'entendre notre Monarque découvrir que : «La lutte contre le cancer est un enjeu majeur pour la France. Chaque année, on estime à 350.000 le nombre de malades. Les cancers sont devenus depuis 2004 la première cause de mortalité. C'est une cause nationale, et c'est une cause sur laquelle le président doit s'engager.» Le monarque a proposé de consacrer 750 millions d'euros de dépenses "nouvelles" sur 4 ans : "C'est un effort très important que fait notre pays dans le contexte actuel." Sauf contre-ordre, ces 750-millions-d'euros-sur-4-ans seront donc prélevés sur d'autres crédits. Lesquels ?
Dans le détail, Nicolas Sarkozy a annoncé des objectifs, sans préciser les moyens. A charge à Roselyne Bachelot et aux parlementaires de faire le boulot.
Premier objectif, concernant la recherche : "cinq sites de recherche pluridisciplinaire seront labellisés par l'Institut national du cancer"; Sarkozy annonce aussi qu'il souhaite voir consacrer 15% du budget de la recherche prévu dans son plan à l'analyse des risques environnementaux et comportementaux, et que les recrutements de chercheurs spécialistes (oncologues, radiothérapeutes, hématologues) doivent être augmentés. Second objectif, réduire les inégalités face à la maladie : «Celui qui a un cancer parce qu’il est issu d’un mileu social défavorisé a le droit de me rappeler à l’idéal républicain. C’est une priorité absolue. [...] Nous prendrons en compte la réduction des inégalités face au cancer dans toutes les mesures du plan.» Puisqu'il faut faire de l'affichage, Sarkozy va faire organiser une "journée pour l'activité physique." Pour un Monarque victime d'un malaise vagal en joggant en plein soleil en juillet dernier, la phrase est cocasse: «Il y aura une Journée nationale de l’activité physique. Un plan contre le cancer qui passerait à côté de ce que permet, pour la prévention, l’activité physique, serait incomplet.» Dernier volet, Nicolas Sarkozy revendique la hausse (insuffisante) de 6% des prix du tabac en janvier prochain. Toutes les organisations anti-tabac ont accusé le gouvernement d'avoir cédé aux pressions des lobbies du tabac... En septembre dernier, Christine Lagarde expliquait même qu'il n'y avait aucun plan d'augmentation des prix du tabac...
Le nucléaire insécure s'invite dans le débat
Grand oublié du discours présidentiel, les dégâts environnementaux n'ont pas fait l'objet d'une moindre allusion quant à leur impact sur la progression des cancers en France : amiante, malbouffe, nucléaire, etc... Ces sujets restent tabous en Sarkofrance. Le Réseau Environnement Santé (RES) a ainsi regretté que ce nouveau Plan cancer ait "encore oublié l'environnement". Hasard du calendrier, les déclarations du Monarque furent rapidement occultées par de nouvelles révélations, quelques heures plus tard, concernant les failles de sécurisation des deux EPR en construction, l'un en Finlande, l'autre en France. C'est vraiment pas de chance, Monsieur le Président ! Le coup est rude pour Sarkozy, qui avait fait du nucléaire l'un de ses arguments diplomatiques majeurs, tant pour la balance commerciale du pays que son propos pseudo-écologiste, depuis son élection en 2007.
Lundi en effet, les autorités de sûreté nucléaire française (ASN), britannique et finlandaise, dans une déclaration commune, ont émis de sérieux doutes sur la conception du système de contrôle-commande des réacteurs EPR de troisième génération. Chacun de ses EPR coûte 3 à 4 milliards d'euros pièce ! Un ministre, anonyme, a déclaré que cette alerte ferait perdre deux à trois ans à la mise en place des EPR... Les inquiétudes des autorités ne sont pas minces: elles portent sur "le système de sécurité utilisé pour piloter le réacteur en cas d'incident et son indépendance vis-à-vis du mécanisme de contrôle en fonctionnement normal": "La complexité de l'architecture proposée par EDF rend difficile l'élaboration d'une démonstration de sûreté satisfaisante" a expliqué l'ASN. "La conception d’EPR, telle que proposée initialement par les exploitants et le fabricant, AREVA, n’est pas conforme à ce principe d’indépendance dans la mesure où il y a beaucoup d’interconnexions complexes entre les systèmes de contrôle et de sûreté."
Un courrier a été adressé également à EDF.
Une majorité toujours désorganisée
N'en déplaise à Sarkozy, la "majorité" présidentielle se porte politiquement mal. Son discours sur le cancer, plombé par cette polémique sur les EPR, n'a pas suffit à calmer les ardeurs rebelles de certains. Dimanche, la fronde d'une vingtaine de sénateurs contre la réforme de la taxe professionnelle a fait grand bruit. Même Frédéric Lefebvre n'avait pas trouvé les mots, le lendemain, pour éteindre la polémique. Lundi, Alain Juppé a affiché son soutien aux opposants : supprimer la taxe professionnelle, d'accord; mais sans garantie de péréquation territoriale bien définie, pas question ! Eric Woerth s'est énervé: «Le budget, c'est maintenant, donc la réforme de la taxe professionnelle ne peut pas attendre. Cette réforme est faite pour les entreprises». Autrement dit, circulez, y-a- rien à voir ! Lundi encore, Henri Guaino a mobilisé une soixantaine de députés en faveur d'un "grand Grand Emprunt" d'au moins 50 milliards d'euros. Le Grand Emprunt, c'est le projet d'Henri Guaino. Transformer le surendettement public en projet collectif et populaire, une véritable ambition ! Les deux présidents de la commission chargée d'élaborer des propositions d'investissements "stratégiques" pour utiliser le fruit de cet emprunt, Michel Rocard et Alain Juppé, n'avaient pas joué le jeu en répétant à qui voulait les entendre que le montant de l'eprunt devait rester modeste...Il fallait réagir !
Mardi, François Fillon a taclé, lors de la réunion hebdomadaire du groupe UMP à l'Assemblée Nationale. "Souvent agacé par la médiatisation des conseillers élyséens", comme le rapportait Le Parisien, le premier ministre s'est exclamé: «Le pouvoir exécutif était totalement en dehors de cette démarche. Les conseillers du président ne font pas partie du pouvoir exécutif !» Il a été, paraît-il, très applaudi par les députés UMP présents. «Je suis inénervable donc je ne m'énerverai pas...»
De son côté, Rama Yade a répondu à Nadine Morano. Les deux secrétaires d'Etat se sont chauffées. Nadine reproche à Rama d'avoir critiqué la taxation des droits d'image des sportifs (environ 3000 personnes fortunées concernées). Elle lui a conseillé de se taire ou de partir. Rama Yade a rétorqué : "En politique, on ne répond pas en descendant à ce niveau-là."
Mardi, Christian Estrosi s'est emmêlé l'orthographe: la Poste sera "imprivatisable". On saura être conciliant avec les légèretés grammaticales assumées de l'ancien champion. Sur le fonds, on restera vigilant. Un ministre des Finances dénommé Sarkozy avait en son temps expliqué aux salariés de GDF que leur société ne serait jamais privatisée... On sait ce qu'il en est advenu.
Un plan cancer occulté par une polémique sur le nucléaire, des Umpistes divisés sur la fiscalité locale... les polémiques se suivent et se ressemblent en Sarkofrance : Nicolas Sarkozy reste inaudible.
Ami sarkozyste, où es-tu ?


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