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Alice in Chains et les mathematiques.

Publié le 05 décembre 2009 par Newwavehooker
Alice in Chains et les mathematiques.
Hier, c'était le retour d'Alice In Chains à Paris, venus présenter leur dernier album, le fabuleux Black gives way to Blue", je vous ai déjà dis tout le bien que j'en pensais.Très impatient de voir ce que donnait ce disque sur scène et ce que donnait William DuVall comme successeur du regretté Layne Staley. Concernant les nouveaux titres, c'était parfait, concernant DuVall, parfait, concernant le reste du groupe, parfait, avec un Jerry Cantrell d'une décontraction déconcertante, un son énorme et limpide, et les tubes qui s'enchaînent.Un véritable best of, un large place aux titres de Dirt et du dernier album, une interlude unplugged, quasi 2h de show. Cantrell présente les membres du groupe et lance un "we're gonna play a song for another member of Alice In Chains" avant Black Gives Way to Blue qui se termine par l'image de Layne Staley sur l'ecran derrière le groupe, entre frisson et larmes aux yeux pour le public qui applaudira longuement.En sortant du concert, je croise un ami qui me dit : "c'est quand même bon le rock". Oui, c'est quand même bon, c'est clair. C'est bon quand on se retrouve devant un groupe comme celui ci. Mais je peux dire sans me tromper que ça devient rare.Autant le succès d'un groupe ne dépend d'aucune logique, il faut que les astres soient avec vous, rencontrer les bonnes personnes, être là au bon moment, avoir le son qu'il faut, les titres avec, etc etc etc...c'est très aléatoire, autant un bon concert réside dans une équation très simple :
un groupe qui a son style + une maîtrise technique + des bons titres = meilleur concert
C'est tout. Vous pouvez broder autour, rajouter des effets, de la pyrotechnie, un chanteur qui marche sur les mains, peu importe, ce que vous voulez, si au moins vous avez ces 3 données, vous êtes surs de votre coup.Maintenant en 2009, enlevez une de ces données et vous obtiendrez 50% de la production actuelle, retirez en 2 et vous trouverez environ 90% des groupes qu'on nous propose sur scène, ou qui ont l'audace de se produire sur scène. Il faut être clair, peu de groupes aujourd'hui peuvent prétendre résoudre cette équation. Prenons l'exemple du Metal qui est le style de musique qui par essence se vit en live. Aujourd'hui parmis les musiciens, même les plus jeunes, beaucoup sont d'excellents techniciens, et ont appris a jouer ce style de musique qui a maintenant un vrai background et qui s'est largement démocratisé (ce qui n'était pas forcement le cas des musiciens il y a 15 ou 20ans qui défrichaient encore le style et les techniques). On se trouve en face de groupes hyper doués pour interpréter, mais souvent en totale manque d'inspiration. Car avant toute chose, ce qui compte c'est de savoir composer. Aujourd'hui on voit débarquer une ribambelle de groupes, qui s'acharnent sur les mêmes riffs, ou sur des structures alambiquées censées prouver une dextérité a toute épreuve mais totalement dénués d'efficacité et d'émotion. Ce qui est quand même le propre de la musique. (On en arrive même a regarder des types qui jouent de la guitare dans leur chambre....je dis ça je dis rien...)
Quand on écoute les pionniers du Metal moderne des 80s et 90s, même dans des styles très extrêmes, le songwriting est absolument parfait. Et c'est ce qui fait les grands groupes, de Metallica à Death, de Morbid Angel à Pantera. Je n'irais pas jusqu'à dire qu'on peut les siffler sous la douche, mais presque.On a vécu 2 décennies ou l'on était rarement déçu d'un groupe en live, parce que pour arriver jusqu'à la case "enregistrer un album" il fallait avoir écumé de la scène, avoir pas mal tourné, être rodé et être bon. Donc les lives étaient puissant. Très peu de groupes, même les plus petits m'ont déçu dans les 90s (dans les 80s j'etais trop jeune). La donne à changé, tu peux aujourd'hui sortir un album sans jamais être sorti de ton garage ou ta chambre grâce au net, c'est très bien, ça donne parfois de bons disques, pourquoi pas, mais une fois sur scène, là ça fait très mal...surtout au public. C'est tout l'inverse des groupes cités précédemment, les types peuvent écrire des bons titres, mais n'ont jamais tourné, sont techniquement à la merci du home studio, et sont projetés sur scène grâce à leur notoriété internet, et c'est souvent une catastrophe à voir et à entendre. Chose qui n'arrivait pas avant.En parlant de ces groupes des 80s et 90s, malgré l'étiquette commune, chacun tentait de sonner à sa manière. C'est la première donnée de l'équation : " un groupe qui a son style". Processus qui a completement changé aujourd'hui.Prenez le Big Four du Thrash Metal : Slayer, Megadeth, Metallica, Anthrax. Ils sont tous de la même époque, sous tous sous issus de la même scène, de la même génération de musiciens aux influences communes et pourtant ils ont tous leur son et leur propre façon de composer, d'interpréter et de chanter. Idem pour la vague grunge, malgré l'étiquette vite collée sur les groupes de Seattle, à la première note on savait si on écoutait Mudhoney, Nirvana, Pearl Jam ou Alice In Chains. Idem pour le hardcore : Suicidal Tendencies, Agnostic Front, Sick Of It All, Biohazard, Slapshot, Madball, The Accused...chacun son identité. L'Europe savait se demarquer du reste aussi, la vague allemande de thrash avait son truc à elle, avec des groupes comme Destruction, Sodom, Kreator, Tankard, c'etait un truc particulier, qu'on aime ou pas.
Alice in Chains et les mathematiques.
Aujourd'hui, on en est ou de tout ça ? On en est surtout à se demander si les groupes ne lorgnent pas sur le public du voisin quand ils se forment. J'ai l'impression que personne ne cherche à proposer son style, mais à se conformer au style du moment ou à ce que fais le groupe le plus en vogue pour être sur d'avoir le même public. Même riffs, même façon de chanter, même attitude, même fringues. On pourrait interchanger les uns et les autres, ça ne bousculerait pas grand chose. Oui bien sur, vous allez me citer untel ou untel qui ne fait pas comme les autres, mais bon, en règle général, si vous ecoutez les catalogues des labels en vogue dans le milieu des 00s, il n'y a pas une oreille qui dépasse. Tout le monde calqué sur le même son, la même façon de jouer qui mélange heavy et riffs hardcore, le chant moitié hurlé moitié chanté...on connaît, le riff de guitare joué sur une seule note (pas 2) avec la double grosse caisse derrière, on connaît. Et les bons titres ?Quand aux groupes censés représenté le "true metal", à part rejouer à l'envers les riffs de Metallica ou Pantera, rien de nouveau (n'est ce pas Trivium ou Lamb of God...).Je ne m'en plains pas, je n'écoute pas. La jeune génération ne s'en plaint pas non plus, elle a sa musique,ses codes, les vieux elle s'en fout et c'est très bien comme ça.Là ou je me plains, c'est surtout en concert. Parce que finalement, on s'emmerde quand même beaucoup en ce moment, à quelques exceptions près, et souvent ces exceptions sont les groupes qui ont, comme on dit, de la bouteille.Il me tarde de voir un nouveau groupe, un jeune groupe qui saura faire du neuf avec du vieux, et qui imposera son style, je ne parle pas que "de bien jouer" mais de ne pas être une énième copie du voisin. J'attends. J'attends qu'on enlève le plug in "chanteur de deathcore" qui semble collé a tous les types de la planète aujourd'hui. tous la même voix, la même façon de chanter.Si vous êtes profanes en la matière, faites un test, prenez le top myspace metal allez écouter The Devil wears Prada, Bring me horizon,As I lay Dying, Caliban...etc etc, européens, americains, peu importe, et ensuite passez vous les mêmes groupes dans le désordre, et bien vous ne remettrez pas un nom au bon endroit. Ca ne m'intéresse pas qu'il faille connaître par coeur un groupe pour savoir qui il est. Ce qui est intéressant dans la musique c'est que la personnalité du groupe vous frappe directement et qu'elle lui soit propre. Bien sur que la profusion de groupes aujourd'hui restreint le fait d'être unique, mais ce n'est pas une raison suffisante pour ne pas diversifier le propos, à moins que le metal soit devenu tellement marketing que les groupes ont peur de ne pas se ressembler assez : " il faut que le public comprenne bien qu'ont est du même moule, qui si il aime untel, et bien il peut aimer le groupe voisin aussi. C'est fait pour lui, il peut y aller les yeux fermés, ne bousculons pas le tendances".Je ne comprends pas pourquoi nous sommes passé d'une époque ou chacun tentait de faire écouter sa voix, à une époque ou chacun tente d'être pareil que l'autre. Et c'est censé être une musique de rebelle, un truc non conformiste.Bref, tout ça pour dire que hier soir, j'ai vu un vrai grand groupe, comme on en voit que trop peu maintenant. Personne ne peut être Alice In Chains, ils ont leurs trucs, ils sont unique, et c'est ce qu'on attend de la musique. Tout comme le sont Slayer, Metallica, Helmet, Biohazard, Sick Of It All, Morbid Angel, Pantera, Rage Against The Machine, Faith No More, Guns n Roses, Tool, Entombed, Refused, Life Of Agony, Death, Sepultura, Nirvana, et tant d'autres encore...dont on a pas encore trouvé les successeurs capable de composer des classiques, d'innover dans la melodie et dans le chant, composer de grands disques et des concerts parfaits et tout ça en même temps. Mais derriere le disque, surtout, il faut de bons concerts, c'est ce qui manque aujourd'hui, et la scène ça ne ment pas sur la qualité d'un groupe. Ca ne suffit pas aujourd'hui de copier le voisin, ou de se planquer derrierre l'ordinateur du studio, il est temps de retrouver des musiciens avec des idées, des vraies personnalités et de la maitrise, pas seulement l'un ou l'autre et ça vient aussi avec le temps. Le temps c'est aussi ce que les groupes ne se laissent plus, ils veulent tout maintenant, au risque de se griller.Ca me rappelle une interview de Ian Mc Kaye, future legende du hardcore (Minor Threat) et de la scene alternative (Fugazi) qui racontait une date avec son premier groupe Teen Idles en premiere partie de Bad Brains : " Ca ne sonnait pas, j'etais nerveux et j'etais persuadé que c'etait ma basse merdique qui n'allait pas, ou l'ampli qui était cheap et de mauvaise qualité, et puis jai refilé ça à Darryl (le bassiste de Bad Brains)...et d'un seul coup j'ai compris,ce n'etait pas la basse, ce n'etait pas l'ampli...c'etait le musicien"....le temps depuis a fait son oeuvre.
Et comme me disait un ami, un vieux con de 20ans : "y'a rien à écouter apres 2002" !

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