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Intervention initialement prévue au 49ème Congrès de la CGT - En revenant de Nantes

Publié le 12 décembre 2009 par Lalouve

Cher-e-s camarades

Voici l’intervention de 4 minutes que j’avais préparée pour porter le message des syndiqués qui m’avaient mandatée à ce 49ème congrès, notamment sur la loi sur la représentativité.

Je m’étais inscrite très tôt pour deux interventions de 4 minutes - je n’ai jamais pu y passer.

Il ne me restait donc comme seule possibilité que de tenter de saisir un micro (ce que j’ai fini par réussir à faire in extremis à force de hurler et de gesticuler comme une diablesse) pour les interventions sur les amendements de moins de 2 minutes, en fin de journée, quand l’attention des camarades ( et la mienne !) commence à baisser après plusieurs heures de débats et argumentations ...ce qui explique que le message passé a été passé comme il a pu.

Je n’ai donc pas pu lire ce que j’avais préparé au sujet de ce thème (ma première intervention également non retenue malgré l’inscription portait sur la partie I, la crise, la sécurité sociale professionnelle et le nouveau statut du travail salarié - je la retranscrirai ici si j’en ai le temps). C’était in extenso ce qui suit.


" Bonjour, je suis déléguée par les syndicats affiliés à la Fédération des Sociétés d’études, de la branche du notariat, déléguée syndicale, secrétaire d’une section syndicale en bonne et due forme, membre de la commission exécutive de mon UL à Paris.

Je tiens d’abord à saluer nos camarades de la CGT GOODYEAR AMIENS qui se battent comme des tigres depuis des années contre le patronat. Ils ont besoin, eux aussi, de notre soutien, à toutes et tous. Salut fraternel à eux.

Sur la fameuse loi sur la représentativité (en tenant compte du fait que je n’ai que 4 minutes de temps de parole) :

Il y a ici un véritable débat de fond à avoir entre nous, et il ne se règlera pas en quelques minutes et pas à un Congrès.[Les camarades que je représente, et moi même, rejoignons complètement les positions qui ont été exprimées ici au préalable par les camarades de la chimie, des ports et docks, de Radio-France ou de la CDC, entre autres. Il serait hasardeux ou manipulatoire de vouloir faire de ces positions convergentes sur un même sujet une preuve d’un "complot anti-cgt", la plupart d’entre nous ne nous connaissant pas. Il est sans doute plus intéressant de faire de cette diversité la preuve qu’il y a un réel problème.]

Est il raisonnable de travailler à ce que la désignation des représentants de la CGT dans l’entreprise soit le fait de salariés non syndiqués, voire, qui vomissent la CGT?

N’est-il pas osé ou angélique de confier l’avenir de la représentativité de la CGT à des salariés non syndiqués qui ont pour une grande part, voté Sarkozy en mai 2007?

Ce dernier élément ne signifie nullement que je pense que les salariés sont tous "des cons" ou des "abrutis". Absolument pas et même, au contraire. Mais il a signé de façon indubitable l’état d’intoxication idéologique avancé dans lequel se trouvent la grande majorité d’entre nous.

Pour avancer dans la bonne voie, il faut commencer par poser les bons constats.

Prétendre que la loi sur la représentativité telle qu’elle est écrite et votée, est une bonne loi qu’il faut défendre, c’est croire ou faire croire que le jaillissement de la conscience de classe serait spontané, voire inné en chacun des travailleurs. C’est faire croire que le seul visage de la lutte des classes qui existe est celui qui apparaît lors de crises paroxystiques et de moments des luttes comme la grève ou l’occupation. C’est aussi amener insidieusement l’idée que le syndicalisme CGT pourrait se passer du rapport de force et de la mise en lumière des contradictions brutales qui jalonnent une vie dans une entreprise.

Le fait que notre syndicat ait aujourd’hui moins de 700.000 syndiqués alors qu’il existe environ 22 millions de salariés devrait pourtant amener à plus de circonspection et prudence.

Cette loi est une mauvaise loi car elle sape la possibilité d’une sérieuse implantation au long court de la CGT dans des TPE et PME, qui sont de véritables déserts syndicaux, d’où la culture de lutte et de classe est généralement absente, où les salariés sont confrontés à la violence des propriétaires directs du capital qui sont sur leur dos toute la journée, où le nombre de cadres est parfois très important, mais qui emploie pourtant la grande majorité des travailleurs aujourd’hui.

Sans la possibilité de désigner un délégué syndical protégé et muni de pouvoirs réels en dehors de toute élection, impossibilité de constituer une base syndicale. A titre d’exemple, si je n’avais pas été désignée déléguée syndicale dans mon entreprise avant cette loi, je n’aurais jamais pu monter une section syndicale CGT qui représente aujourd’hui presque 10 % de l’effectif salarié, d’autant que les élections CE en DU avaient eu lieu alors que j’avais moins de 1 an de boîte. Pas de NAO non plus, rien.

Prétendre ensuite que cette loi préservera des accords dits minoritaires est également une utopie. On aura "simplement" des accords majoritaires négociés par des syndicats patronaux "maison", qui, non contents de faire tomber, le cas échéant, des délégations CGT naissantes, pourront amener des accords inférieurs à la convention collective.

Que lorsqu’il existe une base CGT durablement constituée, on prétende que le résultat des élections dépend du travail des camarades, pourquoi pas. Mais le problème soulevé ici n’est pas celui de la pérennisation de la CGT dans les entreprises mais bien celui de son implantation.

Nous demander ensuite de syndiquer dans de telles conditions, de créer des bases syndicales, en dehors de tout moment "critique" comme licenciements économiques, PSE etc...(qui ne constituent pas, heureusement le gros de la vie des entreprises même en ce moment), en pleine période de crise du capitalisme, c’est soit de la schizophrénie soit un goût prononcé pour l’humour noir.

Ceci nous fait dire qu’il faut revenir sur cette loi et qu’à ce stade, un document d’orientation qui ne prendrait pas en compte ces réalités est plutôt un document de désorientation. En conséquence, nous demandons le retrait de cette proposition et de cette loi.

Merci."


Voilà exactement ce que j’aurais lu si j’avais pu bénéficier de ces maudites 4 minutes d’intervention DANS le débat avant les amendements.

Ce ne fut pas le cas et c’est tant pis pour cette fois, mais c’est ainsi.

Ce que je regrette encore plus, c’est la réponse en forme de caricature et remplie de mauvaise foi qui m’a été faite par une secrétaire confédérale sortante - je savais en prenant la parole le risque pris pour le débat de fond, que je ne gagnerai pas ce combat là à ce moment précis puisque c’est le dernier qui parle qui a raison, mais, "chère camarade" secrétaire confédérale sortante, que je croise parfois sur certaines actions, sache que je n’ai pas avalé la couleuvre, j’ai de la mémoire, et j’y reviendrai un jour prochain.

Je regrette également les caricatures faites par la presse (quelle qu’elle soit) de ce congrès, et je regrette, je le redis ici et je ne m’en suis jamais cachée, une candidature dite oppositionnelle que je pensais malheureuse ne serait ce que d’un point de vue tactique, à laquelle je n’ai pas participé et que, personnellement, je n’ai jamais soutenue (sans porter de jugement ni sur l’homme que je ne connais pas, ni sur le militant , que je connais peu),candidature qui par sa forme même prêtait à instrumentalisation par qui voulait, et qui a polarisé l’attention sur des questions de personnes, accrédité l’idée (rumeur émanant à l’origine d’une partie de la majorité) d’un "courant oppositionnel à BT uni et cohérent" qui faisait de l’anti-cégétisme.

C’est faux.

De très nombreux camarades "critiques" qui se sont exprimés à ce congrès l’ont fait non pas tant contre "la direction" ou "contre BT", que d’abord contre un document d’orientation (et une philosophie, social-démocrate molle, sans conteste, comme l’a prouvé l’acceptation du discours de Ayrault) qui leur a semblé extrêmement mauvais, dévastateurs à bien des égards, sur des questions de fond d’une très grande importance, qu’il s ’agisse du sujet des retraites, des services publics, des structures (l’explication sur le "pourquoi la commission des amendements a rejeté l’amendement qui disait qu’UD et UL sont des piliers fondamentaux de la CGT" n’était pas du tout satisfaisante...) ou de la représentativité, entre autre.

Un délégué a d’ailleurs utilisé son temps de parole pour dire qu’il ne soutenait pas cette candidature "oppositionnelle" quoi qu’il ait reçu mandat de voter contre le document d’orientation , même amendé.

Au sujet du discours du maire PS de Nantes,outre mon indignation devant un tel discours, je tiens à rapporter ici le panneau que montrait un délégué mais qui n’a pas été pris par la vidéo, qui disait "Pendant qu’Ayrault parle au Congrès de la CGT, 400 emplois supprimés au CHU de Nantes".

Il faudra également que l’on ait le fin mot de l’histoire relative aux positions non exprimées qui ont, semble-t-il, été comptées comme des "pour". Nous avons posé plusieurs fois la question, on nous a renvoyé aux statuts et au guide du délégué mais nous n’avons jamais trouvé la disposition qui entérinait ce principe "les non exprimés (c’est à dire ni non ni oui ni abstention) comptent "pour"".

On aura beau jeu de renvoyer cela sur le dos des délégués qui auraient mal fait leur travail (quand on sait que de nombreux délégués ont reçu leur mandatement moins d’une semaine avant le Congrès, il ne faut quand même pas charrier, et cela non plus, je ne l’ai pas avalé).

Néanmoins, ce congrès a pris des décisions, il a été très intéressant, instructif à maints égards, des "discussions de couloir" (qui sont légion dans ce genre de congrès), aux débats publics, en passant par les rencontres et les moments festifs.

Le débat public était diffusé sur Internet parait il ; c’est très bien mais il serait illusoire de croire que le congrès se résume à ce qui en a été montré - les travaux en commissions, en bureau, dans les délégations... tout ceci n’a pas été filmé.

Je pense que contrairement à ce que se disent - mais je les comprends - certains camarades depuis vendredi, ce congrès ne signe pas la fin de la CGT, mais bien la possibilité de son renouveau, car le document adopté, s’il est appliqué comme la direction confédérale sortante souhaitait qu’il le soit, va créer des situations telles que nombre de masques vont tomber et beaucoup de paires d’yeux s’ouvrir tout grand.

Oui, je pense qu’en votant tout cela, le Congrès a créé des conditions favorables pour que celles et ceux qui n’ont jamais renoncé à la lutte de classes et à l’amélioration de "l’outil CGT" en ce sens, puissent remporter d’importantes victoires d’étape pour une reconstruction.

Si nous faisons ce qu’il faut comme il faut. Mais ne présumons pas de l’avenir.

Nous avons obtenu une petite victoire en dépassant nos clivages pour nous opposer nombreux à la venue de François Chérèque prévue le jeudi. Ce monsieur-là n’avait rien à faire "chez nous" à un tel congrès.

Je pense que nombre d’entre nous en sont repartis plus déterminés encore, plus éclairés sur certains aspects de la vie de notre syndicat, avec des idées à foison, et s’investiront encore plus dans les nombreuses luttes à mener.

Il n’est pas question de "refaire le congrès" mais en revanche je rappelle pour terminer que si on ne refait pas le congrès, la CGT fonctionne encore selon le principe du fédéralisme, et non du soi-disant "centralisme démocratique", et que, plus que jamais, et comme l’ont rappelé de nombreux camarades, la bataille se mène dans les syndicats, dans les UL et les UD c’est à dire avant tout au niveau des échelons de proximité dont dispose encore la CGT( mais pour combien de temps?).

C’est peut être désagréable à constater pour certains, mais c’est là qu’il faut se battre je pense, et pas ailleurs - d’une certaine manière, il faut "jouer le jeu". C’est la condition sine qua non (celle là et être armé de beaucoup, beaucoup de patience, car parfois, seul le temps peut démontrer la justesse d’une analyse au départ minoritaire) pour convaincre les camarades dans l’erreur, ou indécis, ou à venir, que la lutte de classe a de l’avenir en notre sein et que la CGT peut être un outil révolutionnaire mais que nous devons impérativement redresser la barre, nous unir, et continuer d’analyser en commun le document qui a été adopté vendredi.

L’union, n’est pas l’unité qu’on a voulu nous faire avaler en tentant de museler les positions critiques.

L’union des syndicats et des syndiqués, dans toutes les luttes (les vraies luttes - pas les manifestations amuse-galerie sous l’égide de la CES d’un Monks qui a bien démontré dans son discours qu’il nous prenait globalement pour des jambons-) que pourra mener la CGT, est un principe indérogeable. Les comptes ne se règlent pas sur le dos des luttes quelles qu’elles soient, car les luttes ce sont avant tous les salariés qui les mènent qui en sont les acteurs et les enjeux.

Il ne faut pas oublier que la lutte de classe a lieu de tous temps au sein même des organisations de la classe ouvrière, on peut le regretter mais c’est un fait aussi ancien que la CGT elle même, elle ne se résume pas à l’affrontement capital travail mais prend aussi en compte des affrontements idéologiques anciens entre anarco syndicalistes, couche bureaucrate (isée?), etc. L’appel incessant à la "fraternité" ne peut pas servir à bâillonner les camarades

Hauts les coeurs camarades, la lotta continua !

Salutations militantes


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