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Dublin County – Baile Atha Cliath

Publié le 30 décembre 2009 par Elcaminoloco

02Ça y est, le départ est officiel. Nous sommes le vendredi 3 juillet 2009, ze D-Day, et il fait affreusement mauvais. Il est 7h45 a.m. à l’aéroport de Beuuuhvèeet (Beauvais avec un accent du chNord), du moins c’est la retranscription phonétique qu’il nous a semblé judicieux d’adopter. Avec son Franxprix, et ses hôtesses de l’air, dont une au passage me fit un joli coup d’œil du genre “À bientôt à bord”, l’aéroport de Beuuuhvèeet est un concept à lui tout seul, il ne ressemble à rien d’autre, ou plutôt il ne ressemble à rien.

C’est peut-être son architecture sortie tout droit du bloc de l’Est et l’anarchie 06qu’il y avait pour rentrer en salle d’embarquement, qui poussait Wes à s’alcooliser dès le matin. Wes ? Eh bien oui, je ne l’ai pas encore présenté, mais lui non plus. Wes Huges, 27 ans, un Canadien de Vancouver à la dense barbe, certainement pour le protéger des rudes hivers, il sortait tout droit d’une soirée et s’était présenté à nous dans cette longue file d’attente pour savoir s’il y avait de la bière à vendre dans le hall d’embarquement.

Déjà 8h45, sa troisième Stella était finie, nous l’ayant confié à maintes reprises pour trouver un coin où fumer. Ceci l’aidait parait-il à contrôler sa peur de l‘avion, alors que moi il m’aurait fallu quelque chose pour contrôler mon rire lorsque le pilote déclencha le petit Jingle “Tadaaaa” à notre atterrissage à Dublin International Airport. Longue vie à Ryan Air! La folie irlandaise commençait de bons pieds.

-An Lar – centre-ville, oula Ben, je commence à avoir peur, j’espère qu’ils parlent pas tous Gaélique

Tous les panneaux étaient bien entendu traduits aussi en Anglais, mais je m’attendais réellement à ce que les gens parlent en gaélique entre eux.

Une fois arrivés en ville, Wes nous fit visiter de façon assez débonnaire et décousue quelques endroits du centre, croyant bien la connaitre, il était en fait autant perdu que nous qui le suivions. Arpentant les rues, il nous emmena 03chez un de ses amis qui tenait un magasin de skate. Un peu à la manière de ces endroits bizarres que l’on ne voit que dans les films, il ouvrit une porte pourtant anodine qui donnait sur une rue principale, prit un couloir et des escaliers de bois qui craquaient à chaque pas. L’immeuble à l’architecture type fin XIX fourmillait de tags et d’affiches en tout genre. Wes sonna à la porte. Je m’attendais presque à voir des yeux dévisageant, sortir à travers une trappe tout en grognant “c’est pourquoi !?” . Mais ça, c’était dans ma tête. Ce n’était qu’un simple magasin, de connaisseurs seulement, puisqu’il n’avait pas pignon sur rue, qui vendait tout ce qui se rapprochait au skateboard; une caverne d’Ali Baba pour certains.

Dublin, Baile Atha Cliath de son nom gaélique, est la capitale de la république d’Irlande depuis 1922. La ville est construite autour de la Liffey, le fleuve qui 26 la traverse. Les quartiers du centre sont véritablement des nids à touristes: le spire, une sorte de pic d’une centaine de mètres qui permet à chaque instant de se repérer en ville; le quartier du Temple Bar plein de restaurants et de pubs où les prix de la Guinness, qui se négocient difficilement (test à l’appui), sont les plus élevés de toute l’Irlande. La ville semble particulièrement moderne, très axée sur la rue : cafés-terrasses, zones pietonnes, “taxis” en tricycle, concerts de rue et autres amuseurs de foules.

Les rues étaient pleines de touristes. Des teneurs de pancartes luttaient contre le sommeil et l’ennui, au milieu des zones piétonnes, faisant la publicité des restaurants et pubs.

Désespérés à l’idée de trouver un véritable Irish Breakfast à un prix correct, nous nous sommes résignés au fast food du coin: et pour menu du jour de la bonne friture bien grasse. Le ciel s’était rapidement dégagé dans l’après-midi, les Irlandais reconnaissables à leurs blancheurs écarlates jouaient les écrevisses dans les parcs, tandis qu’avec Ben, on nous prenait plus facilement pour des Italiens au vu de notre teint de peau. Cette première journée  passa très vite, Wes nous parla de ses petits boulots, artiste, vendeur, barman, revendeur “d’agriculture d’intérieur”, et pourquoi pas gigolo à ses heures en compagnie d’une charmante déesse; il était l’homme de la situation. Mais ceux que j’aimais par dessous tout, c’était la brosse qu’il sortait pour se nettoyer la barbe, un vrai professionnel.

Après avoir trouvé l’auberge de jeunesse ‘”Isaac Deli”, la moins chère de la ville, 12,50€ /p.p. mais avec petit déjeuner offert, nous avons pu partir à la recherche d’un travail sans être chargé de nos sacs. Motivés à l’idée de pouvoir payer nos vacances en partie comme ceci, à vivre de pintes, de filles et de hamburgers, nos auras étaient si puissantes que tout un chacun se retournait et nous idolâtrait comme des demi-dieux.

Mais c’est très rapidement que nous sommes redescendus sur Terre.

Version 1
-Bonjour, nous sommes deux français (sexe appeal et puis tout), on cherche du travail
-désolé c’est la crise, il n’y a pas assez de tourisme par rapport aux autres années
-Même pour la plonge ?
-non désolé

Version 2
-Bonjour, nous sommes deux français (le French Kiss c’est nous!), on cherche du travail
-vous avez un CV?
-(tu veux pas mon diplôme d’océanographe aussi pour travailler dans ta superette de ***de ?

Version 3
-Bon Ben, on va se la boire cette bière?
-Me tente pas ;) !

Je connaissais l’image traditionnelle de l’Irlandais au pub, mais pas celle d’être éjecté complètement ivre à 18h dans la rue par le barman, ni celle des femmes qui sortent toutes entre copines. D’ailleurs si on met bout à bout chaque jupe de chacune des membres d’un groupe, on arriverait peut-être à la taille d’une robe. Ceci-dit, elles font de gros efforts vestimentaires.

Pour notre première soirée, fatigués de la vieille, nous restâmes tranquillement à l’auberge. Deux Australiennes, complètement ivres, sont rentrées au milieu de la nuit dans le dortoir. Sur un fond sonore de ronflements, elles avaient décidé de nous parler de leur voyage, et nous proposaient déjà de nous embarquer pour Belfast dès le lendemain. C’est finalement à ce moment que nous avons réellement décidé de l’itinéraire à prendre; à savoir partir pour le nord ou le sud. Leur proposition avait 24 h d’avance, et de Belfast, nous n’avions rien vu, il était trop tôt.

L’auberge était pleine de Français, tous plus bruyants les uns que les autres, s’essayant à un anglais souvent minable, parfois risible. Ils n’hésitaient pas à cacher les tranches de pain de mie du petit déjeuner dans leurs poches, pour leur sandwich du midi. Mais là-dessus, ils n’étaient pas les seuls.

38La journée se passa très agréablement : visite de la ville, pluie, yoga dans le parc de la cathédrale… Nous avions même retenté de chercher du travail. Un pub qui nous avait dit à notre jour d’arrivée de repasser le lendemain n’avait rien de mieux à nous offrir. Certains des Français, qui étaient à l’auberge, cherchaient du travail depuis 15 jours. Un jeune nous dit avoir fait du woofing : une sorte de travail bénévole à la ferme, en échange du gite et du couvert. Vu les arguments qu’il nous a avancés, je n’ai pas été très séduit : le gite se passait dans une tente, la douche avec un tuyau d’arrosage… tout ça pour bosser gratuitement 8heures par jour, de l’esclavage des temps moderne selon moi. Je préfère largement ma tente et mon baluchon. La raison en était faite :”travailler c’est trop dur, et voler c’est pas beau ” (Neg’ marron).

C’est avec ces mêmes Français, que nous sommes sortis le soir boire une bière dans un pub assez éloigné, pas un des ces bars à touristes du Temple Bar (ah ce syndrome du touriste qui veut éviter tout ce que l’on crée pour lui), non un vrai, avec de la bonne pression, un groupe de rock qui cartonne et qui fait se battre les volets des étages du dessus : bref, quelque chose qui envoi du louuurd! Rocky, Rockette, Rocker, il avait plus de surnoms qu’il n’y avait de personnes qui le connaissaient, en tout cas il était sûr d’une choses, les oreilles poilues de ce petit bonhomme de 50ans étaient assez aiguisées pour nous trouver des bons coins où sortir. Rockette, un des piliers de l’auberge et ingénieur en informatique de prime, était amené à se déplacer sur tout le globe, et plutôt que de s’embêter seul dans une chambre d’hôtel, il préférait être entouré de jeunes. Si nos entreprises pouvaient-elles aussi s’entourer de jeunes. Bref grâce à lui, nous réussîmes à rentrer dans une soirée privée CouchSurfing sans trop savoir comment. CouchSurfing, c’est le concept internet voyager/héberger: tu voyages, je t’héberge. Soirée qui se termina bien pour Ben, en train de séduire une très jolie Italienne, ambassadrice de Facebook. Explosé de rire qu’il était lorsqu’il me parla de sa conquête: elle était lesbienne! La prochaine sera la bonne.

34L’Isaac Deli est un véritable complexe, sur plusieurs étages. Caméras de vidéosurveillances, porte avec pass, bref le top. Surtout quand on est un groupe de 7 à rentrer en même temps à 4h du matin, on passe trop facilement au milieu de la foule. Histoire de ne pas exploser le budget quotidien, j’avais décider avec Ben de ne pas payer la deuxième nuit et d’essayer de filouter. Je me suis cru chanceux en constatant que le lit que j’avais la veille n’avait pas été utilisé par un nouveau, mais à 5h du matin, son nouvel utilisateur n’eut pas très bien compris en me voyant, et j’ai finalement migré sous le lit de Ben. Bien entendu j’ai passé une nuit formidable. Si j’avais su j’aurais pas vnu.

Dimanche, déjà notre troisième jour. Le mauvais temps s’installe surement sur toute l’Irlande. Mais ce n’était le temps qui allait gâcher mon moral puisque j’avais enfin une réponse pour un Job en Tasmanie. J’ai été obligé de passer une bonne partie de la journée à leur envoyer par mail des informations complémentaires. Ben pendant ce temps là avait de quoi s’occuper.

-tu peux faire à manger ? Elle est où la sauce tomate ? elles sont dégueulasses tes pâtes ! tu m’excuses, mais j’ai vraiment pas le choix, si je dégotte ce job c’est absolument génial, et puis j’ai bientôt fini
- …
-bon je me dépêche

Nous n’avions qu’un bref aperçu de la ville, ne mesurant pas la réelle ampleur de sa taille, mais à 17h nous étions pourtant bien décidés de commencer à faire du stop. Notre spot semblait parfait, bien que doté d’une place pour se garer et situé après les panneaux de direction, il était en fait très mauvais : un peu comme si l’on voulait sortir de Paris en faisant du stop à République. Mais à peine 30 minutes plus tard, un jeune couple eu pitié de nous et trouva une place en contrebas pour se garer.

La machine était en fin lancée. Ce n’est qu’une fois dans leur voiture que l’on mesura l’énorme chance que l’on eut. Nous étions réellement très loin de l’axe principal, absolument là où il ne fallait pas être, et pourtant tout marcha si facilement. Comme quoi il n’y a pas de règle quand il s’agit d’aléatoire. Ils téléphonèrent même à leurs amis afin de connaitre la meilleure route à prendre pour nous déposer où nous voulions. C’en était trop beau.

Ils nous aidèrent à sortir nos sacs, je fis une photo souvenir de nos bienfaiteurs et nous nous échangèrent quelques derniers sourires. 30 secondes plus tard, Papy s’arrêta avec sa berline.

-Vous allez où?
-Bonjour, on va à Valleymount
-c’est sur ma route, montez

Comté de Wicklow, nous voilà. Le rêve était clairement réalisable

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PS: une petite précision pour la suite, je dirai Papy et Mamy pour nos mécènes les plus âgés, je trouve ce terme plus affectueux que de dire une vieille personne.


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