Ne dîtes plus Saint-Graal, dîtes Ipad !

  

Voici une version augmentée du billet d’humeur qui paraîtra dans CB News N°1043 du lundi 1er Février.

« Le papier est amené à devenir marginal, les tablettes seront une nouvelle naissance pour la presse », déclarait Alain Weill, pdg de la Tribune dans CB News n°1041 en expliquant toute la nouvelle stratégie du journal pour 2010, quasi exclusivement basée sur l’arrivée de la tablette magique d’Apple.
Pas étonnant, qu’Alain Weill comme les autres patrons de presse,voient en l’Ipad, un nouvel Eldorado. Tout le monde se souvient de quelle façon Apple avec son Ipod a réussit à sauver une industrie musicale au bord du gouffre. En clair, cette tablette est devenue le Saint-Graal d’une presse laminée par la chute des ventes, les plans sociaux et les fermetures de titres.
Les éditeurs espèrent pouvoir effacer des années d’errements et de destruction de valeur. Errements quand ils ont mis en ligne gratuitement leurs contenus vendus par ailleurs, errements quand ils se sont refusés à se mettre tous ensemble autour d’une table pour réformer ensemble la distribution des journaux, destructions de valeurs ensuite quand ils ont décidés de se lancer dans une course effrénée à l’audience mal rémunérée par la publicité online. Bref, avec L’Ipad, les éditeurs espèrent bel et bien se racheter une virginité et créer un modèle vertueux qui leur permettrait de sortir de l’ornière économique. L’intention est louable. Mais un lecteur 2.0 qui ne lit plus aucun journal papier aura –t-il réellement envie de payer pour lire sur son Ipad ? De même, un lecteur lassé par le manque de créativité de la presse, par la façon dont elle est, comme les autres médias, touchée par une crise de l’offre et gouvernée par une certaine tyrannie du buzz, reviendra-t-il à la lecture par l’Ipad ? Pas certain.
Ainsi, si Apple permettra peut-être à la presse de s’en sortir, celle-ci ne fera pas l’économie d’un réel questionnement autour de ses contenus, de son offre et de son modèle économique. Sinon, elle n’attirera pas plus de lecteurs sur l’Ipad que sur le papier.
Enfin, un regret immense peut tarauder les éditeurs de presse. Celui d’avoir attendu des années avant de se mobiliser et d’attendre Apple et sa tablette comme le messie. De ne pas avoir créé un kiosque numérique ni adopté une stratégie commune sur l’internet et vis à vis de Google. Laissant ainsi les autres opérateurs fixer leurs lois. Les éditeurs se considèrent toujours comme concurrents les uns des autres, alors qu’au final, ce qui est bon pour les uns est bons pour les autres. Oui l’Ipad peut peut-être sauver la presse, mais franchement, c’est assez catastrophique de voir les éditeurs s’en remettre qu’à la seule ingéniosité technologique de Steve Jobs et ses équipes.”

David Medioni

Pour ceux qui n’aurait pas encore vu la vidéo d’Apple sur l’Ipad :