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«La montagne n’a pas voulu» : un jeune homme survit 17 heures sous une avalanche…

Publié le 09 février 2010 par Kamizole

avalanche.1265704101.jpgCela tient du petit miracle. Il en faut et c’est bien réconfortant quand nous ployons sous “l’avalanche” de mauvaises nouvelles. J’ai repris le titre d’un ouvrage de Saint-Loup lu il y a fort longtemps quand je pratiquais l’alpinisme à mon très modeste niveau. Je ne savais pas alors que sous ce pseudonyme se cachait Marc Augier, ex-sympathisant socialiste passé du côté nazi – un de plus ! – au début des années 30, ce que j’ai appris beaucoup plus tardivement. Comme ce n’est pas lui le sujet de cet article et que pour une fois je vous fais grâce de mes sempiternelles digressions, les personnes intéressées peuvent consulter sa fiche sur Wikipedia.

J’avais vu passer l’info mais pas le temps de m’y arrêter. Il court bien trop vite pour mes petites jambes. Et de toute façon, même quand j’étais ingambe et si je courais tout le temps – je ne savais pas marcher ! - j’étais plutôt faite pour le demi-fond que le sprint.

Je n’ai jamais fait de ski hors-piste. Ce n’était pas la mode quand je fréquentai régulièrement la montagne pendant les vacances de Pâques, le plus généralement à La Grave. Et puis, mon niveau était bien trop médiocre pour m’y risquer. Il faut savoir ce que l’on vaut et grimper ou skier à son niveau ou juste au-dessus pour faire des progrès. Sinon c’est trop galère. On en chie un max alors que la montagne doit être avant tout un plaisir. Et puis, c’est risqué. On met en péril sa vie et celle des compagnons de cordée, sans parler de celle des sauveteurs.

La montagne est suffisamment dangereuse en soi – comme d’ailleurs la mer – pour ne pas prendre de risques inconsidérés. Nombre d’alpinistes chevronnés et de guides de haute montagne y ont laissé leur vie sans avoir commis la moindre imprudence. Quand j’étais jeune, je n’avais pas les moyens de faire des courses en haute montagne avec des guides, sinon lors d’un stage avec l’UCPA aux Contamines, l’année de mes 20 ans (1967) où j’ai appris beaucoup de choses.

J’ai donc grimpé plusieurs années de suite “sans guide” dans l’Oisans mais toujours avec des personnes plus aguerries que moi. La Grave est un village et nous connaissions la plupart des guides. Avant de partir en course, nous ne manquions jamais de passer au Bureau des guides, jamais avares de conseils, pour nous informer des conditions et de la météo.

La seule fois où j’ai bien ri c’est quand un guide retraité nous a promis que le lendemain il ferait super beau… C’était un 15 août et quand nous nous réveillâmes le lendemain, il pleuvait comme vache qui pisse, le plafond nuageux cachait le magnifique panorama sur la Meije et les glaciers étincelants. Il faut dire qu’il avait drôlement forcé sur le “blanc limé” au bal en plein air qui clôturait la traditionnelle Fête des guides. J’étais bien placée pour le savoir car n’ayant pas envie de danser – surtout avec le calamiteux orchestre «Trompet Schuss» venu de Grenoble que j’appelais «Trompet Couac» - j’avais tenu la buvette toute la soirée…

Je ne sais si vous avez déjà été témoin d’une avalanche. Je l’ai été souventes fois mais de loin. Sauf une fois, je skiais au Lautaret comme d’habitude et une mini avalanche est venue mourir sur les pistes. Il y eut quand même un léger mouvement de panique.

C’est à la fois fascinant et terrifiant. Tout commence par une déflagration énorme. Comme un coup de tonnerre. Ensuite, l’énorme masse blanche déferle à toute vitesse comme une gigantesque vague qui emporte tout sur son passage et s’arrête en déployant un gigantesque panache de poussière blanche.

Le plus souvent, ce fut de la Grave, de la terrasse qui domine le village à côté de l’église. Dévalant soit le glacier du Tabuchet, à gauche du grand pic de la Meije, soit le glacier de la Meije, juste en dessous. Je n’ai pas le souvenir d’en avoir vu partir sur le glacier du Râteau à droite.

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J’ai vu une avalanche assez formidable quand je fis le Tour du Mont-Blanc en juillet 1970 avec deux copines de l’école d’infirmières. Il avait neigé très tard cette année-là et dès le départ (des Houches) après le chalet de Balme au-dessus des Contamines, nous avions rencontré la neige dès 1500 mètres. Ce qui ne pouvait que me faire le plus grand plaisir.

Nous étions ce jour-là du côté Suisse. Nous avions passé la nuit à Champex. Nous étions alors engagées dans des passages rocheux relativement délicats mais déneigés du côté de la Fenêtre d’Arpette. L’avalanche s’est produite sur un glacier dont je ne connais pas le nom que nous voyions à une certaine distance à notre gauche. Très spectaculaire. Mais ma caméra était dans une poche de mon sac à dos. Bouh ! snif…

Je laisse là mes digressions pour en revenir au cas de ce jeune Suisse imprudent - Cédric Genoud, 21 ans - heureusement rescapé. On admet en général que l’espérance de vie après une avalanche est de l’ordre de 15 à 20 minutes, en raison de blessures, d’hypothermie ou d’asphyxie. Or, il a survécu 17 heures, prisonnier de la neige.

Il s’était laissé imprudemment tenté par une pente de poudreuse sans trace qu’il dit avoir d’abord testé sur la face nord où la neige tenait. Les choses se sont gâtées quand il s’est arrêté sur un plan ensoleillé. Tout a lâché. C’est d’une évidence ! Sur une face nord la neige ne subit pas le réchauffement. Bien qu’elle ne lui ait pas paru “monstrueuse” elle ne l’en a pas moins emporté malgré tous les mouvements tentés pour résister.

Mais peut-être est-ce grâce à eux qu’il n’aura pas été enseveli trop profondément. Parmi les conseils donnés aux alpinistes et skieurs pour le cas où ils seraient pris dans une avalanche, il est recommandé d’effectuer des mouvements à la manière des nageurs pratiquant la brasse afin de rester à la surface.

C’est tout un concours de circonstances qui lui aura valu de ne pas périr. Alors qu’il avait oublié son boîtier de détection, ce qui eût permis aux secours d’intervenir plus rapidement. C’est sa famille qui a donné l’alerte le samedi après-midi, environ deux heures après l’avalanche. Il n’a été retrouvé que le dimanche, les recherches ayant été interrompues la nuit en raison du risque de nouvelles avalanches.

D’abord, il n’a pas été profondément enseveli par la masse de neige ce qui lui eût été fatal. Son casque gris émergeait de la neige. C’est d’ailleurs en parvenant à bouger la tête quand il a entendu à nouveau le passage de l’hélico qu’un des sauveteurs qui scrutait la masse blanche a perçu ce mouvement. Les sauveteurs sont immédiatement descendus par le treuil et ont pu le dégager en attendant l’arrivée d’un hélicoptère médicalisé.

Ensuite, même si son corps était coincé – comme dans un sarcophage dit-il, “c’était un peu comme du béton autour de moi” – il a pu en bougeant la tête dégager suffisamment la neige autour de son visage pour créer une poche d’air lui permettant de respirer. Pour ne pas se déshydrater, il mangera de la neige.

Il restera qu’il pouvait périr d’hypothermie. Mais fort heureusement, une forte douleur à la hanche l’empêchera de s’endormir, ce qui là aussi lui eût été fatal. Tous les alpinistes savent, au moins par oui-dire, que s’endormir lors d’un bivouac de fortune sans équipement adéquat est la meilleure façon de ne jamais se réveiller.

Enfin, il a mobilisé toutes ses ressources morales “Je me suis dit que je ne devais pas abandonner, c’était un peu une lutte contre moi-même, je devais faire ça pour les gens qui m’aiment, pour ma famille (…) J’étais persuadé de m’en sortir”. “Comme il n’était pas blessé, il a pu concentrer son énergie sur le réchauffement. Il avait aussi une très grosse volonté de s’en sortir”, a expliqué le médecin qui a participé aux secours, Marc-André Schaepfler.

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Il admettra sur son lit d’hôpital “avoir pris un risque inconsidéré et puéril”, les récentes chutes de neige et des températures relativement clémentes laissant entrevoir un risque d’avalanche élevé. Nul doute que cette épreuve lui serve de leçon : «Il ne faut pas skier juste après des chutes de neige et écouter ceux qui ont de l’expérience»

Mieux vaut tard que jamais ! Mais ce qui me laisse franchement sur le cul c’est d’apprendre que son père est mort il y a 5 ans. Déjà dans le Val d’Hérens. “Je ne pouvais pas imaginer perdre mon fils au même endroit que mon mari” dit sa mère. Une certaine dose d’inconscience serait-elle transmise de père en fils ? Mais je comprends mieux que le jeune Cédric se soit accroché à la vie avec l’énergie du désespoir et à la pensée de son frère et de sa maman : «si j’étais parti, je ne sais pas comment elle aurait vécu plus longtemps». Tout est bien qui finit bien.

SOURCES

Infos-SFR

Indemne après 17 heures sous une avalanche

Google AFP

Un skieur suisse “miraculé” après 17 heures dans la neige

24 heures

17 heures sous une avalanche: «J’ai pris trop de risques»


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