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Culbuto et résilience

Publié le 17 février 2010 par Gommette1

Le captologue Mona Bismarck 1Hier, la Fondation Mona Bismarck link a inauguré, avec la Fondation d’entreprise Bernardaud link, une nouvelle exposition consacrée à des artistes américains qui réinventent la céramique avec des œuvres surprenantes.
Parmi les huit talents présentés, j’ai retenu les « sculptures » de porcelaine de Jonathan Hammer, originaire de Chicago, qui a puisé dans le registre de l’enfance avec la création de sept culbutos, sept personnages sans visage qui se laissent bousculer sans jamais tomber.
« Je travaille autour d’un certain type de jouets, caractérisés par une ambivalence dans leur conception, leur forme ou leur fonction : à la fois bourreaux et victimes, maîtres et esclaves, dominants et dominés, explique Jonathan Hammer. Quelque chose que nous pouvons aimer et torturer, chérir et maltraiter. C’est pour moi une parfaite représentation du rôle qu’alloue la société à l’artiste : à la fois le plus libre de ses membres et celui sur qui chacun projette sa propre conception de la liberté jusqu’à l’emprisonner ».
Ces personnages étranges aux allures de clown incarnent-ils notre propre cruauté ? Le culbuto a une base arrondie lestée pour que même renversé, il puisse se redresse toujours à la verticale en oscillant : il ne craint pas les coups, il les esquive.
Le-captologue-Mona-Bismarck.jpgCes pièces en porcelaine sont une métaphore ludique du concept à la mode de résilience (du latin resilio, resilire, sauter en arrière, rebondir, résister au choc, à la déformation), concept répandu pour qualifier la capacité du « corps social à rebondir ». Psychologie de comptoir pour certains, stratégie de résistance pour d’autres, voire. Dans un environnement économique très déstabilisant et très violent, les individus cherchent à refouler les traumatismes, à surmonter les agressions. Les spécialistes affirment que le psychanalyste Boris Cyrulnik, auteur entre autres d’un livre intitulé « Un merveilleux malheur » (publié aux éditions Odile Jacob) aurait popularisé ce concept de « résilience » : une capacité d’adaptation face à un environnement hostile, une résistance face aux tensions, une positivité de soi pour se prémunir de l’extérieur, se protéger des tragédies de l'enfance.
Le-captologue-Mona-Bismarck-2.jpg
« La résilience est peut-être belle comme une perle, mais elle n’est jamais solide », dénonçe le psychanalyste Serge Tisseron agacé par cet abus de langage (in Le Monde Diplomatique août 2003). Parce que la personnalité « ne cultive pas l’art de rebondir », elle peut casser comme de la porcelaine… en témoigne les culbutos de Jonathan Hammer.
En attendant, je vous invite à aller voir cette exposition réjouissante à la Mona Bismarck Foundation 34 avenue de New York à Paris, jusqu’au 17 avril.
Photos : D.R.  


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