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Pierres de mémoire – Kate O'Riordan

Par Theoma

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« Mais il n'y a rien de raisonnable dans ce qu'on éprouve pour l'endroit d'où l'on vient ».

Nell n'est pas retournée dans son pays, l'Irlande, depuis trente ans. Impossible pour elle de faire ce pas, même pour l'enterrement de sa mère. Une nuit, le téléphone sonne. Elle sait déjà qu'elle va devoir revenir au pays pour sa fille.

Après mon coup de cœur pour Le garçon dans la lune, je me réjouissais de retrouver cette auteure irlandaise et je savais que je n'allais pas être déçue. Le ton est calme, patient et prudent sans être lent. A l'instar du personnage principal, la plume glisse sur des œufs pour ne pas heurter la sensibilité d'une fille devenue femme et mère à son tour.

Oui, filles, femmes, mères mais aussi grand-mère, petite-fille et belle-mère. Quatre générations de femmes tissées en profondeur et avec délicatesse. Des fantômes du passé qui empêchent le présent d'être. Des manières d'aimer influencées par notre Histoire. Des relations qui nous tuent, que l'on fuit, qui nous portent.

« Nell sourit jusqu'aux oreilles. Elle pourrait se pencher par-dessus le comptoir pour embrasser sa fille sur les lèvres. Elle n'a pas eu ce goût en bouche depuis une éternité. Elle prend une autre gorgée, et c'est comme si elle n'avait que du bon sur la langue, comme si les années de mésentente n'avaient jamais existé. Une vague de joie la submerge. C'est le cœur de sa fille qu'elle est en train de goûter ».

Et les non-dits. Ceux que l'on pense sans imaginer que l'autre les pressent. Ceux que l'on tait en étant certain que l'autre sait alors qu'il n'en est rien. Et l'amour qui n'est ni noir, ni blanc, ni lumineux, ni constant et qui sommeille parfois pour mieux revenir.

Une couverture rouge comme le sang qui nous lie aux nôtres. Rouge comme le vin que l'on est obligé de goûter si on veut en découvrir la saveur. Une lecture en crescendo qui nous offre un lumineux bouquet final. Une auteure jetant un regard éclairé sur son pays ainsi que sur les changements qui y sont survenus. Que dire de plus ? Encore !

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Éditions Joëlle Losfeld, 346 pages, 2009

Les pierres de mémoire, une belle idée...

« Elle les appelait ses pierres de mémoire, explique Nell. Quand elle avait plaisir à se promener ou à passer la journée quelque part, elle rapportait toujours une pierre sur laquelle elle écrivait la date et le lieu, parfois le nom de la personne qui l'accompagnait, ce genre de choses. Ensuite, quand elle rassemblait ses idées, comme elle disait, ou qu'elle faisait ses prières après la fermeture du pub, elle regardait les pierres et toutes les promenades lui revenaient. Toutes à la fois. Elle disait que comme ça, elle multipliait par cent la valeur de chaque bon moment. »


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