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Les heures souterraines de Delphine de Vigan

Par Ogresse
Les heures souterraines de Delphine de ViganEn refermant Les heures souterrainesde Delphine de Vigan, j’ai eu deux sentiments complètement contradictoires. La frustration tout d’abord (le roman se finit en queue de poisson) et l’envie de me précipiter sur No et moi pour goûter à nouveau au style de cette auteure de grand talent.
Disons-le tout cru: je me suis complètement identifiée au personnage de Mathilde, j’ai vécu avec elle la progression insidieuse de son harcèlement moral au sein de son entreprise au point de regarder mon directeur avec une méfiance inédite et d’entendre ‘pour de vrai’ le bruit des chasses et rouleaux de papier toilette avec Mathilde de son cagibi de l’exil. Bref, je me suis complètement plongée, immergée dans ses heures souterraines-là (j’ai envie de dire ‘eaux souterraines’ car on y manque notablement d’air).
J’ai un peu moins apprécié l’histoire de Thibault qui se déroule en parallèle et qui fait écho au mal être et à la solitude désespérée de Mathilde. Son histoire d’amour malchanceuse ne m’a pas convaincue mais la misère humaine, morale, qu’il rencontre quotidiennement en tant que médecin urgentiste, la colère qu’il ressent, la fatigue aussi, m’ont profondément touchée. Ce passage m’a émue tout particulièrement :

Dans l’entrebâillement, une vielle femme apparait. Pliée en deux, les mains agrippées à sa canne, elle l’observe quelques secondes avant d’ouvrir complètement. La transparence de sa chemise de nuit laisse deviner la maigreur de son corps. Elle parvient à peine à tenir sur ses jambes.
A l’intérieur l’odeur est très forte, à la limite du supportable. Une odeur de vieux, de renfermé, d’ordures. De l’entrée, Thibault distingue l’état de la cuisine. Dans l’évier la vaisselle s’est accumulée, sur le sol gisent une dizaine de sacs poubelles.
La femme le précède, avance à petits pas vers la salle à manger, l’invite à s’asseoir sur une chaise.
- Alors, que se passe-t-il madame Driesman ?
- Je suis fatiguée, docteur.
- Depuis combien de temps ?
Elle ne répond pas.
Il observe son teint gris, son visage émacié.
Elle a posé ses mains sur ses genoux. Soudain Thibault se dit que cette femme va mourir là, devant lui, s’éteindre sans bruit.
- Fatiguée comment, madame Driesman ?
- Je ne sais pas. Je suis très fatiguée, docteur.

Je recommande chaudement ce roman où, soit dit en passant, l’on sent bien que Delphine de Vigan s’amuse avec le lecteur, mais je n’en dirai pas plus, c’est à vous de le découvrir.
La note de L’Ogresse:
Les heures souterraines de Delphine de Vigan

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