L'Homme Armé d'Antoine Busnois

Après des enregistrements consacrés à Guillaume Dufay, l'ensemble Cantica Symphonia a enregistré un disque consacré à six messes attribuées à Antoine Busnois sur le thème de L'Homme Armé. L'unique exemplaire manuscrit de ce corpus a été retrouvé à la Biblioteca Nazionale de Naples. Il n'y a aucune certitude sur l'auteur de ces messes mais le nom d'Antoine Busnois est celui qui ressort de façon la plus plausible par les musicologues.

Le manuscrit comprend une longue dédicace à l'attention de Béatrice d'Aragon qui précise que les pièces qu'il regroupe étaient écoutées avec un grand plaisir par Charles le Téméraire. Chacune de ces messes est consacré à un thème récurrent dans la musique du Moyen Age et de la Renaissance, à savoir celui de "L'Homme Armé". On connaît particulièrement les messes fameuses de Josquin Desprez, de Cristobal de Morales ou de Palestrina sur ce thème, partant d'ailleurs d'une chanson assez répandue à la Renaissance et qui aurait conduit à la composition de près d'une quarantaine de messes au total.

Même s'il est finalement assez difficile de remonter précisément à l'origine de cette chanson, le livret du disque mentionne une source possible à savoir la célébration du départ de Simon le Breton, chanoine de Cambrai, parti en guerre contre le "doubté Turcq". La référence serait alors qu'après la chute de Constantinople, en 1453, toute l'Europe s'armait pour la nouvelle croisade.

L'ensemble Cantica Symphonie propose en introduction un Magnificat, composition entièrement polyphonique, également attribuée à Antoine Busnois. Ce Magnificat révèle une écriture à la texture assez resserrée mais avec un bel élan et une part belle laissée aux sopranos, contribuant ainsi à la sensation d'élévation que révèle cette pièce liturgique.

Ensuite, alternent des pièces purement instrumentales directement associées à la thématique de L'Homme Armé où des instruments comme les saqueboutes apportent une coloration tout à fait spécifique et des versets des messes du recueil. On notera le bel élan mystique incarné par le Kyrie (Messe VI) et le Sanctus (Messe VI). Antoine de Busnois procède à des groupements de voix sur plusieurs registres (sopranos, ténors, barytons) qui fonctionnent en accord et imitation. Le procédé est on ne peut plus classique. L'originalité est la coloration particulière de ces différentes sections des messes qu'apporte l'accompagnement instrumental des saqueboutes. Le Kyrie est divisé en trois partie dont une intermédiaire purement polyphonique.

L'ensemble Cantica Symphonia, avec sa parfaite maîtrise de la rhétorique du chant polyphonique de cette époque et son effectif vocal conséquent (4 sopranos, 4 ténors, 2 baryton), donne une certaine ampleur à cette messe avec une indéniable densité.

Leur projet ambitieux est parfaitement réussi. Leur souci de véracité fait qu'ils nous révèlent une musique avec des couleurs vocales et un instrumentarium d'une grande cohérence et nous plongeant dans l'atmosphère envoutante au coeur de la période Renaissance.

Remarquable projet, mené avec rigueur et pertinence et qui nous plonge dans cet univers polyphonique de la Renaissance avec tous ses mystères.

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Antoine Busnois - L'Homme Armé - Ensemble Cantica Symphonia - Label Glossa Platinum.