HARLEM ::: Hippies

Ma récente rencontre avec Shearwater avait donné des coups de canif dans le terrible cliché de la musique texanne. Patrie de Willie Nelson, Lucinda Williams et du folk barbu d’Okerville River, je m’étais dit, "le Texas, c’est une main sur la bible et l’autre sur des accords majeurs". Cordes en nylon, foi en airain. My ass…

L’esprit de Daniel Johnston, l’imbécile heureux de la pop, et des Butthole Surfers, connards psychédéliques démentiels, me traversaient bien la tête. Mais il avait fallu que Jonathan Meiburg me reparle d’Austin City Limits et SXSW, monstrueux festoche tentaculaire à chapeau courbe et fourbe, et qu’il me chiffre le campus local pour que je commence à comprendre. University of Texas at Austin : 50 000 nerds en t-shirt à carreaux avec un iPhone sous la casquette pour mater leurs pics de la dernière Spring Break. Vous ne connaissez pas cette traditionnelle période de vacance scolaire ? Google it, vous verrez que le carnaval ne se fait pas forcément en costume, et que le sacre du printemps se pratique souvent à quatre pattes. Bref, la traditionnelle bible belt ne tient désormais guère plus que le baggy vert canard... En rentrant de cet entretien, je m’étais fait une violente cure de Scratch Acid et Half Japanese pour bien faire descendre tout ça. Et la digestion avait largement dépassé mon duodénum quand éclatèrent les premières notes de Harlem.

Foutus hippies, ils sont partout.

Prêts à vous proposer l’amour libre à chaque minute, surtout si votre femme a des gros seins. Ils viennent jusque sous vos fenêtres pour vous offrir des fleurs en collier et vous body-painter les pieds. Quand ils ne sont pas là à psalmodier des chants indiens (la plume ou le point rouge, comme vous voulez, les deux sont disponibles au programme) c’est qu’ils vous font des poteries que vous ne voudriez même pas comme vase de nuit. La très bonne nouvelle, c’est qu’Harlem prenait un malin plaisir à détruire tout ça. Méthodiquement. Enfin méthodiquement... autant qu’une partition de Jad Fair ou un constat d’accident rempli par Roky Erickson.

Hippies n’est pas un album. C’est un massage du dos par un amputé des bras. C’est les Pixies jouant Brian Wilson sous ecsta. C’est une teuf au coin du feu qui tourne mal quand votre pote Bobby se crame la moustache en s’endormant bourré sur une buche. Et c’est très bien comme ça. Et puis ce qui me plait avec un nom de groupe pareil c’est qu’ils vont pouvoir faire la nique à tous ces néo-hippies africanistes branlo de la grosse pomme véreuse, incapables de différencier le Niger du Nigeria. Fela Kuti died dans son vomi...

Seigneur, si tu existes, saches que je te parle avec une main sur le nouveau Testament (au format iBook), fais que Vampire Weekend tombe dans l’Hudson avant qu’un A320 amerrisse dessus en urgence, et brûle les yeux d’Harlem pour qu’ils n’aient jamais envie de se faire prêcheur au détriment de leur guitares. Amen.

Harlem // Hippies // Matador (Beggars)
http://www.myspace.com/harlemduh