Magazine Journal intime

Les meufs de chez Perrotin (2)

Par Markhy

Il y a des kemés qui sont là comme ça. Ils sont D.A, ils disent, « je suis D.A. », et tu regardes le portfolio et tu trouves ça cool parce que c’est l’évidence même du mec qui n’a rien dans la tête sauf son quotidien de meufs bourrées, de tutos vectoriels que tout le monde a fait 100.000 fois lors d’une insomnie et de branlettes sur du mauvais porn. La direction artistique, dans pas mal de cas, c’est de l’autoproclamé. C’est comme Delphine Dumont sur redacbox.fr, c’est en tout point de la merde mais ça continue d’exister parce que « des gens » apprécient. Des putains de gens qui se laissent abuser par les premiers nazes venus remplir l’espace faussement vide. Je trouve ça cool ces fourvoyeurs, nos faire valoir.

Suffit de rouler sa bosse comme on disait en bas de l’immeuble. On était des putains de D.A. nous à l’époque. On avait Corel Photo House et un mixmag acheté pendant un séjour scolaire à Londres. Il y avait un CD mixé de Roger Sanchez dedans: Je suis sûr, je le mets dans la CDJ-1000 aujourd’hui et je fais semblant de mixer, ça passe nickel. On découpait les meufs du mixmag et on les scannait, on écrivait des conneries dessus. Genre Sidounie Sessions vol. 1. Le mot Sessions on l’avait piqué à Kruder&Dorfsmeister parce que ces connards osaient dire dans Trax que c’était déposé. T’as rien déposé du tout, enculé, tout nous appartient. On gravait des compiles, il n’y avait qu’un graveur pour tous les potes. On faisait des putains de street-tape à 2 exemplaires maximums, le gravage c’était long. Généralement de la french house, Trouble Men trois fois par CD. Le remix de Beatnuts c’était la connexion entre ce qu’on voyait à la TV et ce qu’on écoutait tous les jours. Traumatisme dingo.

Je l’ai repéré en me planquant galerie Anne Barrault, rue Saint-Claude. Quand tu te fais jeter de Perrotin à 19h02, à 19h02 putain, il y a toujours les galeries plus modestes qui n’ont pas fermé parce que la fille en tunique/botte/jambe nue n’a pas fini d’envoyer ses mails derrière le macbook blanc. Elle a les jambes croisés si tu voulais voir sa culotte. Le mec est passé dans la rue, dégaine de petite bite dans une chemise trop ample. Il puait le D.A. à plein nez. J’ai fait semblant de regarder l’expo de Hugo Hopping, c’était vraiment cool en fait. Ces mecs à L.A. ne savent pas qu’en France, Marcel Duchamp est un mec connecté à Julien Doré dans l’inconscient. Sérieux, la dernière fois que quelqu’un a parlé de Duchamp à la télé nationale, c’était avec Julien Doré comme invité. Alors Hugo Hopping est parti d’une œuvre de Duchamp et j’ai Moi Lolita en tête. Fuck France Culture Populaire. A Sugar Diet For Mystics, c’était le nom de l’expo. J’ai carotté tous les fly et mags qui trainaient, je considère comme anormal les piles trop pleines dans les galeries d’art. La meuf décrochait pas de son putain de macbook comme si le seul moyen de lui dire que j’étais dans la salle, en train de visiter son expo, eût été de lui envoyer un mail. Quand je suis sorti, je rebranchais le casque et le couple a manqué de me renverser. Bras dessus, bras dessous. Il lui a demandé si c’était bien la journée, j’ai failli répondre. Elle a dit que c’était cool, je n’ai pas entendu la suite. J’ai marché dans la direction opposée, hébété. J’avais un milliard d’idée qui s’entrechoquait dans la tête et ça formait une triangulation de Delaunay quand je fermais les yeux. Je me suis dis qu’il fallait que je mange un truc avant que je ne tombe dans les vapes.

(PS: J’écris pour le tag parfait. letagparfait.com)



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