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Le devoir d’être Sourd Québécois

Publié le 25 juin 2010 par Politicoblogue

Le devoir d’être Sourd Québécois

Fête Nationale

Je vous fais le plaisir de présenter la version originale du texte que j’ai écrit et préparé à l’intention de la lecture publique au Moulin à paroles du 23 juin 2010 au parc Molson, à Montréal dans le cadre des festivités de la Fête nationale du Québec. Je vous laisse lire et envisager l’avenir des Sourds Québécois avec résolution et confiance.

Bonsoir,

Il y a un an, je faisais le rêve que les Sourds soient de la Fête nationale du Québec. Nous vous remercions de nous accueillir. Ce droit de signer, nous allons le prendre.

Tout comme nous aspirons à signer, nous revendiquons le droit à une Option Sourde. Le Moulin à Paroles nous permet de nous retrouver ensemble.

Il n’est pas dit que la lutte pour la survie de la communauté sourde soit gagnée d’avance. L’histoire du Québec nous l’enseigne.

Mondialement, nous existons. Nous partageons plus d’une centaine de langues signées.

Nous avons survécu certaines périodes noires face à un monde qui tentait de nous imposer la parole unilatéralement, sans consultation.

Nous nous souvenons du 11 septembre Sourd, le congrès de Milan. Du 6 au 12 septembre 1880, des intervenants du monde de l’éducation se sont regroupés pour se prononcer sur l’avenir des enfants sourds.

Nous vous rappelons que des professeurs sourds enseignaient déjà à cette époque.

Au congrès de Milan, les participants, qui ont voulu mettre les intervenants sourds de côté, ont proclamé l’enseignement de la parole orale de façon exclusive.

Comme vous voyez, nous sommes plus à l’aise en signant. L’important est d’apprendre dans les langues que nous maîtrisons, de tenir compte des capacités réelles des enfants sourds et du mode de communication qui convienne à chacun. C’est ce principe de l’Option Sourde que nous défendons.

Depuis les années 1970, les signes sont de plus en plus reconnus comme constituant des langues à part entière.

Par la suite, au Québec, nous avons eu accès à l’éducation postsecondaire et nous avons plus de possibilités qu’autrefois.

Nous voulons réussir nos études, aspirer à une vie meilleure et exercer des emplois à la hauteur de nos ambitions.

Nous voulons des professeurs et des directeurs sourds dans nos écoles, des politiciens et des dirigeants d’entreprise sourds, des artistes et des écrivains de la condition sourde, et des Sourds dans tous les domaines où nous pouvons faire preuve de notre savoir-faire.

Nous sommes fiers des nôtres et réclamons le droit à notre différence.

Être Sourd, c’est appartenir à une communauté, la communauté sourde québécoise. Tout comme la communauté québécoise, nous partageons des moments historiques particuliers.

En 1760, la première école sourde était ouverte en France. Aujourd’hui, 250 ans plus tard après la Conquête, nous sommes toujours à réclamer notre appartenance collective.

Unissons les luttes sourdes et québécoises de manière à conquérir notre liberté citoyenne dans la concorde de nos forces mutuelles.

Au Québec, ça prend un premier député et locuteur sourd, voire plusieurs. Nous voulons être représentés fidèlement par les nôtres et conquérir nos aspirations démocratiques.

Nous avons bien sûr la mairesse de Longueuil, Caroline Saint-Hilaire, qui est sourde d’une oreille et qui connaît un peu la LSQ. Continuons le travail en ce sens et encourageons nos bons coups collectifs.

Au Canada anglais, en Ontario, les Sourds ont déjà eu un premier député, Gary Malkowski. À la fin des années 1980, il a défendu le principe de l’enseignement de l’American Sign Language et de la Langue des signes québécoise.

Au Québec, nous avons deux langues à sauvegarder, le français et la LSQ.

Depuis longtemps, nous revendiquons le droit de signer. Nous militons pour une éducation de qualité. C’est pourquoi nous visons collectivement la reconnaissance de la Langue des signes Québécoise.

Nous devons saisir cette occasion de faire l’histoire du Québec et franchir un nouveau cap dans l’établissement de nos droits collectifs.

Dénonçons l’affaiblissement généralisé de la loi 101 par la Cour Suprême du Canada.

Signifions notre désaccord global du principe du projet de loi 103 du gouvernement Charest qui achèterait un droit à l’éducation subventionnée en anglais et qui minerait la nécessité de préserver le bassin linguistique d’expression francophone.

Opposons-nous énergiquement et sans équivoque à cette dérive inacceptable de nos droits linguistiques.

Les langues signées font également face au phénomène de la fracture sociale.

Nous vivons avec la réalité des implants cochléaires depuis le milieu des années 1980.

Mondialement, nous faisons face à un péril. La survie de la communauté sourde risque d’être compromise s’il n’y a pas un réveil collectif.

Un jour, Raymond Dewar a dit des choses capitales quant aux pistes d’avenir de nos luttes citoyennes sourdes et québécoises.

Quoi qu’on dise et quoi qu’on fasse, le Sourd Québécois prend part à une certaine démarche. Il ne se contentera pas du rôle de spectateur. Il est l’acteur de son avenir collectif.

Sans dire que nous faisons face aux forces de l’argent, du pouvoir médical et des implants ethniques, il nous faudra rectifier certaines idées reçues et poursuivre le travail de sensibilisation, quitte à brasser la cage de nos tabous collectifs.

La devenue surdité de Michel Chartrand nous permet de constater l’absence médiatique des acteurs de notre condition Sourde Québécoise. Nous n’avons d’autre choix que de le dire. Le dernier Moulin à paroles nous permet d’en tenir acte.

Nous avons perdu certaines batailles, nous n’avons certainement pas perdu de vue la pertinence et la nécessité de poursuivre le combat.

Je profite de l’occasion pour dire aux Sourds implantés et à tous ceux-celles qui sont intéressés à apprendre des bases en langue de signes qu’ils sont les bienvenus au sein de la communauté sourde.

En outre, je tends la main aux Sourds, aux communautés culturelles et à tous les Québécois désireux de prendre part à la cause de l’indépendance nationale du Québec et à l’émergence du pays.

Renforcer la Langue des signes québécoise, c’est renforcer la cause du Québec français.

Le bilinguisme sourd qui nous permet d’apprendre une première langue signée favorise ensuite l’apprentissage du français écrit, qui est notre langue seconde. Établissons ce droit et permettons aux Sourds Québécois de s’enraciner au sein de la société.

Démontrons notre solidarité collectivement.

Nous avons pris conscience aujourd’hui de nos différences en tant que Sourds et entendants d’un même peuple, le peuple québécois!

Je vous invite à signer comme moi. Signes Droit. Signes Droit. Signes Droit. Voici comment nous applaudissons dans la communauté sourde. Applaudissements. C’est maintenant que nous nous disons à la prochaine.

AFFIRMER NOTRE LANGUE, C’EST AFFIRMER NOTRE CULTURE!

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