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Voisin à tout faire

Publié le 30 juin 2010 par Ruminances

Posté par clomani le 30 juin 2010

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Il est 18h, Paris est écrasé sous la touffeur en ce début d'été. Le dimanche, le quartier est mort à part deux cafés “branchés” qui se font face, de part et d'autre de la rue.

Deux voisines y boivent un coup : une Leffe pour la petite boulotte, une Corona pour la grande costaude. Elles parlent de la vie, la petite de sa maladie (Parkinson) avec laquelle elle vit courageusement, en la passant sous silence en général, sauf avec la “grande”. Parce que, la grande, elle a connu le cancer, les opérations, les chimios, les rayons, le traitement chimique de longue durée ensuite. Contrairement à beaucoup de connaissances, la petite n'a jamais lâché la grande, même pendant la maladie. Elle est allée la voir à l'hosto, ensemble elles ont organisé les fêtes des voisins, se font des petites bouffes… En revanche, la petite a peur : il lui est arrivé d'oublier son traitement contre ces brutales paralysies qui crispent son côté droit au point qu'elle ne peut plus marcher. Dans ce cas, elle appelle la grande au secours pour qu'elle vienne l'aider à atteindre son domicile, au 3e étage. Depuis quelques temps, l'âge aidant, les deux femmes ont de plus en plus de petits pépins, pas grand chose, mais elles s'entr'aident, se remontent le moral, vont faire les courses pour l'autre, etc.

Revenons à la scène : même à 19h, la chaleur est telle qu'en eau, les deux voisines décident, après avoir sifflé leur bière, de rentrer au bercail pour se rafraîchir chacune sous sa douche. 300 mètres plus loin, alors qu'elles passent la porte principale, elles croisent, qui sort, le voisin du Rez de Chaussée, côté cour. On appelle ça jardin parce qu'à Paname, dès qu'il y a 2 arbustes et 3 plans d'herbe, badaboum c'est un jardin. Il y a 2 ans, ledit voisin a réussi à faire couper l'arbuste qui “le gênait pour avoir de la lumière”. L'arbuste était rachitique mais offrait , au faîtage, 4 branches développant de rares petites feuilles, au niveau du 2e étage. Les immeubles tout autour ont tous 5, voire 6 étages et en été seulement le soleil donne jusqu'au 1er étage, jamais au rez de chaussée !

A la grande qui rouspétait de ne plus avoir de verdure devant sa fenêtre, il a répondu “votre confort visuel ne domine pas mon confort lumineux”. A quoi la grande a rétorqué “au rez-de-chaussée les loyers sont moindres à cause du manque de lumière”. L'arbre a néanmoins été coupé à sa demande. L'année suivante, il a fait un souk en rappelant le règlement intérieur de l'immeuble à la grande, cette fois-ci sous prétexte qu'elle avait fait pousser une jardinière de petites fleurs joliment rose-fuschia, laquelle jardinière pouvait lui tomber sur le crâne au cas où il mettrait la tête par sa fenêtre (le coin le plus sombre de la cour). Quelques années avant, il avait distribué dans toutes les boîtes aux lettres une lettre de 2 pages dans laquelle il s'insurgeait contre le fait qu'il trouvait des déjections canines sous ses fenêtres en appuyant lourdement sur le fait qu'il s'agissait de la chienne d'un couple avec lequel il s'était pris la tête “avant”. Mais, lors des fêtes des voisins où il se tapait l'incruste, il parlait aux mêmes voisins comme s'il n'avait jamais écrit de lettres de délation à tout l'immeuble.

Bref : un voisin “très sympathique”. A une fêtes de voisins il était allé dire à la grande qu'il partait pour Cancun/plage (beark) parce qu'elle avait invoqué, pour échapper à une réunion de locataires, un départ pour le Mexique (terrain pour son mémoire d'ethno).

Fin des flash-back, retour à hier. Il arrive, ne s'efface point pour laisser le passage aux deux femmes, qui tentent de se faufiler tout de même dans le petit hall de l'entrée. C'est alors qu'il apostrophe la plus grande et lui dit “tiens, ma mère vient de se refaire opérer à deux reprises d'un cancer du sein… 18 ans après le premier !”. “Ca se soigne très bien, actuellement” lui répond la grande en lui tournant le dos… la petite est interloquée… et gênée pour passer car il n'est pas mince. Et il recommence : “c'est dingue, c'est pas le même cancer…rien à voir avec celui d'il y a 18 ans… et elle a une pêche, ma mère !”. Pour se débarrasser de l'importun et qu'il laisse entrer sa voisine petite, la grande lui dit “avec ou sans chimios ?” A quoi il dit : “non, juste rayons après ablation des tumeurs”. La petite a enfin pu entrer et paarvient aux côtés de la grande qui a tourné les talons parce qu'elle n'a jamais envie de parler à ce con mais qu'il veut toujours tailler une bavette. Il a enfin fermé la porte faute d'interlocutrices.

Une fois dans le couloir, la grande et la petite éclatent de rire : “t'as vu un peu l'avertissement sympa qu'il me donne, ce con”, dit la grande… La petite, écroulée de rire : “non mais il l'a fait exprès ou c'est de la maladresse ? Quelle horreur !”.

La grande : “Pour les deux :

1°) il m'a gentiment rappelée à l'ordre ! Pas de déconne hein ? Vous êtes guettée par de multiples tumeurs… surtout vous, chimios hein… c'est grave… etc. !

2°) il est très con : c'est un flic, n'oublie pas ! Et pas un flic de base : il est maintenant à la police des polices du territoire (pas les boeufs-carottes qui travaillent avec la préfecture de Paris), après avoir bien bétonné les frontières lors de Schengen.”

Lorsqu'il en parlait à la grande,-elle s'occupait alors des demandeurs d'asile à la Cimade- elle lui volait dans les plumes mais rien n'y faisait. Le keuf, droit dans ses chaussettes et ses chers règlements de merde.

Vous avez compris que ça m'est arrivé hier soir… si bien qu'aujourd'hui, je m'interroge sur la connerie humaine à laquelle j'ai dû faire face à deux reprises récemment. Une première fois chez l'ostéopathe vu alors que j'étais coincée par une lombalgie. Au 1er coup d'oeil il me dit “je ne peux pas vous manipuler, on ne manipule pas un sumitoro comme un basketteur” (il faisait 1m65 à tout casser). Une deuxième fois par ce con de keuf du rez-de-chaussée que je méprise depuis longtemps, et qui, connement, veut absolument attirer l'attention sur lui par le biais de môman qui a le cancer du sein pour la 2e fois, à 83 ans !

Ma voisine la petite m'a dit, en montant les escaliers, secouée par le fou-rire que nous n'arrivions pas à stopper : “je comprends maintenant pourquoi il est resté célibataire… pis il aime sa môman” !

Conclusion : vive l'humour et vive l'amour comme disait Babel l'aut' jour.


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