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Du silence et des ombres

Publié le 11 juillet 2010 par Philippe Thomas

Festival international du film à La Rochelle, 3

A La Rochelle, c’est ce soir la fameuse Nuit blanche, le grand rituel de clôture du Festival. Je ne peux y être, hélas, mais je me souviens avec délices de ces Nuits blanches vécues naguère et qui se terminaient par un petit déjeuner chez André…

L’un des meilleurs souvenirs de cette 38e édition restera pour moi la découverte d’un très beau et puissant film de Robert Mulligan, Du silence et des ombres (NB, 1962) . To kill a Mockingbird est le titre original de ce film, redécouvert grâce à l’ardeur d’un cinéphile devenu distributeur. Atticus Finch (Grégory Peck) est avocat dans l’Alabama et va plaider, très habilement, la cause d’un ouvrier noir accusé du viol de la fille d’un fermier blanc. L’accusation ne repose pourtant que sur les déclarations de ce fermier, un ivrogne tout pétri du racisme ordinaire sudiste, et de sa fille soumise et manipulée par son père. Mais la force des préjugés est telle que le jury, composé exclusivement de blancs, condamnera à mort le pauvre Tom Robinson. La tension de ce procès au verdict pipé d’avance est extrême. Les fermiers sudistes affichent leur arrogance au parterre tandis que la communauté noire s’entasse silencieuse au balcon.

Au balcon, trois petits blancs se sont glissés, attentifs au procès et à la plaidoirie de l’avocat. Les deux enfants d’Atticus et leur camarade de jeu. Car la plus grande finesse du film est là, de se déployer à travers le regard de la petite fille. Les enfants découvrent la misère, celle des noirs mais aussi de petits fermiers blancs, jouent autour d’une maison hantée où un certain Boo demeure cloîtré par son père. Dans un tronc d’arbre près de cette maison, ils trouvent de petits objets qui semblent leur être adressés comme autant de signes de connivence… Ils découvrent aussi la peur, car leur avocat de père s’est fait des ennemis, et notamment le père de la prétendue victime… Atticus, qui est veuf, leur explique la vie comme il peut et a recours à une superbe image évoquant ce fameux oiseau qu’est le « mockingbird » et que le sous-titrage traduit par « geai ». Je ne sais pas si cette traduction est exacte ni si le geai est l’équivalent anglo-saxon de notre « merle moqueur »… La haute stature d’Atticus sait aussi bien manier une langue qui est celle de l’enfance que les arguties juridiques pour tenter d’humaniser le cruel monde des adultes et des préjugés. Il a aussi la sagesse de ne pas réponde aux provocations de l’odieux accusateur. Une fantastique composition de Gregory Peck, qui lui valut l’Oscar du meilleur acteur en 1963.

Du coup, je me suis promis de lire le roman de Harper Lee dont est inspiré ce film méconnu et qui ressort actuellement en France uniquement grâce à l’obstination de son distributeur enthousiaste. L’émotion de ce découvreur était palpable lors de la présentation qu’il en fit avant la projection. La mienne aussi, après. J’aurais bien voulu au moins lui dire merci mais je ne l’ai pas revu ensuite…


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