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“Enfarinades” mutuelles

Publié le 18 juillet 2010 par Jlhuss

riblon_ax-3_domaines.1279485473.jpg Étape 14 : Revel – Ax 3 domaines.

Les cadors se sont enfarinés mutuellement.

Numéro d’anthologie de Christophe Riblon parti dès le départ, dans une échappée qui s’est effilochée au fil du train d’enfer rendu nécessaire par la chasse des Astana. Derrière, on a noté dès la montée du Port de Palhières un beau départ de Carlos Sastre qui tentait et le rapprochement pour le top et et la victoire d’étape, de l’infâme Cunego (le suceur de roue que je poursuivrai de ma vindicte jusqu’à la fin du monde), de – Ô surprise ! – Menchov le transparent (mais toujours bien placé) et de Samuel Sanchez qui se rapprochent un peu des deux méga-cadors… lesquels se sont à plusieurs reprises marqués comme des pistards, quasiment à l’arrêt (Contador a bien sorti deux ou trois petites giclettes, mais sans forcer outre mesure).  Certes, si on se place dans l’optique de la journée, Schleck a eu raison de ne pas lâcher la roue de Contador (dès qu’il a laissé un coureur intercalé sur l’étape de Mende, il s’est fait avoir) seulement dans l’optique du

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Tour… les petites 31 secondes d’avance qu’il a sur “el pistolero”, dans l’étape contre la montre qui se courra la veille de l’arrivée, ça comptera pour des nèfles. Si Andy aborde ce CLM avec moins de deux minutes d’avance sur Contador, il n’a aucune chance. Doit-on défendre une éventuelle place de deuxième (quand on a déjà obtenu ce résultat) ou doit-on accepter le risque de perdre cet acquis pour avoir une chance de gagner ? Ma devise personnelle, c’est : “assommez, ne tapotez pas !” Vous savez donc ce que j’en pense !

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Armstrong qui finit encore très attardé, à 16 minutes de Riblon ! Je pense que l’hypothèse “se ménager pour gagner une étape pour partir en beauté” est en déshérence. Je me lance, je prends un risque : il est tout simplement cramé, carbonisé. Cela dit, il a répondu sans ambiguïté : “je n’abandonnerai pas, je veux arriver à Paris, en attendant je veux profiter des ‘bons moments’ (lesquels, Grands Dieux ?) et je compte bien arriver à Paris”.

En fin d’étape, Riblon, pisteur d’origine monte vers Ax - 3 domaines à fond comme un très grand grimpeur qu’il n’est en principe pas, les mains sur les cocottes, à la limite de se mettre dans le rouge sans jamais faiblir et passe la ligne en pleurant de bonheur. Quatre victoires françaises sur 15 possibles, c’est un résultat remarquable, d’autant plus que le peloton s’est considérablement “mondialisé”.

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On notera la bonne et courageuse opération d’Anthony Charteau qui est sorti du peloton à l’énergie pour grappiller quelques points supplémentaires pour son maillot à pois rouge.
Peu après il a fait la descente comme un fer à repasser qui aurait fumé un joint, à basse vitesse et quasiment tout le temps à contre trajectoire logique, cela à la surprise générale. Il s’en est expliqué à l’arrivée ; coup de fringale,
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il flageolait de partout, ne voyait plus clair et sachant qu’il manquait totalement de lucidité, il ne voyait pas l’utilité de se viander dans un ravin. On ne le redira jamais assez, la fringale ne pardonne pas !

Gruppetto de 76 coureurs dans une étape pyrénéenne certes pas facile, mais loin d’être la plus difficile, qui arrive à moins de six minutes des délais d’élimination ! Comme quoi la course est réellement très difficile.

Le vélo pour les nulsQu’est ce qu’une étape “contre la montre” ?

Le principe est simple, si l’exercice est d’une incroyable difficulté. Les coureurs partent à intervalle régulier, et doivent donc lutter sans aucune assistance (personne pour les abriter, pour leur permettre de se reprendre quelque peu s’ils coincent temporairement). Pour reprendre la formule du camarade Makhno, “tu pars à bloc, ensuite tu accélères et tu finis en sprintant”

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Le Seigneur du Contre la Montre, dans toute l’histoire du vélo, fut incontestablement Maître Jacques : Anquetil a gagné (entre autres) neuf fois le Grand Prix des nations, épreuve reine de cette discipline, qui se courait à l’époque sur 75 km et empruntait les routes très accidentées de la vallée de Chevreuse avant de se terminer en apothéose sur la piste rose du Parc des Princes. Il a également construit ses victoires dans la plupart de ses grands Tours dans les CLM. Le premier succès d’Anquetil dans le Grand Prix des nations fut en 1953. Il avait à peine 19 ans et est ainsi entré directement dans le monde des “cadors”. Parce qu’on ne gagne jamais un CLM par hasard ou sur fait de course, puisqu’on se bat sans assistance.

Si d’aventure vous rattrapez le coureur parti avant vous, ce dernier a interdiction de se placer dans votre sillage pour profiter de l’effet d’aspiration (il risque le déclassement).

Dans le temps, le directeur sportif suivait le coureur à bord d’une décapotable et hurlait instructions, indications et encouragements dans un mégaphone. De nos jours, c’est par les oreillettes qu’on communique, et les cadors bénéficient d’indications analogues à celles d’un pilote de rallye automobile : chaque courbe est signalée avec indication de trajectoire, nécessité de freiner ou juste de couper l’effort, possibilité de relancer à bloc, choix du côté de la chaussée qu’il faut emprunter (selon le vent et les abris possibles), existence d’obstacles, de ralentisseurs, de lignes blanches glissantes, etc. Ainsi débarrassé des contraintes “stratégiques” il peut se concentrer sur l’effort physique… d’autant plus que le cerveau très sollicité est également gros consommateur de glucose et d’oxygène. Autant tout garder, ou presque, pour les muscles.

Dans les courses par étape, les coureurs partent dans l’ordre inverse du classement général. Léger avantage donc pour le maillot jaune qui peut calquer plus ou moins son effort (s’il en a les moyens…) sur celui de ses concurrents puisqu’il part le dernier.

J

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e regrette personnellement qu’il soit – définitivement semble-t-il – mis fin à l’ancienne organisation du Tour, quand la toute dernière étape était un CLM qui se terminait soit au Parc, puis, plus tard, sur la “Cipale”, enfin sur les Champs Élysées. D’abord parce qu’on pouvait acclamer individuellement chaque coureur, ensuite parce que le suspense était porté à son paroxysme jusqu’à la fin. En 1964, avant le Versailles-Paris CLM, 24 petites secondes seulement séparaient un Anquetil intrinsèquement plus fort que Poulidor dans cet exercice, mais ce dernier était “plus frais”. La France entière s’est arrêtée de vivre ce dimanche après midi de “finale de Tour” gagné par Anquetil – qui avait aussi remporté cette étape. En 1968, Janssen piquait la tunique jaune à Van Springel sur la Cipale, de même, que, en 1989,  LeMond dépossédait Fignon de la sienne sur les Champs.

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Jusqu’à la fin des années 1980, les coureurs utilisaient des vélos classiques pour les CLM (juste un peu plus légers, avec des boyaux plus fins). Peu à peu des bécanes dédiées à cet exercice très particulier ont été mises au point. Profilage maximal, roue “lenticulaire” à l’arrière : les rayons ou les barreaux offrent une prise au vent (on ne met pas de roue lenticulaire à l’avant car en cas de vent latéral, une rafale envoie à tous les coups le coureur valser dans le décor) guidon spécial qui permet, dans les trajectoires rectilignes, de rapprocher les mains au maximum pour améliorer l’aérodynamisme. Les coureurs ont également une combinaison intégrale parfaitement moulante (les plis, ça offre une résistance au vent) de même qu’un casque profilé avec une visière qui couvre intégralement le visage, et ceux qui ont des ambitions en ce domaine font des essais en… soufflerie pour améliorer leur taux de pénétration.

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Les contre la montre par équipes se courent… par équipes. Chaque coureur prend le relai à tour de rôle, et tente de ne pas se faire décrocher en phase de récupération quand il est en position arrière (en général, le temps de l’équipe est pris sur le troisième qui franchit la ligne). L’épreuve est à la fois très technique et terrible sur le plan physique. Personnellement, si je suis en faveur du CLM par équipe au cours du Tour de France, j’estime que ses résultats ne devraient compter que pour le classement par équipes – même si on peut imaginer que dans le cadre de ce classement, par le jeu de bonifications, il revête une importance particulière. Il me paraît anormal qu’un coureur gagne – ou perde – un classement individuel par le biais d’une épreuve collective.

Le Seigneur du CLM, de nos jours, c’est Cancellara. Mais quand l’enjeu est important (un Tour, par exemple), il peut se faire dominer par Contador, comme l’an dernier

Le Grand prix des nations a disparu, hélas, en 2004.

Il y avait aussi “aux temps d’antan” une sacrée épreuve : le trophée Barrachi. Il se disputait sur cent kilomètres, par des paires de coureurs associés qui se relayaient mutuellement. Les engagements ne dépendaient pas des équipes et deux coureurs habituellement concurrents pouvaient s’associer pour cette épreuve très exigeante.

L’ancien du Jour : Octave Lapize, choisi parce qu’il fut le premier à franchir les Pyrénées en tête, il y a tout juste un siècle. A l’arrivée, il s’est approché d’Henri Desgranges et des commissaires de course et leur a hurlé : “VOUS ÊTES DES ASSASSINS !!!”

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Le Chat : C’est vrai ! C’était assez impressionnant de voir les deux lascars fairent presque du “sur place”, comme dans les virages du Vel d’Hiv pour ne pas passer devant ! Bizarre quand même sur le Tour. Perso je n’avais jamais vu ça.

Bon ! Schleck aurait un plan ? Mais honnêtement je ne vois pas comment il va faire pour gagner à Paris s’il ne décramponne pas l’Espagnol. Comme ça, à vue de nez, Contador me semble bien plus “malin”, un tantinet manipulateur l’Ibérique … Et puis il a été à rude école avec Armstrong ! Non ?

Bien brave le Schleck, mais me semble-t-il encore un peu tendre, il pourrait bien être “l’enfariné” au bout de la route.

Résumé vidéo de l’étape

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