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Thérèse Clerc et les Babayagas.

Par Laurelineamanieux
Thérèse Clerc et les Babayagas.
"J'ai découvert Marx à l'Eglise", raconte Thérèse Clerc, la créatrice de la Maison des Femmes de Montreuil et de ce projet innovant, désormais soutenu par les politiques, la Maison des Babayagas pour vieillir autrement, dans la solidarité et la citoyenneté (une maison autogérée et écologique), qui fait déjà des petits dans toute l'Europe.
Thérèse est de ces êtres humains qui vous donnent la foi en un projet humaniste, et aussi des pieds bien ancrés sur terre pour accomplir vos propres idéaux.
Parce que "la Mort est un projet d'avenir", que la vieillesse peut être une magnifique période de "temps choisi" et de fécondité nouvelle : Thérèse Clerc change notre regard sur la troisième âge, elle en fait un âge béni.
Issue d'une famille bourgeoise de droite, catholique, elle se marie à une époque où elle se voit interdire par son époux de travailler, de posséder son compte en banque et de s'éveiller à la politique. Une association de prêtres ouvriers sème les premières graines de révolte en elle. Son tempérament autodidacte fait le reste. Après 1968, à 42 ans, "j'ai jeté les tailleurs Chanel par la fenêtre et les escarpins, je suis descendue dans la rue". Elle divorce, travaille, prend en charge ses 4 enfants (qui lui ont donné 14 petits-enfants !), milite pour tous les droits des Femmes, découvre les mille et uns plaisirs d'une "homosexualité politique" et l'amour hétérosexuel libre dont le goût à 82 ans ne lui est pas passé, au point d'avoir tourné dans le film de Jean-Paul Raynaud, L'art de vieillir (Prix 2006 du festival documentaire de Montréal) et d'y décrire avec ferveur la sexualité après la soixantaine. Elle nous raconte d'ailleurs en riant les propos d'un militant de son âge : "avec ma bouche et mes mains, je fais encore des miracles" !
Sa biographe, Danielle Michel-Chich, la surnomme dans un texte documenté et riche, publié aux éditions des Femmes-Antoinette Fouque : "Antigone aux cheveux blancs" parce qu'elle "veut l'absolu, absolument", et qu'elle en invente sans cesse les moyens pour que ses utopies s'incrivent dans le réel : "c'est le comment dont je m'occupe, pas le pourquoi" nous dit-elle.
Alphabétisation des étrangers immigrés, soutien scolaire aux enfants en difficulté, transmission de leurs savoirs de femmes vieillissantes mais toujours tournées vers le partage utile pour la société, ateliers multiples... La Maison des Femmes est ce lieu de transformation des êtres pour leur donner le moyen pragmatique de se positionner dans notre société.
La Maison des Babayagas, en pleine construction à Montreuil avec une fin de chantier prévue dans 3 ans, en sera le prolongement, et proposera même UNISAVIE (Université des Savoirs pour les Vieux), et un "spa militant"
ouvert aux femmes du quartier, celles qui n'ont pas le droit de se rendre dans les bains publics, et où l'on imagine les discussions vives : contre le port de la Burqa, ou pour le respect de la loi sur l'avortement, de la contraception, sur l'indépendance financière et l'autonomie féminines, autant de sujets essentiels pour Thérèse et les Babayagas !
Rencontrer Thérèse Clerc pour notre Webtv "savoirchanger" restera dans les annales de notre mémoire : voir cette vieille dame de 82 ans arriver dans l'Espace des Femmes, la magnifique salle de conférence et d'exposition rue Jacob à Paris, grâce à l'aide énergique de l'attachée de presse Guilaine Depis, la voir s'asseoir avec simplicité dans la chaise préparée par les caméramans juste devant un puit de lumière tombant sur les plantes et les statues de Mâkhi Xénakis qui habitent le lieu encore quelques semaines, et soudain entendre sa voix nous secouer les méninges, nous faire rires aux larmes, nous émouvoir, et nous placer sans sourciller devant les manques et les dangers civiques de notre réalité sociale.
Quand le caméraman Soffian a arrêté la caméra, il est allé la remercier aussitôt, parce que son discours l'avait "nourri", parce qu'il y avait retrouvé aussi les combats et la vie même de sa propre mère, des valeurs qui le fondent lui-même j'en ai encore les yeux et l'esprit pétillants, passionnés, éveillés à des engagements nouveaux. Le montage des vidéos est bientôt en cours pour http://www.savoirchanger.org/. En attendant, Thérèse Clerc se livre ici si vous souhaitez la découvrir :
Thérèse Clerc et les Babayagas. Laureline Amanieux.

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