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“Le Bruit des Glaçons” : danse macabre

Par Kub3

Bertrand Blier, Jean Dujardin, Albert Dupontel : le trio gagnant d’une comédie grinçante, totalement originale et décomplexée.

“Le Bruit des Glaçons” : danse macabre

Ecrivain de renom, il a obtenu les récompenses les plus prestigieuses et la reconnaissance sans réserve de ses pairs. Mais quelle vie après la gloire ? Charles (Jean Dujardin) n’a dorénavant que faire de pondre un nouveau chef d’œuvre, et pour cause. Barricadé dans sa résidence secondaire loin de Paris, notre homme a trouvé refuge dans l’alcool. Enchaînant les bouteilles de vin blanc avec une descente infernale, il reçoit un beau jour la visite inopinée de… son cancer (Albert Dupontel), sorte de diablotin, cousin éloigné de Pierre Richard. « Vous avez une vie de merde, votre femme vous a quitté, votre Goncourt vous l’avez déjà eu, vous buvez comme un con »… Après tout, la mort est peut-être la meilleure des options, Charles lui-même finissant par s’en convaincre.


A 71 ans, le réalisateur des Valseuses n’a rien perdu de son humour noir et de son goût de l’absurde. En faisant du cancer un personnage à part entière (visible uniquement aux yeux de ceux qui aiment le malade), Bertrand Blier conjugue l’inquiétant et le désinvolte, les instants de pure comédie et le fantastique. Il y a du Shining, dans Le Bruit des Glaçons. Une maison reculée labyrinthique, des non-dits et des secrets enfouis, un homme dépressif en proie aux hallucinations : la caméra rampe et se faufile habilement sur des sentiers borderline. La caricature de l’écrivain alcoolo devient poésie existentielle, à la fois profonde et subtile, au fil d’une narration très imprévisible où les personnages évoluent à la fois dans et hors de l’histoire, existant autant qu’ils se racontent eux-mêmes. Blier ose, bouscule les règles, et donne un sacré coup de jeune à la comédie française, souvent poussiéreuse et prévisible. Comme l’a élégamment titré Le Monde dans sa critique du film : « plus importun, tumeur ».

Le Bruit des Glaçons reste avant tout un pur moment de comédie surréaliste et ambitieuse. Les joutes verbales entre Jean Dujardin et Albert Dupontel, souvent jouissives d’impertinence et de méchanceté légère, alternent avec des instants de réelle tendresse. Mais si les dialogues font mouche, c’est cependant dans la mise en scène autour des rôles secondaires qu’il faut chercher le véritable enjeu dramatique. Face au spectre menaçant de la mort imminente, les désirs charnels resurgissent de plus belle. Des balbutiements sexuels du fils de 16 ans aux ultimes relents passionnés entre Dujardin et sa bonne dévouée (Anne Alvaro) - elle-même gagnée par la maladie -, Le Bruit des Glaçons prend des allures de fantaisie mortuaire. Prions pour que cela se termine bien. Après tout, il ne s’agit que d’une comédie, non ?

“Le Bruit des Glaçons” : danse macabre

En salles le 25 août 2010

Crédits photos : © Wild Bunch

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