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Á Nîmes c’est la féria des Vendanges, olé!

Publié le 01 septembre 2010 par Frontere

Á Nîmes c’est la féria des Vendanges, olé!(Simon Casas, Directeur des arènes de Nîmes, photo La Provence)

→ Le journal mensuel numérique “Une à Nîmes“ m’a demandé d’écrire l’éditorial de son N°4, qui vient de paraître, et c’est bien volontiers que j’ai accepté la proposition de Jérôme Puech, rédacteur en chef. Je publie ici une version intégrale du texte que j’avais rédigé initialement mais qui était trop long au regard des contraintes éditoriales du journal.

Après dix ans passés ici, je suis ce qu’il est convenu d’appeler un nîmois d’adoption.

Mais je suis un cousin, ma ville natale, Béziers, où j’ai vécu près de trois autres décennies, et notamment pendant cette période flamboyante (1971-1984) où l’A.S.B. de Raoul Barrière dominait de la tête et des épaules le rugby hexagonal, présente de nombreuses similitudes avec Nîmes : méfiance à l’égard de Paris et de ses élites, présence d’arènes romaines nichées au cœur des deux villes, elles ont généré la tauromachie avec son mundillo et ses cohortes d’aficionados, rugby, j’y reviens, il a permis à de nombreux joueurs (Didier Cambérabéro, Marc Andrieu) des allers - retours entre les deux clubs… et les deux gares ; on parlait hier du grand Béziers avec ses villages et ses vignerons héritiers de Marcelin Albert dont ils ont perpétué le message, on devise aujourd’hui de l’agglo de Nîmes avec ses 27 communes qui ont fait le choix de l’intercommunalité.

Bref, je connaissais les vins de l’arrière-pays héraultais, le Faugères ou le Saint-Chinian, j’ai découvert le Campuget et les Costières ; et je vis toujours dans l’ancienne Gaule narbonnaise.

Et il me semble, avec ce recul décennal, que la vision que la plupart des touristes peuvent avoir de Nîmes en cette période estivale, cette fin du mois d’août qui doit son nom à l’empereur Auguste (en voilà un qui l’aimait la cité des Antonins!) est une vision en trompe-l’œil. À telle enseigne que la ville, si elle pouvait parler, le ferait vraisemblablement à la manière d’un poète du XIXe :

Mon âme a son secret, ma vie a son mystère¹

ou bien elle demanderait à un autre poète, plus contemporain, de se faire son porte-voix :

Mais les gens sav’nt pas qui tu es
Ils viv’nt chez toi mais t’voient jamais²

ce qui de manière prosaïque reviendrait à déclarer : « Je ne suis pas celle que vous croyez! »

« Vous m’imaginez, continuerait-elle, débridée et méditerranéenne, aux mœurs ostentatoires, une sorte de royaume de la montre³, je suis secrète et introvertie, seuls quelques happy few font partie de mes intimes. Ne vous fiez pas à ma féria de Pentecôte, il y a belle lurette que mes vrais amoureux lui préfèrent la féria des Vendanges. »

La tauromachie, ici comme ses premières amours on y revient toujours, elle a ses contempteurs, ils veulent obtenir son interdiction. L’exemple nous vient, dit-on, de Catalogne. Mais n’y a-t-il pas eu en l’espèce, de la part de nos amis catalans, la volonté de se démarquer une nouvelle fois de Madrid, de remettre les choses en place après le semblant d’unité hispanique qui a suivi la victoire de l’Espagne en coupe du monde? De renvoyer la corrida à sa période franquiste?

Pour ma part, opposé à une extension des places taurines, je reste favorable à la corrida là où existe une “tradition locale ininterrompue”, selon la formule issue de la jurisprudence. Dans ce combat, j’ai trop le sentiment que les abolitionnistes se font les héritiers des barons du Nord quui voulaient dompter les Cathares, des hérétiques selon eux. Privés de corridas et des sesterces qu’elles engendrent que deviendraient Arles, Nîmes, Béziers et leurs amphithéâtres romains? Quelles seraient les chances de survie de la race taurine?

Mais Nîmes a su aussi se tourner tôt vers l’avenir avec Carré d’Art et l’option prise en faveur de l’art contemporain et des nouvelles technologies de l’information et de la communication, le bâtiment a été conçu par Norman Foster sur le site même de l’ancien théâtre à l’italienne sinistré en 1952, quel symbole! Là, en face d’un temple gréco-romain vieux de deux mille ans, a lieu le festival de la biographie où se bouscule un public fervent ; un rendez-vous désormais national.

Sol y sombra, tradition et modernité, c’est ainsi que je vois Nîmes.

Notes

¹ Félix d’Arvers, Le sonnet d’Arvers, recueil « Mes heures perdues »
² Léo Ferré, Paname
³ l’aspect extérieur, l’apparence, l’apparat

Post-scriptum :

- cette année la “féria des Vendanges” aura lieu du 16 au 19 septembre
- après la fin de cette période estivale, je reviendrai dès mon prochain billet à la littérature


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