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Yasmina Khadra - L’olympe des infortunes

Publié le 09 septembre 2010 par Ruminances

Posté par lapecnaude le 9 septembre 2010

Yasmina Khadra - L’olympe des infortunes

Il m'a fallu attendre que les “critiques littéraires professionnels et amateurs” aient déversé qui leur fiel, qui leurs louanges sur le dernier livre de Yasmina Khadra - L'Olympe des Infortunes - pour vous en donner mon modeste avis.

En effet, on attendait de Khadra qu'il nous raconte une histoire d'arabes, puisqu'il est arabe, on l'a catégorisé, à chacun sa boite, à chacun sa spécialité … en dehors de tout préjugé bien sûr ! Hors Khadra est un écrivain-vrai, et rompant avec les clivages xénophobes à la mode il nous parle de nous, tous, de nos miséreux, nos clodos, nos réprouvés, ces fracassés de la vie que la société rejette et qui ont “le front” de renier cette même société. Ils n'ont pas de race, pas de pays, pas de drapeau, pas d'hymne. ILS SONT LES HORR ! Voyez cette similitude phonique : HORR et ROM ? - des HOMMES LIBRES !

Dire qu'ils n'ont pas de pays ? C'est faux, ils sont là où la ville les a rejetés, entre un dépôt d'ordures, un terrain vague et une plage sur la mer ! . “Acheter ? c'est pas dans nos habitudes. C'est une hérésie, un acte contre nature …”(…) “C'est quoi la vraie liberté Junior ?” demande Ach le Borgne, “La vraie liberté est de ne rien devoir à personne”, “Et la vraie richesse ?”, “La vraie richesse est de ne rien attendre des autres” répond Junior. Toute leur philosophie est là.

Ils sont toute une bande, une femme, Mamma qui trimballe dans une brouette son fils ( ou son frère, ou son mari, on ne sait plus) qui est tout le temps soûl, la bande du Pacha et son giton Pipo, Dib le jaloux de Pipo, Négus qui a la fibre militaire et passe sont temps à faire défiler au pas le moindre quidam ou chien galeux qui passe, Junior le simplet et son mentor Ach le Borgne qui joue du banjo et fait chanter la lune. Drôles, cocasses, tendres, libidineux lorsqu'ils “matent” Mamma à sa toilette…

Tout ce monde vit sur et par la décharge et vilipende “la ville sans âme et sans fraternité” alors qu'ici “lorsque la mer est agitée, pour les gens de la ville il fait mauvais temps, pour un Horr, la mer est en fête. Et pendant que les gens de la ville s'enferment chez eux, nous surplombons la falaise et nous assistons aux noces des flots en nous taisant (…) un Horr décèle de la musique dans chaque fracas. C'est çà notre privilège ! Dans ce lieu de non-sens la vie s'écoule lentement au cœur de cette cour des miracles ou chacun cherche à donner raison à sa vie. De temps à autre des gens venus d'ailleurs apparaissent et s'en repartent, vagues de chiffonniers en quête de “trouvailles”, d'autres disparaissent ou meurent. Monde toujours en discussion, toujours en mouvement.

Mais ce ne peut rester statique avec Khadra, il est conteur, poète, écrivain et il rompt avec le scénario sans changer de style, il fait arriver un certain Ben Adam, homme de grande stature à la robe immaculée et au verbe de miel qui vient tenter de sauver de la déchéance toute cette petite bande “je ne suis pas venu en ennemi, je suis venu vous dire que l'échec relève de la mort et que tant que l'on est en vie on a le droit de rebondir”. Junior est subjugué, Ach furieux “charlatan, semeur de zizanie, gourou, charmeur de nigauds, détrousseur de simplets, détourneur d'amis !”, c'est la suprême injure dans la bouche de Ach, qui, malgré tout, écoute et réfléchit, change d'opinion sur ses voisins… Comment ? Pourquoi ?

S'en suivent toute une série d'évènements, de dialogues savoureux et saugrenus, sur tout , la vie quoi ! Junior partira, Ach ira au bout de son désespoir, Junior l'attend…

Concernant les réprouvés, les exilés de la civilisation, Khadra dit que “les lois relèvent plus de la répression que de l'intelligence , c'est parce que les clochards ont été blessés qu'ils renoncent et tournent le dos à la société, devant l'hypocrisie humaine ils rejettent la ville et vivent de ses détritus”. Son héros est Steinbeck, le débat d'identité n'a plus de place dans une nation mais la citoyenneté, oui. Pour lui, la liberté n'a jamais existé, ce n'est qu'un phantasme. On peut s'en poser la question.


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