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Retraites, fiscalité : un gouvernement d'irresponsables

Publié le 14 octobre 2010 par Juan
Retraites, fiscalité : un gouvernement d'irresponsablesSur le site de l'Elysée, l'action du président Sarkozy est présentée avec des accents nord-coréens : « Lascaux, Maison de l'Histoire de France, Ciné Lycée, le Président aux avant-postes sur les projets culturels. » Pourtant, l'essentiel était ailleurs. Au lendemain d'une forte journée de manifestations et de grèves, contre son projet de réformes des retraites, Nicolas Sarkozy a fait savoir qu'il n'y changerait rien. Ses ministres se sont succédés dans les médias pour justifier cette attitude dite « responsable », pour mieux dénoncer « l'irresponsabilité » de ses opposants et critiques.
La responsabilité consiste à assumer ses propos et ses actes et leurs conséquences, et en toutes circonstances. A écouter Sarkozy et ses ministres, à considérer leurs actions et leurs mensonges, leurs pirouettes et leurs approximations, on comprend que l'irresponsabilité se loge une fois de plus à l'Elysée, au coeur du gouvernement. Qu'il s'agisse de fiscalité, de retraites, ou de maintien de l'ordre, le gouvernement Sarkozy agit en irresponsable.
Sans doute, et, pire, sans gêne.
Baroin, irresponsable ?
Mercredi matin, François Baroin était interrogé par le journaliste Patrick Cohen sur France Inter. Le ministre du budget a critiqué la gauche, socialiste en particulier. Peu avare en caricature, il a fait mine de comprendre que le PS réclamait la retraite à 60 ans, pour tous et à taux plein. Il a eu beau jeu d'attaquer les propos de Ségolène Royal, la veille, qui louait la mobilisation des jeunes contre la réforme des retraites. Baroin a aussi insisté sur le devoir de responsabilité, face aux déficits et au défi démographique, etc etc...
Puis, au détour d'une phrase, emporté dans son argumentaire, il a lâché ce propos historique : « Nous ne voulons pas dans la précipitation, dans cette loi de finances, faire sauter le bouclier fiscal, qui est devenu un symbole d'une injustice sociale... un peu injuste aussi... parce que s'il y a une raison au bouclier, elle vient de la gauche, de Michel Rocard, qui le premier avait imaginé un plafonnement à 70%
Baroin s'enfonce ensuite : « on est passé de 70% sous Rocard, à 60% sous Villepin puis 50% sous Sarkozy. » Rocard en a rêvé, Villepin l'a fait ! On croirait un slogan publicitaire ! Le bouclier fiscal n'est pas de 50%, car Sarkozy a inclu dans son calcul la CSG et le CRDS, deux prélèvements destinés au financement de la Sécu. Autre tartufferie, Baroin tente de faire croire que le principe du bouclier est plus important que son niveau.
Au final, quel aveu ! On a largement commenté combien le bouclier fiscal à 50% était l'un des marqueurs de Nicolas Sarkozy. Il y a quelques mois à peine, le ministre Baroin, fraîchement converti à l'orthodoxie sarkozyenne, défendait la « stabilité fiscale » pour refuser toute modification du bouclier fiscal. Puis voici, en quelques jours, le même Baroin accepter de revoir cette disposition inique dès juin prochain, à l'occasion d'une loi de finances rectificative.
Dire tout et son contraire, est-ce bien responsable ? Baroin s'abrite derrière un souci pédagogue pour justifier ce reniement public : « Je suis pour la pédagogie, pour expliquer que s'il y a un ISF, il faut un bouclier et s'il n'y a plus de bouclier, alors il faut avoir le courage d'affronter le dossier, tout aussi symbolique, de l'ISF !»
Mercredi après-midi, l'amendement soutenu par 117 députés UMP prévoyant la suppression du bouclier fiscal et de l'ISF était rejeté en commission des Finances.
Irresponsable, Nicolas Sarkozy ?
Au sortir du Conseil des Ministres, Nadine Morano puis Luc Chatel ont rapporté les propos du président français. Malgré la mobilisation record contre la réforme des retraites, Sarkozy restera « inflexible » et la réforme sera menée « jusqu'au bout ». « Quelles que soient les difficultés de mise en oeuvre d'une réforme aussi importante que celle des retraites, le gouvernement doit dans l'intérêt général avec le Parlement poursuivre avec détermination et sang-froid. » a expliqué Chatel.
On oublierait presque que Nicolas Sarkozy lui-même rappelait il y a 18 mois qu'il n'avait pas été élu pour toucher à l'âge de départ à la retraite. Début 2010, le même Sarkozy n'évoqua pas d'éventuelles évolutions conjoncturelles pour motiver son revirement. Il aurait pu. La grave récession, débutée en 2008, aurait pu lui servir de prétexte. Mais non. A l'époque, le chef de Sarkofrance préféra invoquer le « défi démographique », comme si ce dernier lui était apparu soudainement pendant les fêtes de fin d'année 2009. C'était évidemment une belle tartufferie.
Fin 2009, Sarkozy flippait pour ses comptes publics, très fortement dégradés par la crise, son paquet fiscal, et même son Grand Emprunt. La réforme proposée pour les retraites avait un objectif : rassurer les marchés, dont les agences de notation. Afficher quelques milliards d'euros d'économies, fussent-elles obtenues sur le dos des travailleurs au motif de sauver la retraite par répartition, quelle aubaine !
Acceptons un instant l'idée que Sarkozy, en 2007 ou en 2008, s'était trompé en ignorant à l'époque le problème des retraites. Acceptons l'idée qu'il ait compris que le problème était sérieux. S'agissant d'une réforme nécessairement majeure et structurelle, pour laquelle il n'a pas été élu comme il le reconnaissait lui-même, n'aurait-il pas dû organiser une meilleure concertation et une véritable négociation ?
Mercredi matin, Baroin, Woerth et Bachelot ont présenté le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2011. Grâce au plan d'économies et de déremboursements annoncés il y a 15 jours (2,5 milliards d'euros) et à la réforme des retraites (1,3 milliards d'euros), le déficit serait réduit à 21 milliards d'euros (contre 23 milliards estimés pour 2010). Rappelons-nous un constat du candidat Sarkozy, il y a un siècle, en 2007 : « S’agissant des recettes, fondamentalement, la solution est évidemment le plein emploi. C’est parce que nous n’avons pas le plein emploi que nous avons des déficits sociaux. » Ce constat, électoraliste mais lucide, a été bien vite oublié. Aujourd'hui, la santé, dans le discours sarkozyen, est un coût qu'il faut réduire pour le plus grand nombre, et concentrer sur quelques missions prioritaires, l'hôpital ou les maladies graves.
Mercredi, devant des députés du Nouveau Centre, Nicolas Sarkozy a expliqué qu'il «mettrait des réformes sur la table jusqu’à la dernière minute de (son) quinquennat». Il y a 6 mois, sonné par l'échec des élections régionales, il avait annoncé une pause dans les réformes en 2011. Courant comme un canard sans tête, l'homme croit désormais qu'il lui faut s'agiter pour reprendre la main sur l'agenda politique. Cité par l'un des participants à cette réunion, il aurait déclaré: «Moi, je travaillerai jusqu’à la fin de mon quinquennat. Si je devais être candidat, à ce moment-là, il sera temps de discuter d’un nouveau sujet. » Quelle belle affaire ! Le plan sarkozyen est d'éviter de laisser commenter son (in)action ou son (in)efficacité depuis 2007. Jusqu'à la dernière minute, il lui faut paraître occupé. Mercredi, il a d'ailleurs redécouvert que l'emploi des jeunes était un problème ... « L’année prochaine, je veux aussi qu’on mette le paquet sur l’emploi, notamment l’emploi des jeunes »  Serait-ce lui faire injure que de penser qu'il n'a eu cette réflexion qu'à cause des milliers de jeunes manifestants, la veille, contre son projet de réforme des retraites ?
Irresponsables, les forces de l'ordre ?
Mercredi, le directeur général de la gendarmerie nationale, le général Jacques Mignaux, était auditionné par la commission des Lois de l'Assemblée nationale. Il a reconnu l'existence d'un « système de classement » baptisé « Mens (Minorités étrangères non sédentarisées). Subtile précision entre fichage et catégorie de fichage. Selon lui, MENS est en fait un « acronyme, un vocable utilisé pour faciliter le classement et l'échange d'informations et non pour constituer des fiches. »
Ce fichage répertorie les Roms et les gens du voyage (famille, localisation, etc). Il a été révélé la semaine dernière par le Monde, sur la base d'une présentation datant de 2004 réalisée par un gendarme à des entreprises de transport. Vendredi dernier, nous avions également retrouvé une autre mention de ce fichier, plus récente (octobre 2007), dans une autre présentation de la gendarmerie, sur le site de la Cesam. Depuis, la page web a été retirée (le document reste consultable ici)
Sur le coup, Brice Hortefeux s'était d'abord empressé de nier son existence, puis de nier en avoir connaissance, puis il a expliqué que « le fichier généalogique, alors détenu par l'OCLDI, a été supprimé le 13 décembre 2007, conformément aux obligations de la loi. » Il a ensuite demandé au groupe de contrôle des fichiers, qui dépend de lui, de « procéder à un contrôle des éléments qui seraient détenus par la gendarmerie », oubliant que seule la CNIL est habilitée à procéder à de telles vérifications. Sa responsable de la communication a d'ailleurs bien vite rappelé la règle : « Nous avons déjà collaboré à cette structure, qui peut recenser les données, nous les transférer, mais, en aucun cas, les analyser ou les juger. » Le ministre patauge... Confier le contrôle d'un abus interne à ses propres troupes, est-ce bien responsable ?
Une autre affaire devrait créer le malaise au sein des forces de l'ordre.  La video d'un journaliste d'investigation de Canal+ frappé par des CRS à Paris, mardi soir, en marge des manifestations contre les retraites a été vue plus de 50 000 fois hier. Exhibant sa carte de presse devant les CRS qui lui font face, le journaliste est tout de même frappé aux jambes quand la troupe décide de charger. Une autre journaliste a témoigné, sur Rue89, avoir subi le même sort. Un journaliste de TF1 s'est également fait matraqué.
Qui est responsable ?

LA POLICE FRAPPE UN JOURNALISTE D'INVESTIGATION DE CANAL+
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